H U I T

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- Hé, avec Samuel et un autre ami on sort cet après-midi et on mange en ville. Tu veux venir ?

Loïc me lance un regard surpris.

- Heu, je ne veux pas vous déranger.

- Si je te propose, c'est que ça ne me gêne pas. Alex et Sam, je pense qu'il s'en foutent.

Il hoche la tête et réfléchit quelques secondes.

- D'accord, alors.

- C'est vrai ? Super ! Je m'écris avec enthousiasme.

Je m'empare de mon portable et envoie tout de suite un message à mon ami pour le prévenir. Il répond immédiatement, bien qu'il soit en cours, par un "si ça te fait plaisir".

- Hum, par contre... je ne sais pas où vous allez manger mais je n'ai pas d'argent sur moi, fait-il, un peu gêné.

Je prends un ton désinvolte.

- Ne t'inquiète pas, je te paie le repas.

Il cligne des yeux comme s'il ne s'y attendait pas.

- M-mais, bredouille-t-il, je ne veux pas que tu dépense ton argent pour moi... ça me gêne un peu...

Je lui souris et balaye ses remarques d'un geste de la main.

- Je t'ai dit de ne pas t'inquiéter. Ça me fait plaisir.

Je me détourne un peu de lui pour lui signifier que ce n'est pas la peine de continuer cette discussion. Je l'entends soupirer.

- Merci, dans ce cas.

- Je t'en prie, fais-je en souriant.

On sort enfin de notre deuxième heure de libre de la journée. Le mercredi, j'ai cours de huit heures à treize heures, mais avec deux heures de trou en plein milieu. Je m'en suis pas mal plaint au début de l'année, avant de réaliser que, de toute façon, je préférais être au lycée que chez moi.

On se rend à notre dernier cours de la journée, qui s'avère être de la philosophie, alias la matière que je comprends le moins. Au début je trouvais ça intéressant, mais écouter un prof déblatérer pendant une heure sur la même chose en faisant des centaines de nuances incompréhensibles, ça m'a vite lassé. Loïc, lui, semble passionné. Il boit littéralement les paroles du vieil homme qui fait office de prof, prend des notes longues dans une écriture très brouillon et il est un des seuls qui semble comprendre ce qu'il raconte. C'est assez hypnotisant de le regarder faire. Sa main vole au-dessus de sa feuille, ses yeux font des allers-retours incessants entre ce qu'il a déjà écrit et ce qu'il est en train de noter.

Je me détourne vite de cette vision, un peu perturbé. Si il a l'air d'être un bon élève en général, je ne l'avais jamais vu aussi concentré. Même si je ne comprends pas comment il fait pour suivre, je ne manquerais pas de lui demander ses cours, qui sont certainement plus complets que les miens.

Lorsqu'on sort enfin, je lui demande en soufflant :

- Comment tu fais pour prendre autant de notes ? Tu comprends ce qu'il dit ?

Il laisse échapper un petit rire charmant et me répond un sourire aux lèvres.

- J'adore la philo.

- J'avais pas remarqué, dis-je en grognant.

On descend les escaliers et on se retrouve devant le portail, à chercher Samuel et Alexandre parmi les dizaines d'élèves qui se pressent vers la sortie. Je les repère à l'arrêt de bus et prends Loïc par le poignet pour le traîner derrière moi et ne pas le perdre. Je le lâche quand la foule se raréfie, serre la main d'Alex et fais un check à mon meilleur ami.

- Ça va ? Me demande-t-il.

- J'ai cru que j'allais mourir en cours mais ça peut aller. Et toi ?

- Tranquille, je crois que je vais avoir un rencart avec Camille.

Je hausse les sourcils.

- Camille qui ?

- Celle qui était dans notre cours d'anglais l'année dernière. La petite avec les cheveux bouclés.

Je réfléchis quelques secondes avant de me rappeler de cette fille.

- Ah oui, je me souviens.

Il me lance un regard amusé.

- Celle qui voulait sortir avec toi en début de première.

- C'est bon, je t'ai dit que je me souvenais, dis-je en rougissant. Pas la peine d'insister.

Il rit devant mon embarras mais continue dans sa lancée.

- Je me demandes pourquoi t'as pas voulu la pecho. Elle est canon !

- Arrête ça, Samuel. Tu sais très bien pourquoi.

Son rire cesse brusquement et il hoche la tête, penaud.

- Oui, c'est vrai. Désolé, Sim.

Je lance un regard à Loïc, qui a l'air perdu. Pas étonnant, il ne connait pas grand monde ici et n'a aucune idée de ce qu'il s'est passé l'année dernière. C'est de l'histoire ancienne, mais malgré tout je n'aime pas en parler. Je reprends un ton joyeux pour détendre l'atmosphère.

- Bon, on va manger ?

Le Carnet Rouge [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant