Un soir d'Halloween, au manoir Agreste, après un énième échec du Papillon.
« Maître, je ne voudrais pas vous contrarier, mais peut-être que nous nous trompons de méthode.
— Je sais Nooroo, répondit Gabriel d'un ton sec. Je n'arrive à rien, je blesse Nathalie, je m'éloigne d'Adrien...et pourtant, je n'arrive pas à m'arrêter. Je suis comme prisonnier du Papillon.
— Vous devriez renoncer à mon pouvoir. D'après les autres kwamis, je suis addictif. Je ne peux que vous blesser, je vous l'ai dit.
— Nooroo. J'aimerais bien renoncer à toi, là maintenant. Mais c'est trop tard. Je suis pris dans le tourbillon de l'addiction. Et je ne me sens pas capable de me battre.
— Je suis désolé, Maître, c'est ma faute.
— Non, Nooroo. Je n'aurais jamais dû m'engager dans cette voie, et tu as essayé de me prévenir. J'aurais dû t'écouter. Et réfléchir aux conséquences.
— Merci Maître. »
Gabriel sourit. Il demanda à son kwami de l'appeler par son prénom. Qu'il corrige au moins ça.
Comme j'aimerais faire disparaître le Papillon. Mais je n'arrive pas à me persuader qu'Émilie soit morte...
Il ferma les yeux, puis se dirigea vers son observatoire De là, il observa la ville, décorée par certains habitants de guirlandes oranges, de mini-sorcières, de citrouilles. Les gens fêtaient Halloween, tous ensemble, les enfants demandaient des bonbons à leurs voisins, la vie courait sous ses yeux. Et il se sentit étrangement seul à cet instant. Jamais il n'avait ressenti aussi fort l'absence d'Emilie.
Une voix l'interpella. Il commença à se tourner vers sa provenance, puis se figea.
C'est impossible.
La voix qu'il avait entendue, c'était celle de sa femme. Or sa femme avait disparu depuis un an et demie. Impossible qu'elle l'appelle encore.
« Gabriel, j'ai quelque chose à te dire. Accepterais-tu de m'écouter ? »
Sans y penser, il hocha la tête. Puis regarda dans la direction de la voix.
Devant lui se tenait Émilie. Ou plutôt, une image d'Émilie. Spectrale, d'une étrange lueur bleutée. Comme on se représente les fantômes.
« Les fantômes, ça n'existe pas. Les morts ne parlent pas. Je suis en pleine hallucination, déclara-t-il à haute voix.
— Ce que tu dis est vrai pour la plupart du temps. Mais ce soir c'est Halloween, la soirée des esprits. Et la pleine lune, nuit de la magie. Je suis vraiment là, Gabriel.
— Que veux-tu me dire, demanda-t-il en tremblant.
— Tu n'es pas obligé d'être le Papillon. Je suis morte, tu le sais bien. Tu as le devoir de vivre au présent. Tu ne peux pas faire mourir l'homme que j'ai connu et aimé. Pas maintenant. Notre fils a besoin de son père, Gabriel. Paris a besoin de sa paix. Le Papillon te blesse toi-même, mais tu t'obstines à l'utiliser.
— J'ai eu l'impression que je ne saurais jamais vivre sans toi. C'est pour ça que j'ai commencé à l'utiliser.
— Ne cherche pas à te justifier, Gabriel. Je sais les raisons qui ont motivé ta décision. Aujourd'hui, tu as constaté que tu t'étais trompé. Et tu as bien assez de forces pour lutter contre l'addiction à ton miraculous.
— Merci Émilie...mais tu vas toujours me manquer...
— Je. Suis. Morte. Et je vais le rester, parce que c'est l'ordre des choses. Je sais que je te manques, mais enfin ouvre les yeux. Tu n'as plus à être amoureux de moi. Tu le sais. Et tu ne m'aimes plus.
— Quoi?! Bien sûr que si je t'aime !
— Pff. N'importe quoi. Je vais te montrer pas plus tard que tout de suite, que tu n'es plus amoureux de moi, mais de quelqu'un d'autre, répondit-elle. Avant d'ajouter en aparté : parfois je me demande qui est le plus aveugle, le père ou le fils. »
Là-dessus, elle se volatilisa. Et réapparût quelques instants plus tard, précédée de Nathalie.
Le regard de cette dernière disait clairement « Je vais te faire passer un mauvais quart d'heure, Émilie, juré. »
« Émilie ! Ce n'était pas la peine de réveiller Nathalie au milieu de la nuit, enfin, s'exclama Gabriel d'un ton de reproche.
— Oh si je t'assure.
— Je crois que ma meilleure amie est une sadique, marmotta Nathalie.
— Pourquoi l'avoir fait venir ?
— En partie pour voir ta réaction immédiate, et j'avoue n'être pas déçue. En partie pour lui faire dire ce qu'elle a à dire.
— Je vais te tuer Émi !
— Trop tard, j'suis déjà morte!! Allez euh! Pour une fois que je peux intervenir ! Me fais pas poireauter encore un an!
— Mais t'es marrante toi. Ça s'improvise pas à minuit et demie ça.
— Si, si, je t'assure.
— Nathalie, je pense que le mieux serait que vous disiez rapidement ce que vous avez à dire, comme ça Émilie nous laissera tranquilles...
— Peut-être, en effet, répondît la secrétaire en entreprenant de compter les carreaux du carrelage.
— Allez !!! J'en ai marre d'attendre, trépigna le fantôme. »
Nathalie lui décocha un dernier regard noir, essuya ses lunettes, puis fixa son patron du regard. Elle inspira un grand coup, puis lâcha sa bombe.
« Je vous aime. »
La réaction de Gabriel fut spectaculaire. Il rougit, blêmit, sembla chercher ses mots, puis finit par bafouiller pitoyablement:
« Quoi? Pourquoi ? Depuis quand ? C'est une blague ? »
Émilie, répondit calmement que non, ce n'était pas une blague. Que depuis les Enfers, elle avait trouvé ça assez distrayant de les voir se tourner autour, mais que ça commençait à faire long.
Et que la réaction qu'avait eu Gabriel était au-delà de toutes ses espérances.
« Vous avez raison, Nathalie, elle est sadique.
— Et elle s'amuse à nous rendre ridicules. J'aurais jamais dû l'écouter.
— Je t'aurais jamais lâchée tant que tu lui disais pas !
— Merci, Émilie, j'ai vraiment l'impression d'avoir une amie, là.
— De rien, répondit le fantôme en tirant la langue. »
Ceci dit, elle jeta un regard entendu à Gabriel, puis sembla exploser en une pluie de paillettes bleues.
Le styliste s'approcha de sa secrétaire, et remarqua qu'Émilie avait toujours eu un certain sens du spectacle.
La secrétaire approuva, avec un sourire amusé. Drôle de soirée que celle-ci, vraiment.
Mais elle fut encore plus surprise quand Gabriel murmura à son oreille :
« Elle a raison je crois. Je ne l'aime plus. C'est vous que j'aime.
— Vraiment ?
— Vraiment. »
Ils se noyèrent chacun dans les yeux de l'autre, souriant avec bonheur. Et ils s'embrassèrent avec un naturel fulgurant.
Dans leurs cœurs, ce fût comme un feu d'artifice, dans leurs têtes ce fut une symphonie. Ils étaient à leur place dans les bras de l'autre.
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1063 Mots.
Petit OS Halloween, pas prévu au départ. Je l'ai écrit assez rapidement, j'ai commencé cet après-midi, et j'ai fini là en cinquante minutes.
De base, je m'étais dit que j'allais écrire l'OS dont je parle dans le défi de Miel (chapitre précédent), puis je me suis dit « Après tout c'est Halloween, faisons directement parler les morts ».
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Pensées Éparpillées
Non-FictionAvant (depuis 2018, nous sommes actuellement en mars 2023), ce livre s'appelait « Je.Suis.Folle!!!!😂 » Je le suis, dans le sens positif du terme, toujours. Mais... D'abord, je n'en ris plus. Ensuite, ce titre rieur et fier ne me correspond plus. Ce...