[1] Jenny

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Le réveil se met à sonner, me signalant qu'il est temps pour moi d'aller travailler. Je me lève avec peine et frotte mes yeux, encore endoloris par le sommeil. Je me dirige vers la chambre de mon fils pour le réveiller, vu qu'il doit allé à l'école.

- Maxence? Mon chéri, il est temps d'aller à l'école.

Mon petit de six ans se met dos à moi et passe le plaid au multiple motifs de Toy Story au dessus de sa tête en grommelant.

- J'ai pas envie d'aller à l'école!

- Et moi je n'ai pas envie d'aller travailler, mais j'y suis obligée. Et toi aussi tu dois te rendre à l'école, c'est important.

Maxence sors sa petite tête brune du plaid et me regarde avec ses petits yeux ensommeillés.

- Je peux pas juste rater cette journée, comme ça j'y vais demain?

Je me relève et prend un air autoritaire pour me faire obéir.

- Il n'en ai pas question jeune homme. Fini les négociations, maintenant tu files sous la douche!

Ça a l'air de marcher, parce que Maxence se lève et va dans la salle de bain en traînant des pieds.

- Tu as besoin d'aide ou tu peux te débrouiller tout seul?

- C'est bon, je suis assez grand!

- D'accord, je pose tes habits sur le lit. Tu m'appelles si tu as besoin d'aide.

Je vais dans la cuisine pour lui préparer des tartines de Nutella et un verre de jus de pomme, son petit déjeuner préféré. Moi je me contente d'un café bien chaud, le meilleur remède pour commencer la journée du bon pied. Quand Maxence arrive, lavé et habillé, je l'installe devant son petit déjeuner et je vais sous la douche à mon tour. Après une douche rapide, je m'apprête, et mon fils et moi allons directement à son école. En route , il me raconte des histoires sur ses copains. Je l'écoute, attendrie. Il y a des jours où j'aimerais tant retourner dans l'insouciance de l'enfance. Ne plus me préoccuper de rien et passé mes journées à dessiner et à jouer à la poupée. Mais malheureusement, je suis tombée dans le monde des adultes, à mon plus grand regret. Arrivé devant la grille de l'école, j'embrasse mon fils sur le front et comme d'habitude, je lui demande de rester sage. Il entre dans l'établissement et me fait un dernier signe de main avant de disparaître dans la nuée d'enfants. Je suis Maxence des yeux pendant un moment. Même si j'adore mon fils, il représente quand même une des plus grandes erreurs de ma vie. Être maman à dix-sept ans c'est déjà pas la joie, mais si en plus vos propres parents vous détestent et vous laisse tomber, il y a de quoi rapidement tomber en dépression.

Je décide de ne pas y repenser et me dire vers mon lieu de travail, un café assez sympa, bien placé dans le centre-ville. Comme je n'ai pas de diplôme, j'ai due me contenter de ce poste de serveuse. Je ne roule peut-être pas sur l'or, mais les revenus de mon travail sont stables et me permettent de vivre correctement.

Je salue brièvement mes collègues, m'attarde sur une en particulier, Lola. Elle est rapidement devenue mon amie quand je suis arrivée. Elle est toujours gentille et souriante et c'est une épaule réconfortante. C'est vraiment ses caractéristiques qui me plaisent chez elle. On se fait la bise et on se raconte nos soirées respectives. Elle me parle d'un de ses énièmes rencard et je l'écoute en faisant moudre les graine de café.

- Et donc je lui est dit au revoir direct parce qu'on ne vient pas à un premier rendez-vous en bermuda! Tu comprends, non?

- Je te comprends absolument, Lola.

Petit à petit je me perds un peu dans mes pensées. D'aussi loin que je m'en rappelle, le père de Maxence avait dix-neuf ans quand je l'ai rencontré. Ce qui m'a attiré chez lui, c'était surtout son charisme et son charme. Je me souviens encore de ses cheveux bruns sombres qui ondulaient légèrement au bout et ses yeux gris dans lesquels je n'arrêtais pas de me plonger. Je savais qu'il était dangereux. Faire partie d'un gang, c'est quand même pas une situation très rassurante. Mais tout les samedis soirs il était là et je buvais lentement ses paroles, mémorisant chaque syllabe qu'il prononçait. Un amour de jeunesse... Mais un amour de jeunesse qui s'est achevé très vite et assez brutalement.

- Eh Jenny, tu m'entends?

Je sursaute en voyant les doigts de Lola claquer juste devant mon visage.

- Tu tais encore isoler dans ton monde! Dit-elle sur un ton de reproche.

- Je suis désolée.

Lola s'appuie contre le comptoir et me regarde avec un sourire en coin.

- Tu repensais à ton ex, c'est ça?

- Ne me parle pas de lui s'il te plaît. Et puis, on est jamais sortis ensemble, donc je ne peux pas le considérer comme étant mon " ex ".

- C'est quand même le père de ton enfant.

- Oui, malheureusement.

- Tu n'as aucune nouvelle de lui? Tu ne sais absolument rien?

- Rien du tout. Il est juste parti comme ça, du jour au lendemain et je n'ai plus jamais eu de nouvelles. Et pour tout te dire, ça m'arrange. Je ne veux pas que mon fils sache que son père est un criminel!

- Mais il t'a quand même attiré.

- J'étais jeune et têtue. En plus, j'avais un énorme faible pour les bad boys. Mais maintenant c'est fini.

- Mais...

- Lola, y a de nouveaux clients, tu ferais mieux d'aller prendre leurs commandes.

Elle me roule des yeux et s'en va sans insister. Une fois que j'ai retrouvée un semblant de paix, je me ressaisis et décide de tout oublier. Le passé est passé et maintenant je dois vivre le moment présent.

                               **********
À midi, je vais chercher le petit à l'école pour qu'on aille déjeuner.

- Où est-ce qu'on va manger, maman?

- Ça te tente un Macdo?

- D'accord! Comme ça je me prendrais un Happy Meal et j'aurais un jouet!

- Si tu veux mon coeur.

Nous allons au fast-food  et je passe la commande à emporter. Une fois ma commande en main, je vais avec Maxence dans le parc le plus proche pour s'asseoir et manger. Alors que nous avions déjà attaqués nos burgers, Maxence me pose une question:

- Maman, pourquoi j'ai pas de papa?

Sa question me surprend.

- Tout le monde a un papa, Maxence.

- Mais pas moi!

- Mais si tu en as un! Ou sinon tu ne serais pas né.

Maxence regarde ses baskets pendant un moment, pensif.

- Alors il est où mon papa? Dit-il enfin.

- Je ne sais pas.

Malgré moi, ma réponse avait été un peu trop sec.

- Tu ne l'as jamais rencontrée?

- Si.

- Alors il est où?

- Je n'en sais rien Maxence. Maintenant fini de manger, on va rentrer à la maison.

Je voulais éviter ce sujet à tout prix. Maxence avait besoin d'une présence paternelle que je ne pouvais malheureusement pas lui donner. Il peut très bien se porter sans son père. J'ai bien survécu sans lui pendant six ans, non?

CloserOù les histoires vivent. Découvrez maintenant