La pire équipe

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Il fait beau et chaud, le sable est doux entre mes orteils. Toute la classe, comme d'habitude, a salué l'initiative d'Ashido de venir à la plage, et nous nous y sommes tous à présent, bien contents de passer cette journée de vacances ensemble.

Je suis assis à même le sol en plein soleil, mais cela ne me dérange pas : un léger sweat me couvre le dos et les épaules, et j'ai mon alter pour me rafraîchir Je suis donc protégé et de la chaleur et des coups de soleil. D'ailleurs en parlant de ça, comme je l'avais prédit dans ma chambre, Bakugo s'en est bel et bien pris un, un beau coup de soleil sur le nez qui le rend à la fois encore plus terrifiant, mille fois plus irritable que d'habitude – et c'est le cas de le dire – et tout à fait ridicule. J'entends depuis au moins une demi-heure ses braillements mais j'échappe heureusement à sa colère, car je me trouve loin de lui. Je suppose que c'est Kirishima qui doit le supporter.

Dans les vagues, les filles qui jouent à une version particulière du volley ball dont les règles – clairement improbables – ont été créées par Hagakure. Quelques garçons – Midoriya, Sero, Kirishima ou Ojiro – jouent avec elles et Iida fait office d'arbitre, bien que personne ne prête attention à ses coups de sifflet et consignes. J'étais au début étonné de ne pas voir parmi eux Mineta, mais j'ai vite compris qu'il préférait rester à l'abri d'un ballon qui pouvait très facilement lui tomber sur la tête et observer de loin les poitrines rebondissantes des filles, avec pour agréable compagnie Kaminari. Cependant je sens que celui-ci hésite à rejoindre les autres dans l'eau : je ne suis pas le seul à avoir remarqué ça, Kaminari a vraiment un faible pour Jiro, et le voir persuadé d'être discret alors qu'il n'en est rien me rassure un peu quant à ma propre discrétion – d'ailleurs, pendant que j'y pense, pourquoi lui n'est-il pas aussi un souffre-douleur d'Ashido ? La vie est décidément trop injuste parfois.

Sous les parasols, près des deux voyeurs, Sato garde sagement la glacière avec Shoji, Koda et Tokoyami. Un peu plus loin, Aoyama a entreprit de se faire une statue de lui-même en sable, qui s'effondre bien vite lorsque des gamins malintentionnés se jettent joyeusement dessus – les enfants sont les pires des créatures : je le sais car j'ai eu l'occasion de voir leur véritable nature, Bakugo peut aussi témoigner. Bakugo d'ailleurs : Kirishima a eu la bonne idée pour l'occuper – car il se plaignait toujours de son coup de soleil – de le provoquer en affirmant que le château de sable qu'il construirait serait plus le plus beau et le plus grand. Evidemment, dès qu'il s'agit de savoir qui a la plus grosse – tour de sable, évidemment – Bakugo répond présent en hurlant, et voilà qu'il se démène assis par terre, en gueulant de temps à autre qu'il va faire bouffer du sable à quiconque oserait détruire son château. Voir les enfants maléfiques et leurs ustensiles diaboliques en plastique a dû réveiller en lui certains souvenirs. Car sur la plage, nous ne sommes pas seuls. Des familles sont aussi venues profiter du beau temps et de la chaleur en ce début de vacances. Autour de ma classe courent des bambins armés de seaux et pelles, surveillés du coin de l'œil par leurs parents qui font bronzette.

Et moi, dans tout ça ? La question de pourquoi je reste ainsi à l'écart, le cul dans le sable, est totalement légitime. Pourquoi est-ce que je ne suis pas parti rejoindre Momo et les autres pour m'amuser avec eux ? La réponse est pourtant très simple : je suis terriblement gêné à l'idée de me retrouver près de Momo alors qu'elle est en maillot de bain, à moitié dénudée donc. Ça peut paraitre stupide, je le conçois, mais bon, il s'agit de mon côté un peu pudique.

Je ne suis jamais venu me baigner à la plage entre amis ou en famille, pour trois raisons distinctes. La première, eh bien, c'est parce que je n'avais pas d'amis avant le lycée – c'est un peu pathétique, de le dire comme ça – ; la seconde, parce je n'avais pas de vie de famille ; et la troisième, parce que je n'aime pas me baigner, tout simplement. Je dois tenir ça de ma mère.
Je me souviens que, quand j'étais petit, ma mère et moi venions parfois nous promener au bord des vagues, pieds nus. Nous ne nous baignions jamais car elle n'aime pas vraiment ça, mais ça ne me dérangeait pas. Je m'agrippais à sa main chaude et bien souvent, j'étais surexcité alors je la tirais par le bras avec ferveur dès que je voyais au loin un coquillage à moitié ensablé. Je ne voulais jamais lâcher sa main. Elle ne s'en formalisait pas et me suivait parfois où je courais, attentive. Je me souviens que c'était dans ces moments-là, ces instants où nous n'étions que tous les deux, que je la voyais vraiment sourire. Je crois qu'elle venait ici pour fuir mon père. Maintenant que j'y pense, c'est aussi la raison pour laquelle je suis venu aujourd'hui à la plage. Mon père a un jour de congé exceptionnel et est donc à la maison. Mais personne ne sera là pour passer du temps avec lui. Qui le voudrait, de toute manière ?

Malencontreuses mésaventures d'un garçon amoureux. (TodoMomo)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant