Chapitre 14

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Aujourd'hui, les environs d'Honfleur...

Une main sur sa poitrine pour maintenir le drap de bain qui ceignait son corps, Alida scruta le visage de Baptiste. Immobile, comme statufié, il la fixait intensément. La stupeur et l'incrédulité se lisaient sans peine sur son visage.

Il se rappelle enfin ! se dit-elle. Les sentiments qu'elle éprouvait à cet instant étaient aussi violents que contradictoires.

— Je me demandais combien il te faudrait encore de temps pour te souvenir de moi, fit-elle en lui arrachant farouchement le cadre des mains comme si le seul fait qu'il l'ait touché l'avait souillé. Mais en même temps, pourquoi te serais-tu souvenu de moi ? Pour toi, nous n'étions rien, n'est-ce pas ?

La lueur d'incrédulité persistait dans les yeux verts de Baptiste.

— Gaby..., lâcha-t-il finalement.

Sa voix trahissait son émotion.

La fille de Javier, pensait-il. C'était une évidence. D'ailleurs, comment ne l'avait-il pas reconnue ? Sous son visage de femme, il revoyait sans peine les traits juvéniles de la petite fille espiègle qu'elle avait été.

Mais pourquoi toute cette comédie ? Pourquoi toute cette haine ?

— Mon nom officiel, c'est Alida Gabriela Jouannet-Dunoyer, précisa-t-elle froidement. Et oui, je suis la fille de Javier. Ton prétendu ami. Tu te souviens de lui, au moins ? Javier Jouannet, l'homme que tu as tué.

La haine qui transparaissait dans la voix d'Alida fit autant tressaillir Baptiste que ce que laissaient entendre ses propos. Et un sentiment de culpabilité, autrefois si familier, l'étreignit à nouveau.

Alida perçut le malaise de Baptiste, et le considéra comme un aveu. Son amertume et sa colère s'en trouvèrent renforcées.

— La mort de ton père était un accident, Alida...

— Non !

— Crois-moi. Je n'ai pas de mot pour t'expliquer ce que j'ai ressenti à la mort de Javier. Je ne vais pas comparer ma peine à la douleur que ta mère et toi avez connue. Mais ton père était bien plus qu'un ami pour moi. C'était comme si j'avais perdu un membre de ma famille...

— Sans blague ! jeta-t-elle rageusement à mi-voix.

— Et c'est vrai, poursuivit Baptiste comme si elle ne l'avait pas interrompu, je m'en suis voulu d'avoir été indirectement responsable...

— Indirectement ! s'insurgea Alida en serrant convulsivement contre elle la photo encadrée de ses parents qu'elle avait arrachée à Baptiste un instant plus tôt. Ce serait trop facile ! Essaie de t'en convaincre si tu veux pour apaiser ta conscience. Mais la réalité c'est que tu es responsable de sa mort aussi sûrement que si tu l'avais tué de tes propres mains !

Interloquée, Alida s'interrompit brusquement. C'était les mots exacts que sa mère avait si souvent proféré qu'elle venait de prononcer. Elle reprit néanmoins.

— Maintenant, va-t'en ! Sors de chez moi !

Un lourd silence s'installa entre eux.

— Ça, c'est hors de question, Alida, fit finalement Baptiste d'un ton sans appel. Je ne m'en irai pas tant que nous n'aurons pas parlé de tout ça. Et sérieusement.

Il avait apparemment quelque peu recouvré son sang-froid.

— Mais je vais te laisser t'habiller. Ça te laissera le temps de te calmer et à moi... de réaliser...

Faux-semblant : Destins croisés 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant