Au rythme des explosions

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Cela fait plusieurs heures que les félicoptères sont en route. Depuis son appareil privé, Suprêmiaou fait sa sieste suprême. C’est encore un de ces moments où le chef des félins est très susceptible. Malheureusement, le pilote doit le réveiller :
- Toutes mes excuses, grand chef suprême… (L’intéressé ouvre les yeux et grogne pour exprimer son agacement suprême.) Un félicoptère s’approche à grande vitesse, juste devant nous. Il vient de nous envoyer une communication qui nous dit que les coordonnées ne mènent pas au QG ennemi.
- Comment ça ?! s’étrangle le Colonel Firat, pourtant assez calme, d’habitude. C’est impossible ! Cela voudrait dire que le félicoptère n’aurait pas été détruit ?
- Ne vous embrouillez pas, répond calmement Suprêmiaou. Ce félicoptère n’est qu’un leurre envoyé par les Canins. Dans l’espoir de nous faire rebrousser chemin. (Il fait un signe au pilote.) Abattez-le.
Sans attendre, le pilote obéit et ouvre le feu.
À une centaine de mètres de là, le félicoptère vole en éclats dans une grosse explosion. Les débris de l’appareil sont projetés dans tous les sens, mais n’atteignent aucun félicoptère de l’armée féline. Il ne reste qu’un gigantesque nuage de fumée sombre, transpercé par près de 200 appareils volants.
- Nettoyez-moi ça ! grogne Suprêmiaou, en désignant le cockpit de son appareil privé, recouvert de poussière.
Aussitôt, le pilote presse un bouton et des essuie-glaces nettoient le cockpit, ce qui calme un peu le chef suprême des félins, toujours aussi susceptible.
Rien ne peut arrêter l’incroyable flotte, qui progresse à une vitesse croissante.

Le Quartier Général de la Révoltruffe est presque désert. Au total, il ne reste qu’une dizaine de Canins sur les lieux, tous réunis sur la plateforme de décollage.
D’un côté, l’Amiral Cabos, le Général Cocker et un pilote. De l’autre côté, les sept Canins chargés de rester sur place.
- Il vous restera une aéro-niche dans le QG, les rassure Cabos. Dès que vous verrez les félicoptères, faites ce qui est prévu et fuyez le plus discrètement possible. Bonne chance, mes braves Canins !
Aussitôt, les sept chiens font demi-tour et rejoignent leur poste en courant.
Peu après, le pilote monte dans la dernière aéro-niche se trouvant sur la plateforme de décollage puis propose :
- Il serait préférable de partir dès maintenant.
Le Général Cocker confirme et monte dans l’appareil.
Le chef de la Révoltruffe observe son Quartier Général une dernière fois, en versant une larme. Personne ne l’a jamais vu pleurer.
- Allons-y Amiral, commence Cocker, les ennemis peuvent arriver d’un moment à l’autre. (Aucune réaction.) Il est trop risqué de rester ici plus longtemps.
Finalement, Cabos se retourne et déclare calmement :
- J’avais juste besoin de le contempler une dernière fois.
Le Général lui fait comprendre qu’il partage sa tristesse, puis l’aide à monter dans l’aéro-niche. « Je ne l’avais jamais vu aussi triste. » pense le cocker, inquiet. « C’est un solide, l’Amiral ! Mais, comme tout le monde, il est sensible… »
C’est dans la nuit, obscure et étouffante, que la dernière aéro-niche quitte le sol, en emportant avec elle le chef de la Révoltruffe, inconsolable.

À plusieurs kilomètres de là, plus d’une centaine d’aéro-niches avance en file indienne vers une seule et même direction : Spectror. Dans chaque aéro-niche, le pilote est le seul Canin qui ne dort pas. Tous les autres dorment profondément.
Tout-à-coup, une énorme explosion réveille tous les Canins d’un seul coup. La plupart d’entre eux s’empresse d’ouvrir les fenêtres latérales de leur aéro-niche. C’est également le cas de Falcon, qui veut absolument voir ce qu’il s’est passé.
Au loin, une lueur rouge s’anime dans l’obscurité de la nuit. Les explosions s’enchainent, au fur et à mesure que les félicoptères arrivent. Chacun leur tour, les bâtiments du QG se font dévorer par les flammes et finissent par s’écrouler sous leur propre poids.
Cette destruction progressive est un bien triste spectacle pour tous les Canins. Surtout pour l’Amiral Cabos, parti en dernier, qui est aux premières loges de la scène la plus horrible de toute sa vie. À côté de lui, le Général Cocker est tout aussi ému. « En espérant qu’ils n’ont pas oublié ce qui est prévu… » pense-t-il, inquiet.
Un peu avant leur départ, Cabos et Cocker ont expliqué leur plan aux sept Canins chargés de rester au QG. Ce plan consistait à projeter un ensemble d’explosifs sur les félicoptères, à l’aide d’une énorme catapulte. Les Canins étaient censés la commander à distance, depuis un autre bâtiment.
Cependant, la première explosion était probablement celle de tous les explosifs de la catapulte, qui n’a même pas eu le temps d’être commandée. Les félicoptères, invisibles dans l’obscurité, ont attaqué très rapidement et en grand nombre !
Dégoûté, l’Amiral Cabos préfère détourner le regard et rentrer dans l’aéro-niche, pour essayer de se rendormir. Ce qui sera impossible pour tous les Canins, à cause de toutes ces explosions, aussi bruyantes que terrifiantes.
Au bout de quelques minutes, le Quartier Général de la Révoltruffe est entièrement en flammes. Inutile de préciser que les sept derniers Canins n’ont pas eu le temps de s’enfuir. Les 200 félicoptères ont bombardé les bâtiments à une vitesse fulgurante, sans leur laisser le moindre répit. Cette attaque, brève mais terriblement efficace, s’est déroulée sous le regard satisfait de Suprêmiaou. Depuis son félicoptère, le chef suprême des félins admirait le spectacle, avec la certitude de maitriser la situation, comme à son habitude.

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