ELLIPSE - A CINQ MILLE KILOMÈTRES

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Les vagues se brisaient contre le sable de la plage. Leah s'y était installée malgré la fraîcheur à l'aube du printemps. Le bruit de l'eau était apaisant et les embruns lui donnaient un sentiment de sécurité. Ça avait le don de lui rappeler la maison. Du Pacifique, elle passait à l'Atlantique, mais au moins, elle pouvait garder l'océan comme point de repère. 

Quand l'hiver fut terminé et les ennuis des Cullen avec, Leah avait réitéré son souhait de quitter la meute et Sam avait accepté sans broncher. C'était comme si les chaines qui l'entravaient depuis plusieurs années avaient fondu. Leah était de nouveau libre. Elle s'était transformée et avait foulé le sol de la forêt de la réserve une dernière fois, avant de retrouver sa forme charnelle et de se promettre d'enterrer cette période de sa vie. 

L'aînée de Clearwater avait envoyé bon nombre de curriculum vitae et de lettre de motivation dans différents établissements de la côte est des Etats-Unis. Elle avait déjà travaillé à l'accueil de l'hôpital de Forks, alors pourquoi pas à l'autre extrémité du pays? Elle n'avait pas d'idée arrêtée, peu importait la ville, tant qu'elle lui faisait oublier La Push et tous les malheurs qu'elle lui avait apporté. Par chance, le Sentara General Hospital de Virgina Beach lui proposa un poste pour le mois suivant. Tout avait été très vite et c'était tant mieux. Leah se sentait dépérir dans sa région natale, elle avait besoin de changement, elle voulait redevenir la jeune femme qu'elle avait été autrefois et du haut de ses vingt-sept ans, il n'était pas trop tard. 

L'appartement, que Leah louait, se trouvait seulement à quatre rues de l'hôpital qui l'embauchait et à quelques encablures de la plage. Pour un peu moins de 800$ par mois, Leah avait trouvé un studio propre, meublé et assez bien agencé. L'entrée donnait directement dans la pièce à vivre où un canapé trois places et une table à manger pour quatre personnes avaient été installés. Sur la droite siégeait la cuisine, minuscule mais correctement équipée. Et enfin, un espace nuit, assez restreint, avait été installé à l'opposé de la cuisine, derrière une cloison. Tous les murs avaient été repeints en blanc cassé avant le changement de locataire et aux vues de la netteté de la moquette, elle avait dû être changée très récemment aussi. A bien y regarder, cette appartement était austère et sans âme, pourtant Leah en était tombée amoureuse, tant il lui rappelait sa liberté. Elle l'égayerait, c'était certain.  

Les premiers mois de sa nouvelle vie passèrent à la vitesse de l'éclair. Elle commençait à s'habituer à son environnement ainsi qu'à ces habitants. Elle ne se perdait plus pour se rendre au centre commercial et s'était liée d'amitié avec plusieurs de ses collègues. Son corps aussi semblait se délecter de ce renouveau, elle s'était amincie et perdait, petit à petit, sa vélocité lupine. Son ouïe et sa vue avaient perdu de leur finesse. Elle s'était acheté un vélo pour se rendre au travail et s'était remise au sport. Au moins deux fois par semaine, elle faisait un footing sur la plage. Et quand elle retrait chez elle et qu'elle prenait sa douche, elle ne pouvait s'empêcher de sourire en ressentant les courbatures de ses jambes. Une page se tournait, pour son plus grand plaisir. Sa métamorphose s'acheva lorsqu'elle se réveilla une nuit, en sursaut et en sueur. Elle se sentait incommodée, patraque. Une douleur intense lui traversa l'abdomen. Elle eut la nausée et finit par s'agenouiller devant ses toilettes pour vomir. Ce n'est que dans cette position qu'elle remarqua la tâche béante sur son short de pyjama avant de rendre. Une tâche cramoisie. Une tâche de sang. Cette nuit là, Leah avait pleuré de joie. Elle avait même appeler sa mère sous le coup de l'émotion. Ses menstruations étaient revenues, elle était de nouveau une femme. Son passé de modificatrice était parti en fumée à la seconde où elle avait à nouveau perdu son sang. Elle pouvait enfin faire place à son avenir. 

Quand l'été fut venu, Leah n'était plus que l'ombre d'elle-même, vis à vis de son arrivée. Elle avait renoué avec la féminité. A présent, elle prenait plaisir à se maquiller et à se pomponner. Sa garde robe s'était rafraîchie et étoffée. Sa mauvaise humeur et sa mine assassine avait été mises au placard pour laisser place aux sourires et à la sérénité. Ainsi, les hommes commençaient à se retourner sur la jeune amérindienne. Elle était flattée, même si elle était un peu rouillée à cette pratique. Il y avait bien longtemps qu'elle n'avait pas eu à séduire. Et aux vues de sa dernière relation, elle préférait prendre le temps. 

You're my wonderwall | PAUL & RACHELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant