Chapitre 1

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Les pieds plantés dans la boue des sous-bois, ta main se resserra sur l'épais élastique de ton lance pierre. Tu es terrée sous une bâche de camouflage, attendant que la proie que tu as en vision se pose dans ta ligne de mire. Retenant ton souffle et réagissant au quart de tour, tu abats la perdrix et t'empresse de l'achever.

Les fruits de ta chasse en besace, tu prends le chemin de retour sous l'œil d'une nature brute et non polluée, dans laquelle tu as vécu toute ton enfance.

Là où tu vis, c'est un petit village perdu. Peu de circulation et éloigné des grandes villes. Pourtant le village fonctionne comme une ville. Il y a une école, de la maternelle à la terminale, des petits commerces, des cafés, des restaurants, un complex médical suffisant, un hôtel...Mais le fait que tout le monde se connaisse, que les liens sont fort entre vous et que la nature est omniprésente, ça suffit à te persuader que c'est un village.

Et c'est comme ça qu'il n'est pas rare de te voir sortir de la forêt couverte de boue, des feuilles dans les cheveux, les habits parfois déchirés et parfois couverte de sang (que ce soit ton sang ou celui de tes proies). Que tu rentres ce jour-là pieds nus et de la boue jusqu'au mollet, les jambes zébrées par les ronces n'interpellaient donc aucunement ceux que tu croisais.

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- C'est moi !

Lourdement, tu poses la besace sur une des tables de la cuisine gérant le petit restaurant "Le chasseur", dans laquelle deux cuisiniers s'affairent.

- J'ai des perdrix, des faisans et une bécasse.

Un des deux hommes s'approcha de toi. Il est d'âge mur, la quarantaine. Ses cheveux bruns sont trempés par la vapeur d'eau qui s'échappent constamment des casseroles. Il se gratte la nuque l'air tendu.

- C'est peu, ça va être dur de finir les services jusqu'à demain soir.

- Bin, il fait de plus en plus chaud alors demain j'irais vers les marais.

- Merci de t'impliquer autant, ma petite [T/P], c'est sympa.

Tu offres un large sourire et lui fait un câlin avant de reculer, un sourire narquois aux lèvres.

- De rien Oncle Ben, ça m'fait plaiz' !

Ton oncle mit un temps à comprendre. Tu es boueuse et tu viens de te coller à une blouse blanche...

- AH [T/P], VA TE FAIRE FOUTRE ! DEGAGE DE MA CUISINE SALE GOSSE !

Dans un rire diabolique tu traverses le restaurant et t'empresses de rejoindre la place de la fontaine faisant face à la minuscule église du village.

Comme d'habitude, tes amis y sont, couvrant le calme par un brouhaha qui vous est propre. Plongeant tes pieds dans l'eau fraîche, tu fais partir la boue qui les couvraient faisant naître des dizaines de protestations dans le petit groupe. Protestations que tu ne suis pas, avec un sourire taquin.

Jusqu'à ce qu'ils te plongent dans l'eau légèrement brunie.

Ç'aurait pu finir en baston dans les marécages si une voiture n'était pas passée à ce moment là.

Alors NON. Ce n'est pas que vous n'avez jamais vu de voiture dans votre vie de campagnard. Mais aucun d'entre vous ne la reconnait comme une des voitures du village, et puisque celle-ci se dirigeait vers l'hôtel...ça suffisait à éveiller votre curiosité.

- PREMS A L'HÔTEL !  tu hurlas.

Le temps qu'ils captent et se mettent à courir, tu as eu le temps d'emprunter ton raccourci sans qu'ils ne le voient. En moins de cinq minutes tu as atteint l'hôtel qui était légèrement en dehors du village. Le reste du groupe arriva quelques minutes plus tard et vous entrèrent tous dans la cour où Félix, le fils des gérants était assis en train de tailler un pieu en bois.

- Bah...what the fuck les frères. Ya le feu au moulin ou quoi.

- Mais nan ! On vient voir le nouvel arrivant, là !

- Ah ouééééé, le gamin làààà...

Félix se leva, jetant un regard dédaigneux à la voiture de l'inconnu.

- Un...gamin ?

- Oué, 'fin il est majeur mais ça s'voit il est fragile. Il a pas voulu mon aide pour ses bagages, l'avait peur de ma carrure. Moi jte le fous par terre en 2,2 ma belle [T/P]~.

Tu levas les yeux au ciel avant de lui foutre une gifle.

- Aouch~ J'aime ça~

- T'es dégueulasse Félix. dis tu en l'enjambant.

Votre petit groupe se posta à l'entrée de l'accueil où le type est encore. A travers la porte, les détails du visage étaient à oublier mais vous pouviez tout de même remarquer le jaune vif de son sweat, son jean sombre et ses bottes en cuir tout deux tâchés de boue. Il échangea des billets contre une clé, mais impossible de savoir combien de nuits il avait acheté.

Légèrement déçus vous vous éloignèrent tous en traînant des pieds. La nuit commençait à tomber et comme si c'était un signal, chacun reçu à son tour un sms de leurs parents, leur ordonnant de rentrer, et Oncle Ben n'échappa pas à la règle.

En moins de 5 minutes, les rues étaient désertes et les fenêtres des maisons, toutes allumées.

Assise à ton bureau, la tête de Napoléon ton berger allemand, sur tes genoux, tu entrepris de boucler tes devoirs pour la semaine suivante et d'aller vérifier si l'enclos des poules était fermé.

Si elles étaient toutes en bonne santé, elles semblaient plutôt agitées et il ne te fallut pas beaucoup de temps pour capter l'origine de leur panique. Des légers bruits de feuilles écrasées provenaient du fond du jardin, là où l'obscurité est totale.

L'orée de la forêt est la limite du jardin alors il n'est pas rare que des sangliers, des cerfs, des renards ou autres se pointent...mais ces pas là, ils sont humains. Tu restes quelques secondes à fixer l'obscurité sans bouger, les sens en alerte mais tu te dis que c'est un des voisins qui passait, ou encore le Vieil André qui s'est égaré, ce qui n'est pas rare. Après tout si personne n'a de clôture séparant la forêt des jardins, c'est que vous vous faites tous confiance et c'est bien ainsi.

Sans y prêter plus attention, tu retournas à l'intérieur et partit te coucher, peu inquiétée.




Chasse à l'homme [HoodiexYou]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant