Chapitre 3

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Dès 6 heures, Armin avait déjà remballé toutes ses affaires afin de ne pas se faire virer par les gardiens. Hermès trottina à ses côtés comme à son habitude. Aujourd'hui, il avait pour objectif de trouver une petite place dans un refuge afin de prendre une douche. Le plus proche se trouvait à 5 kilomètres. Ce chiffre ne lui faisait pas peur, il marchait tellement que les kilomètres ne lui faisaient plus aucun effet.

Frottant ses deux mains abimées, il tira un peu plus son écharpe autour de lui. Il faisait encore froid et il y avait déjà du monde dehors. Armin ignora un petit peu les regards moqueurs et traça sa route avant de tomber dans une impasse.

- Tu vas où comme ça ?

Il se retourna avant de sursauter quand trois jeunes hommes l'observaient. Ils s'approchèrent de lui, un sourire malsain sur leur visage. Il savait très bien qu'il allait passer un très mauvais moment.

Se redressant douloureusement sur ses genoux, il remarqua ses affaires éparpillées autour de lui. Plus d'argent, ses livres déchirés mais avec chance, ses écrits étaient là. Il écrivait. Il voulait être auteur. Un rêve qui ne pourra jamais être réalisé. Armin attrapa ses feuilles et les observa avant de caresser la tête de son chien, souriant.

- Ce n'est rien. Je suis habitué tu sais ?

Regroupant ses affaires personnelles, il reprit la route comme si rien ne c'était passé. Normalement, le refuge ouvrait vers 8 heures. Armin observa le soleil afin d'avoir une idée de l'heure ou sinon, il demandait à des passants. Marchant encore et encore, il avait l'impression qu'il n'allait jamais arriver à destination. Le soleil montrait de moins en moins son bout du nez, puis ce matin, les flocons commençaient à se montrer timidement.

- Bonjour Armin ? Comment vas-tu ? demanda un bénévole en lui offrant une tasse de café.

- Je vais bien, je te remercie, sourit le blond en buvant le café.

- Qu'as-tu à la lèvre ?

Le jeune homme toucha sa bouche et remarqua un petit peu de sang sur son index. Surement les gars qui l'avaient agressé ce matin.

- Non je vais bien, mentit Armin avec un sourire douloureux. Je peux aller prendre une douche ?

- Il reste deux cabines.

- Et...

- Oui, emmène-le avec toi, discrètement, sourit le brun en lui faisant un clin d'œil.

En réalité les chiens n'étaient pas autorisés ici mais Hermès avait son petit charme. Armin le remercia et s'éclipsa dans les cabines. Son compagnon resta près du mur à l'abri des regards tandis qu'Armin savoura ses quelques minutes sous une eau pure et propre. Ses marques au ventre étaient bleutées et écœurantes à voir. De beaux ecchymoses encore une fois. Il ressemblait à une bête maltraitée chaque jour. Il se savonna, frotta ses cheveux avant d'entourer une serviette autour de lui. Il attrapa des vêtements propres qu'il possédait en cas de besoin et sortit avant d'appeler discrètement Hermès.

- A ton tour.

L'eau coula sur son poil, retirant les poussières et la boue séchée. Hermès se secoua à plusieurs reprises, n'appréciant pas réellement les douches. Armin était parfois obligé de le trainer sous la douche car ce dernier avait horreur de se sentir mouiller.

Il rasa les derniers poils de sa barbe avant de brosser ses cheveux. Il se sentait plus humain. Peut-être que pour les autres, prendre une douche était qu'une tâche à réaliser, pour lui c'était le Graal.

Assis à une table, plongé dans le New York Times, il lit les nouvelles du pays avec intention. C'était les seuls moments où il pouvait comprendre ce qu'il se passait sur le territoire ou dans les autres pays voisins. « Accusé à tort, il est enfin libre ! » Armin commença à lire cet article avec intention.

« Après dix jours de délibérations dans le procès de la joggeuse de Central Park, un jury a déclaré non coupable, Onyankopon qui était accusé d'avoir violé puis tenté de tuer Sasha Braus. Son avocate : Annie Leonhart a fait valoir que les aveux de son client ont été arrachés par la police à force de menaces et d'intimidation. Elle soulignait également l'insuffisance de preuves matérielles à l'égard de son client. »

Une photo accompagnée l'article montrant Annie et Onyankopon, sortant le sourire aux lèvres, entourés de la famille du jeune homme. Une victoire. Armin observa le visage de l'avocate.

- Salut !

Il sursauta et releva la tête vers Connie qui s'installa à ses côtés. Il travaillait ici depuis maintenant 5 mois. Un garçon très gentil, un peu tête en l'air mais qui aimait prêter main forte.

- Elle est belle hein ?

Armin cligna des yeux avant de reporter son regard sur le visage de l'avocate qui jetait un coup d'œil vers le photographe comme si elle savait qu'elle était photographiée. Dans ses yeux, on pouvait voir qu'elle se moquait de la police et de leur incapacité à résoudre un crime.

- Elle est charmante, répondit simplement le blond.

- Quand vas-tu te trouver quelqu'un ?

- Je suis SDF.

- Et ?

Il haussa des épaules.

- Je serai un boulet puis, regarde-moi, ricana Armin. Je vis dehors comme un animal errant. Qui veut de moi ?

- Je suis sûr qu'une femme tombera folle de toi.

- Ça fait 3 ans que j'attends.

- Sors de ta coquille aussi ! Regarde-moi ce visage, commença Connie en attrapant sa tête. Ses yeux bleus, cette bouche, cette mâchoire carrée. Frère, sérieux !

Effectivement, trois années s'étaient écoulées depuis qu'il avait perdu son emploi du jour au lendemain. Se retrouver à la rue avait été un choc pour lui, il avait tout perdu. Aucune famille, il devait se débrouiller seul mais il s'y était habitué et il savait que revivre un jour entre quatre murs, sera compliqué. Également le manque de conversation et d'interaction sociale le manquaient terriblement. Il ne savait pas ce que c'était d'être réellement aimé. Il avait déjà eu des relations avant tout ça mais elles n'avaient jamais porté ses fruits. Il avait connu l'amour d'un père et d'une mère mais ils étaient aujourd'hui décédés. Un accident de voiture les avait emportés.

Il se sentait seul, terriblement seul mais Hermès était là.

[Aruani] L'homme invisibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant