L'alerte

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Depuis sa grange, Arhod saisit, son panier, sa fourche et son bon vieux chapeau de paille. Il prend une grande inspiration et déclare :
- C’est parti pour une nouvelle journée de travail ! Rien de mieux.
De bonne humeur, le grand fermier se dirige vers son champ et admire la beauté des multiples plantes qui poussent sur les terres de son enfance.
- Rien de mieux… répète-t-il à voix basse.
À l’aide de sa fourche, Arhod déterre l’une des plantes de son champ et la jette dans son panier. Le vieux golden retriever arrache ensuite une dizaine d’autres plantes et les place une par une dans le même panier. Au bout d’un moment, il s’arrête et regarde ce qui a été récolté.
- Comment est-ce possible ? s’intrigue Arhod, en voyant le panier vide.
En soupirant, le fermier ramasse l’objet et regarde aux alentours. Devant lui, les larges feuilles sont en mouvement.
- Sûrement un chien sauvage caché derrière les plantes, suppose Arhod.
Méfiant, le golden retriever saisit sa fourche. Il se prépare à la lancer, quand la créature jaillit et lui saute au visage. Avec le choc, les deux animaux tombent au sol. En rigolant, Arhod demande :
- Arrête un peu, Falcon, tu veux ?
- Oh, ça va… Je rigolais !
Le jeune chiot farceur aide son vieux père à se relever. Ce dernier reprend son souffle et lui avoue :
- J’ai bien cru que c’était un chien sauvage. Tu m’as fait peur !
- C’était le but ! Et je suis content d’avoir réussi.
- J’ai plus l’âge pour ces choses-là, ajoute Arhod, un peu plus nostalgique.
Par réflexe, Falcon fonce chercher une autre fourche et se met à arracher des plantes avec lui. Arhod lui tapote affectivement la tête et les deux fermiers se mettent à travailler.

Après plusieurs heures de travail dans les champs, les deux travailleurs rentrent à la cabane, leur lieu de vie. Elle est plutôt petite, pour que deux chiens puissent y vivre, mais ils n’ont pas le choix. Cette cabane possède le strict minimum : deux lits de paille, une chaise en bois, une table de pierre, un poste de radio et un feu. Le reste de leur matériel est dans la grange.
Arhod dépose toutes les plantes récoltées sur la table. Falcon se débrouillera pour préparer à manger avec ça. Il n’y avait que Palita qui savait cuisiner. Mais Falcon avait appris tout seul comment préparer à manger. Depuis le décès de sa mère, le jeune chiot se charge de cuisiner les plantes.
Falcon et son père forment un bon duo, même si parfois leurs opinions divergent. Le sujet qui est le plus délicat entre eux, c’est la Révoltruffe. Le chiot considère l’Amiral Cabos comme un héros et aimerait faire partie de son organisation. Arhod, lui, ne veut pas en entendre parler. Parfois, il coupe le poste de radio quand ce sont des communications de la Révoltruffe. Falcon s’est souvent demandé pourquoi mais n’a jamais osé lui poser la question. Il ne sait pas non plus comment sa mère a disparu, alors qu’il n’avait que cinq jours…

Les deux fermiers viennent de finir de manger. Arhod se lève et explique à son fils qu’il va dans la grange.
Falcon en profite pour se reposer un peu, ce qui est rarement possible. Tout-à-coup, au moment où Arhod sort de la cabane, le poste de radio émet un signal particulier. Falcon reconnait bien ce signal : c’est celui d’une transmission de la Révoltruffe !
En vérifiant que son père est bien sorti, le chiot s’empresse d’allumer le poste et de mettre sur la bonne fréquence. Peu à peu, il entend une voix :
- Alerte. Les karaté-cats descendent les Montagnes de glace.
Ces montagnes, Falcon les connait : ce sont celles qui entourent son village !
- Un bataillon d’environ 120 félins, d’après nos sources.
En panique, le chiot hésite à aller prévenir son père. Finalement, il préfère rester pour écouter les informations jusqu’au bout.
- Les premières fermes ont déjà succombé aux tirs des terribles chanonniers, qui bombardent déjà le village avec des karaté-cats. Beaucoup de chiots sont faits prisonniers.
Cette phrase résonne dans la tête de Falcon. Son inquiétude monte de seconde en seconde. Malgré la panique, il fait l’effort d’écouter les autres informations.
- Les ennemis progressent à une vitesse terrifiante. Nos espions affirment que les fermiers sont tous éliminés au fur et à mesure. Seule une poignée de survivants arrive à fuir. Transmission terminée.
D’un bond, Falcon se précipite vers la grange. Les larmes aux yeux, il cherche son père partout et crie :
- Papa ! Tu m’entends ? Papa !
Soudain, Arhod débarque et le rassure :
- Je suis là, mon fils. Ne panique pas. Que se passe-t-il ?
- Les karaté-cats, ils arrivent ! hurle le chiot, en sanglots. Le poste dit qu’ils ont déjà attaqué certaines fermes !
- C’est une catastrophe…
Arhod regarde dans le vide, d’un air neutre, et souffle :
- J’ai toujours su que ce jour allait arriver.
- On doit se défendre ! ordonne Falcon. Ils vont arriver !
Le chiot se met à chercher ce qui pourrait servir d’arme dans la grange.
En reprenant ses esprits, son père se dirige vers une caisse en métal. Il l’ouvre et sort un pistolet-à-croquettes, une arme redoutable. Intrigué, son fils lui demande :
- Qu’est-ce que c’est ? Je n’en ai jamais vu !
- C’est une arme qui pourrait bien nous servir. Et toi, as-tu trouvé quelque chose d’intéressant, de ton côté ?
- Il y a une fourche et une pelle. Je les prends ?
- Prends la pelle, affirme Arhod en rangeant le pistolet dans sa poche. Donne-moi la fourche, elle est plus lourde.
Le fermier fait signe à son fils de le suivre et les deux chiens foncent dans leur cabane. Arhod s’empresse de détruire la radio, qui ne doit pas être découverte.
- Où est-ce qu’on va ? interroge Falcon.
- Le plus loin possible ! On doit fuir le village.
Falcon prend le temps de regarder la photo de sa mère. En soupirant, Arhod regarde une dernière fois sa vieille cabane. Il retient ses larmes et ordonne :
- Partons dès maintenant !
Falcon le suit en emportant la photo de sa mère.
Les deux chiens, armés d’un pistolet et d’outils, quittent leur ferme sans même regarder derrière eux.

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