4. Pleins de jolies rencontres !

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-Rusard ? .... Rusard ? ..... Eh oh, Rusard ? .... Faites pas genre vous m'entendez pas, vous êtes juste à côté de moi ! .... Ruuuuuuuu-Zaaaaaaaaaard ....

Entendez-vous cela ? C'était l'appel de l'enjouement. Un appel que le-dit Rusard ignorait avec force. Les pieds trainant et la tête enfoncée dans les épaules, il tentait de faire fi de mes interpellations pourtant si agréables. De temps à autre, il marmonnait quelque chose rapport aux chaînes et aux cachots dans l'espoir que je ferme mon caquet, mais je m'en fichais pas mal. Je sautillais joyeusement un peu partout, manquant plus d'une fois d'écraser ce paillasson sur pattes qu'était Miss Teigne.

-Rusard... Ruuuuusaaard... Rusard, de vous à moi, ça fait combien de temps que vous travaillez ici ? Bien 40 ans non ? Ça vous dirait pas de prendre votre retraite ? Vous savez, partir aux Maldives, un cocktail à la main, et ne plus jamais revenir à Poudlard. Hein, ça serait bien nan ?

Rusard souffla bruyamment, puis il enfonça encore plus sa tête dans ses épaules, crispant la mâchoire si fort qu'il en devenait blanc. Il savait très bien que je jouais avec ses nerfs. Tenir. Il devait tenir.

-Oh la, ça a pas l'air d'aller, vous. Vous voulez des antidépresseurs peut-être ? Ça vous ferait du bien vous savez. Après tout, ne dit-on pas que le stress accélère la chute des cheveux ? ... Si j'étais vous je me dépêcherais d'en prendre ! Parce que vous arrivez bientôt au point de non-retour... Rusard ?... Mais vous allez me répondre, à la fin ?!!! .... Rusard Rusard Rusard .... Ruzzzzard .... Za-zaaaaard ..... Eh dites, j'peux vous appeler Zazard ?

-Non.

-Parfait, Zazard ! Alors dites-moi , quand c'est qu'on arrive ?

Le Zazard en question grogna et accéléra le pas. Marre. Oh la la, qu'est-ce qu'il en avait marre ! Comme le disait si poétiquement l'expression, je lui "sortais par les trous de nez" ! Satisfaite, je me mis à lui trottiner autour en riant gaiement. Le visage du concierge commençait à être parcouru de tics nerveux, et il grinçait ses dents, signe qu'il arrivait bientôt à bout. Même pas 10 minutes en ma douce compagnie et il était déjà aux limites de ce qu'il pouvait supporter. Donnez-moi en 10 de plus et c'est le burn out. Dans une semaine on le retrouvera suspendu la tête en bas à la tour d'astronomie, se prenant pour Batman. J'en fais une affaire personnelle !

Ainsi, les minutes qui suivirent passèrent trèèèèès lentement. Nous marchions dans un immense couloir, éclairé ça et là par les rayons de la Lune, et seuls le bruit de nos pas et mes incessantes jérémiades venaient troubler la quiétude qui régnait en ces lieux. Au bout de mon vingt-deuxième "Quand c'est qu'on arrive", Rusard s'arrêta brusquement, les poings serrés, puis il jeta un regard circulaire autour de lui avant de bifurquer soudainement dans un couloir étriqué et plutôt sombre. Ma première pensée fut "Un raccourci ! Boouuh, ça fait peur. Génial !" puis me remémorant la situation, je me dis que "Hmmm... L'endroit parfait pour commettre un meurtre".
Et alors que je me faisais cette terrible réflexion, le concierge se retourna vers moi, ses deux petits yeux luisant dans la pénombre lui donnant des airs de pur déséquilibré. Et sur un ton grinçant qui n'inspirait pas franchement confiance, il dit à mi-voix :

-C'est par là...

Mon sang se glaça. PSYCHOPATHE ! Les yeux écarquillés et agitant ridiculement les bras en l'air, je me carapatai aussi vite que je pus en braillant comme une timbrée :

-NOOOOOOON ! LAISSEZ-MOOOUUUUAAAA ! JE SUIS TROP JEUNE POUR MOURIIIIIIR !

Je courrais dans tous les sens comme un poulet apeuré, m'étalant de temps à autre dans des bruits sourds à cause d'un caillou ou d'une dalle qui ressortait, mais presque aussitôt je me relevais et reprenais ma course folle dans les couloirs déserts de l'école. C'est quelque chose de tout à fait fascinant, ne trouvez-vous pas, de voir comme nous pouvons faire n'importe quoi et devenir complètement stupide dans un moment de panique. Exemple très qualitatif : Alors que je m'engageais dans un nouveau couloir, j'entendis un grognement sarcastique résonner à ma gauche. Sans m'arrêter, je tournai la tête vers la source du bruit et constatai avec horreur que je venais de revenir à mon point de départ : Rusard était encore là. J'accélérai donc le rythme en criant de plus belle, mais ne remarquai que bien trop tard que je fonçais facétieusement sur un mur, mettant définitivement fin à cette course-poursuite des plus inutiles.

Que serait Poudlard sans quelques mystères ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant