Q U I N Z E

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Je l'ai juste renvoyé chez lui. C'est la deuxième personne à qui j'en veut vraiment. Je crois que je commence à m'en vouloir à moi aussi quand je vois le visage angélique de Lise passer dans l'embrasure de la porte.

- Pourquoi il est parti ?

Je baisse la tête et murmure.

- Je lui ai dit de me laisser tranquille.

Elle ouvre grand les yeux et s'écrie.

- Quoi ? Mais Simon, t'es vraiment con !

- Je sais.

Elle soupire et vient s'assoir sur le lit à côté de moi.

- Sim, je sais que c'est pas facile, mais tu n'aurais pas du faire ça.

- Je sais.

- Tu sais aussi ce qu'il va se passer maintenant.

- Oui.

Elle soupire de nouveau et me prend dans ses bras.

- Il n'est pas Lydia, il ne fera rien de stupide, me rassure-t-elle alors que je commence à pleurer.

- T'en sais rien.

- Je continue à croire qu'il t'aime plus que ce qu'il veut te faire croire.

- Comme Lydia.

- Arrête ça ! Ne pense pas à elle, c'est fini, tout ça.

- Elle a failli mourir à cause de moi ! Comment veux-tu que j'oublie ça ? Je l'ai rejeté exactement comme je viens de le faire avec lui. Je suis qu'une merde incapable de faire autre chose que de blesser ceux que j'aime.

- Je t'interdis de dire ça ! Crie-t-elle soudain. Simon, t'es la personne la plus gentille qui existe, ce n'est pas de ta faute si elle était extrême. C'était un accident.

- Un accident qui a eu lieu juste après que je l'ai rejeté.

- Ce n'était pas de ta faute ! S'il te plaît, arrête de penser à ça. C'était il y a un an et demi, et elle va mieux, maintenant.

Je craque et j'éclate en sanglots que j'ai déjà retenu trop longtemps. Lise me serre gentiment contre elle jusqu'à ce que je me calme. Elle me chuchote des mots doux pour tenter de contenir le flot de larmes qui dévale mes joues. Samuel, alerté par le bruit, arrive dans ma chambre et me prend à son tour dans ses bras.

- Hé, ça va aller, Sim.

Ils me bercent tous les deux pendant tellement de temps que je n'arrive plus à pleurer. J'ai l'impression d'être un enfant dont on doit s'occuper pour ne pas qu'il fasse de bêtises. Moi qui d'habitude gère tout, tout seul, je ressent soudain le besoin d'être entouré. J'arrive quand même à me décoller de mes amis et je me roule sur mon lit. J'ai juste envie de dormir.

- Je vais bien, je vais juste me coucher. Vous pouvez rentrer, je vous ai retenu assez longtemps comme ça.

- Tu ne vas pas manger ?

- Je n'ai pas faim.

- D'accord, mais tu promets de nous envoyer un message quand tu te réveilles demain matin.

- Je te promets, Lizzie.

Elle semble satisfaite et m'embrasse sur la joue pour me dire au revoir.

- Bon, à bientôt mon Sim.

- Au revoir.

Elle me fait un dernier signe de la main avant de sortir et Sam soupire et se lève à son tour.

- Fais pas d'autres conneries.

Je souris faiblement.

- T'inquiète.

Il me rend mon sourire et répond :

- À lundi.

- Salut.

Il part et me laisse donc seul. J'entends la porte d'entrée se claquer discrètement derrière lui. Je ferme les yeux et cherche le sommeil, en vain. Je reste éveillé jusque tard dans la nuit, bien après avoir entendu mon père rentrer. Je me réveille plusieurs fois, parvient finalement à me rendormir et ouvre les yeux tôt le matin. Je me lève presque aussitôt. J'ouvre mes volets et scrute le ciel encore sombre comme s'il pouvait me dire ce que je dois faire à présent. Je prends mon portable et envoie un message à Lise pour la rassurer. Elle ne me répond pas mais il est à peine huit heures du matin, alors je ne m'inquiète pas. Je finis par m'habiller et je descends avec mon paquet de cigarettes et mes clés. Je n'en ai fumé qu'une ou deux depuis que je l'ai acheté. Je vais juste essayer de ne pas le finir maintenant que je suis stressé et triste.

J'en fume une, assis en face de l'immeuble. Je sais que Loïc peut me voir de son appartement. Je crois que je m'en fiche. Je penche la tête en arrière pour prendre une longue inspiration. Merde, j'avais oublié à quel point ça me détendait. Je jette le mégot dans la poubelle la plus proche et en allume une autre. Je la finis encore plus vite, et me relève pour jeter ce qu'il reste. Alors que j'allais en prendre une autre, je me rappelle de ma promesse, et enfonce le paquet dans ma poche.

J'entre de nouveau dans l'immeuble et ouvre ma boîte aux lettres, prenant en compte le fait que mon père oublie la plupart du temps. J'en ressort quelques feuilles publicitaires ainsi qu'une enveloppe en papier kraft marron inhabituellement lourde et épaisse. Je prends tout et l'emporte chez moi.

Je dépose le courrier sur la table du salon et saisit la grosse enveloppe, curieux. J'ai la surprise de constater qu'elle m'est adressé. Je l'ouvre, les mains tremblantes, et en sort un vieux carnet rouge.

Loïc.

Le Carnet Rouge [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant