25. Rêve souvenir

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Le mal qui vrilla dans mes tempes m'arracha un gémissement. Je sentais tout mon corps endoloris sans vraiment comprendre d'où venait le mal. Étrangement, je me sentais pourtant bien. J'avais la sensation d'avoir une chaude couverture sur moi et d'être allongée sur un épais et confortable matelas. Je ne me souvenais de rien et à vrai dire, je n'en avais pas l'envie. Mes derniers souvenirs remontaient à... En faite, je ne m'en souvenais même plus.

J'ouvrais doucement les yeux, papillonnant des paupières pour habituer mes yeux à la douce lumière que filtrait les volets. Dès qu'ils furent suffisamment préparés, je les ouvrais en grand avec l'intention ferme de regarder où je me trouvais. Je découvris une petite chambre que je n'eus aucun mal à reconnaître. Le lit où je me trouvais allongée, la petite table sous la fenêtre et la basse armoire m'étaient familier parce que me trouvais dans la chambre de mon enfance. Je compris que je rêvais lorsque je m'apercevais que j'avais récupéré le corps de mes huit ans.

-Amo, si tu ne te lèves pas, je jette ton épée dans la rivière! Me cria mon frère depuis la pièce à vivre.

Je savais avant même de me lever quel souvenir j'étais entrain de revivre et quelle journée j'allais certainement devoir subir à nouveau. Si mon subconscient m'envoyait ce souvenir en particulier, je me doutais bien que cela n'était pas juste comme ça. Ma rencontre avec celui que j'avais renommé "l'autre" avait ravivé en moi beaucoup de vestiges de mon passé. À vrai dire, cela venait notamment du fait qu'il porte le même prénom que mon défunt frère jumeau.

Entendre sa voix brisa en moi le peu de cœur qui avait cicatrisé durant les années que j'avais passé à essayer d'oublier. Mais on n'oublie pas sa douleur, jamais, on apprend seulement à avancer en boitant. J'avais tout perdu et m'étais retrouvée sur les genoux à ramper. J'avais dû ré-apprendre à marcher -plus ou moins correctement-, et tout ça pourquoi au final? Je venais de tout perdre à nouveau. Il était bien trop risqué pour la Résistance -même accompagnée de l'armée de Vasilissa- de venir aux portes de l'empire, d'entamer la guerre physique tout ça pour me récupérer. J'allais devoir m'en sortir toute seule et par mes propres moyens. Cela n'allait pas être une mince affaire.

Je levais mon corps d'enfant péniblement. Dans ma mémoire, la veille de cette fameuse journée, j'étais partie pour de longues heures avec mon jumeau pour nous entraîner à l'épée. C'était notre jeu préféré à tous les deux bien que cela déplaisait fortement à notre père qui était lui d'un tempérament bien plus calme. Je m'habillais rapidement pour rejoindre le reste de ma famille.

J'eus presque un choc en les voyant tous vivants. Mon frère Deleo était assis à table et mangeait un gâteau que mon père avait déposé dans son assiette. Un autre attendait déjà dans la mienne à la place qui m'était réservée. Ma mère était assise et tourna la tête dans ma direction au moment précis ou j'entrais. Mon père cuisinait pour nous en souriant. C'était effrayant de revoir à quel point tous les petits détails qui étaient gravés dans ma mémoire se répétaient maintenant mais aussi rassurant de pouvoir se laisser bercer par la douceur d'un matin enfantin, simple, et qui réchauffait mon cœur comme peu de chose pouvait le faire.

L'élan d'émotion qui monta dans ma gorge l'enserra doucement et pour retenir les larmes qui menaçaient de s'écouler de mes yeux, je me précipitais dans les bras de mon père. Celui ci me réceptionna avec douceur et m'enroula dans ses bras. Il me serra tendrement et j'essayais d'en faire de même , tant bien que mal avec mes petits bras. En reculant, mon père m'offrit un sourire si délicat qu'il embauma mon être d'une douce allégresse. Ce bonheur doucereux remonta jusqu'à mes lèvres et je leur offrit au travers de ce sourire toute ma joie de les revoir. Je réservais le même sort à ma mère, qui eut en tout point la même réaction que mon père. Je n'étais que bien trop heureuse de les revoir. Je m'installais enfin à la table et dévorais avec faim mon repas.

Quoi qu'il nous en coûteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant