Chapitre 12

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Un an plus tard, banlieue-est parisienne...

Gaby déposa le bouquet de fleurs exotiques sur la pierre tombale. Les larmes coulaient sur ses joues glacées. Le cimetière était désert et sinistre. C'était l'hiver et les arbres dénudés donnaient au lieu un air plus désolé encore. Ce jour-là, il faisait un froid glacial. Depuis son arrivée en France, Gaby avait bien du mal à s'adapter au froid. Mais, depuis près d'un an, elle se sentait glacée en permanence. En fait, depuis qu'elle avait vu le cercueil de sa mère descendre dans ce trou béant dans la terre.

Elle frissonna. Depuis combien de temps était-elle debout là, devant la tombe de sa mère ? Elle prit son portable et réalisa qu'il était plus que temps pour elle de rentrer. Regardant une dernière fois le portrait de sa mère gravé sur la petite plaque de granit, elle remonta l'allée principale et alla attendre son bus dans l'abri en face du cimetière. Machinalement, elle vérifia les horaires. Mais, se rendant sur la tombe de sa mère au moins une fois par semaine, elle les connaissait en fait par cœur.

Prenant place sur le banc étroit, Gaby mit les écouteurs de son lecteur MP3. Le regard dans le vague, elle écouta la voix atypique et pleine d'émotions de Daniel Balavoine lancer son « SOS d'un terrien en détresse ». C'était une chanson qui résonnait particulièrement en elle. D'une part, parce que c'était un des titres parmi les CD que ses parents, sa mère surtout, aimaient beaucoup. Mais aussi parce que chaque fois qu'elle les entendait les paroles de cette chanson la prenaient aux tripes. Elle se sentait seule au monde. La tristesse ne la quittait que rarement. Et lorsque parfois, bien trop rarement, elle se surprenait à sourire, elle se sentait immédiatement coupable.

Il y a près d'un an, en une journée son enfance s'en était définitivement allée. Après le décès de sa mère, sa tante Nathalie et son oncle Didier l'avaient recueillie chez eux. Récemment, ils l'avaient même adoptée. Pour ne plus se sentir aussi seule, Gaby avait accepté de devenir leur fille et même de porter leur nom. Sa tante Nathalie avait insisté. Mais elle n'avait pas l'impression de faire partie de leur famille. Et elle se sentait toujours aussi seule.

Le bus arrivait. Pour une fois, il n'était pas bondé. Après avoir montré son titre de transport au chauffeur, Gaby alla s'installer sur l'un des sièges du fond. Elle posa la tête contre la vitre et regarda les rues défiler.

Lorsqu'elle s'était installée chez ses parents adoptifs, dès le début tout avait été compliqué. Gaby elle-même ne rêvait que de repartir pour le Brésil, d'aller vivre chez Mariana, de retrouver Rafael, « Tia » Luciana et tous les autres. Mais bien sûr, c'était impossible. Cela n'avait pas été très facile non plus pour les Dunoyer. En effet, pour un couple marié depuis plus de vingt ans, sans enfant, chambouler leur routine pour accueillir une adolescente n'avait pas été une sinécure.

Didier avait la quarantaine passée. Il était légèrement bedonnant, mais encore pas mal dans son genre. Il occupait un poste de cadre dans une importante société. C'était un homme très sociable qui avait beaucoup d'amis et qui était très apprécié. Nathalie, elle, était plus introvertie, plus réservée. C'était une femme élancée presque maigre qui aurait été jolie si elle n'avait pas eu cet air sévère. Elle travaillait comme secrétaire médicale dans un cabinet à Paris. Un brin obsessionnelle, elle ne supportait pas le moindre désordre et s'était immédiatement montrée très stricte. Aussi avoir un chat chez elle lui avait tout d'abord paru inenvisageable. Mais pour Gaby abandonner Leo avait été hors de question.

C'était son oncle Didier qui était venu à son secours.

— D'accord, avait finalement cédé tante Nathalie. Mais cet animal restera en bas. Je ne veux pas le voir à l'étage. Je ne supporterai pas de voir des poils de chat partout !

Faux-semblant : Destins croisés 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant