Chapitre 5 : Des Volailles Malchanceuses

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Belzébuth au pouvoir, les sacrifices à sa gloire avaient dû être colossaux. Gigantesques, pour l’avènement du Roi des Mouches. Le Bourreau et Nergal n’avaient plus posé de question sur son identité et celle de Silke. Ils avaient compris qu’elles n’avaient pas eu d’autres choix que de fuir, pour survivre.

Du moment qu’ils le croyaient, cela arrangeait Blanche.

Assise au pied du grand chêne mort, la lare ouvrit sa montre à gousset. Un simple coup d’œil la fit la refermer d’un coup sec. Le temps filait trop vite, ces derniers jours. Avec l’attaque des harpies, elle en avait perdu la notion.

Le temps… Elle en manquait grandement. Le soleil se couchait sur une nouvelle journée, où elle avait affronté les sbires des Enfers, fait découvrir à Silke la vie d’une jeune adulte normale, acquit une nouvelle maison en même temps qu’une défiance évidente de la part des gardiens d’Exil. Ça, elle ne pouvait pas le leur reprocher. En revanche, elle aurait espéré voir les airs mieux protégés.

-Blanche ?

La nymphe sauta sur le banc à ses côtés, son sourire illuminant son beau visage. Ses boucles blondes coupées courts rehaussaient le bleu de ses yeux. Sa beauté cachait clairement ses capacités de combattante, en plus de la mini-jupe noire et du corset en cuir.

-Tu as mauvaise mine. Al et Nergal t’ont fait des misères ?

-Non, pas vraiment.

-Pourtant, tu es bien pâle. Tu veux venir faire un tour dans ma penderie ? C’est curatif, pour les filles, le shopping.

-Le shopping ?

Cassandra ouvrit la bouche, stupéfaite. Apparemment, le « shopping » était une chose importante qui échappait totalement à la lare.

-Se prendre des vêtements, des bijoux, du maquillage, des livres… tout ça… Tu n’as jamais fait ?

-J’ai été assassiné il y a quelques siècles. A l’époque, avoir deux robes et une armure était déjà un luxe.

-Ha oui… Tu es une lare. Depuis plus rien ne t’apparient, n’est-ce pas ?

La nymphe semblait réellement triste. De coutume dans l’Invisible, les lares faisaient partie du mobilier, forme de revenants sans âme ni émotion, avec pour seul but de servir leur maisonnée. Une telle réaction était des plus inhabituelle. A l’instar de Blanche, en fait.

-Être une esclave ne prête pas à la possession...

Son attention fut détournée par Nergal. Le démon discutait avec Stefan le vampire, en redescendant la grande rue d’Exil, menant à la place du chêne. Ils avaient une mine sombre. L’annonce d’une guerre démoniaque n’était bonne pour personne. Satan et Belzébuth formaient déjà leurs parties, l’un pour récupérer son trône, l’autre pour le conserver. Il ne faisait aucun doute qu’Exil allait se retrouver au cœur de la tourmente.

-Oh oh… Le petit chef de police te tente, hein ?

-Mmh ? Oui. Il est vraiment craquant.

Sa franchise surprit Cassandra, qui éclata de rire. Le démon leva alors la tête dans sa direction. Un sourire accrocha ses lèvres, le rendant encore plus séduisant aux yeux de Blanche. Ses cheveux ébouriffés voilaient toujours ses cicatrices, à son grand regret. Elle venait d’une époque où les guerriers étaient admirés à l’égal des rois. Ces marques de bataille étaient… excitantes…

-Blanche.

Svenn venait de surgir d’une rue latéral, bondée par les jeunes étudiants sortis de cours. Déjà, les parents des bambins se profilaient sur le pas de leur maison, un peu partout, attendant le retour de leur progéniture. Le jeune loup, lui, portait un sac de cours plein de cahiers, sans l’ombre d’une Silke autour de lui.

1. La Soubrette InsoumiseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant