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Tu choisis un album dont les chansons sont conviviales afin d'instaurer une ambiance amicale et détendue.

— Tu sais que les CD ça existe ? demande Amy en voyant le vinyle entre tes mains. C'est plus pratique et beaucoup moins encombrant.

— Oui, mais ça n'a pas le même charme !

La jeune femme lève les yeux au ciel avant de te sourire. Cette réaction t'étonne, depuis que tu la connais, elle a rarement laissé transparaître ses émotions. Après avoir posé l'aiguille sur le disque, tu vas t'asseoir sur le lit de camp, à côté d'Amy, pendant que les notes joyeuses sortent des haut-parleurs.

— J'ai remarqué que tu as l'air un peu triste ce soir, dis-tu. Si tu veux parler, je suis là.

— C'est juste que j'arrête pas de repenser à ma vie dans le dernier camp dans lequel j'étais.

— C'était si horrible que ça ?

— Tu n'as même pas idée...

Tu attends qu'Amy reprenne la parole, la jeune femme semble chercher le courage nécessaire pour se livrer à toi.

— Au début, j'habitais avec mes parents et ma sœur. Avant l'épidémie, on avait une ferme qui se trouvait un peu à l'écart de la civilisation. L'endroit était parfait, il y avait des grillages autour du terrain pour éviter les vols ou que les animaux ne s'enfuient. Forcément, quand les gens ont commencé à se transformer, ma famille n'a eu qu'à fermer les portes et cultiver sa propre nourriture.

— Tu te souviens de cette époque ? D'avant les zombies, je veux dire.

— Non, j'étais trop jeune, mais aussi loin que je m'en souvienne, on était bien là-bas, on avait besoin de rien ni de personne. Un vrai petit paradis perdu au milieu de l'enfer qu'est devenu ce monde. Et puis, un jour, un groupe d'hommes et venu. Ils se sont mis à exiger qu'on leur donne les animaux. Évidemment, on a refusé et on les a chassés avec nos fusils. Mais ils sont revenus nombreux, beaucoup plus nombreux.

La voix de la jeune femme se brise sur ce dernier mot. Tu attends patiemment la suite de l'histoire, suspendue à ses lèvres.

— Ils sont arrivés en pleine nuit et ils ont fait un trou dans le grillage. Je me suis réveillée avec un pistolet collé contre la tempe. Ils étaient trois dans ma chambre, et les trois ont décidés de prendre du bon temps avec moi. Je pouvais entendre ma sœur crier dans la chambre d'à côté, elle avait eu le droit au même traitement que moi. Après ça, ils nous ont emmenées à l'extérieur où mes parents étaient ligotés. Ils les ont arrosés d'essence avant de leur mettre le feu.

La jeune femme interrompt son histoire, les larmes aux yeux. Il lui faut quelques secondes avant de reprendre.

— Ils nous ont obligées à les regarder brûler jusqu'à ce que le feu s'éteigne, ensuite ils nous ont emmenées de force avec eux. Le camp était géré par les Skinheads, un groupe exclusivement formé d'hommes au crâne rasé. Être une femme là-bas, c'était être réduite au rang d'esclave. Chaque jour, je devais nettoyer leurs habits dégueulasses et chaque soir un homme différent abusait de moi. En échange, j'avais le droit à des coups et de la nourriture qu'on n'aurait même pas donné à un chien. Mais au moins, j'avais ma sœur avec moi. Ça rendait cet endroit abominable légèrement plus supportable.

Tu peux sentir la détresse dans la voix d'Amy. Ne sachant pas quoi lui dire, tu te contentes de lui prendre la main. La jeune femme sert la tienne avec force en retour.

— Et puis, un jour, ma sœur est tombée enceinte. Ça devait forcément finir par arriver, vu la fréquence à laquelle ses salauds se servaient de nous. On a réussi à cacher son état pendant presque trois mois en cherchant un moyen de nous évader, mais un des Skinheads a fini par comprendre. Elle a été obligée de consulter le médecin du camp, et je ne l'ai plus revue pendant presque un an.

Fuir ou Mourir - Histoire interactiveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant