Chapitre 10 - Belle obsession !

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Quelques mois après leur aventure à Calmée et suite à un énième repas gratuit chez les Cowe, Dashmad Ice contemplait le panorama, debout sur le toit de ses hôtes. Au loin, des pics montagneux exhibaient leur coiffure épaisse, d'un blanc neigeux. Ces cimes rappelaient, ainsi, les couleurs de Ngatnom.

À ce propos, « les terres des neiges éternelles » ou Ngatnom partageaient une limite avec Ordest. Cette frontière se situait, environ, à vingt-cinq kilomètres au sud – direction pointée par l'aimant d'Éo, au voyant vert. Ajouté à cela, ce secteur était constitué des plus grands cratères polaires de la galaxie Oxyr. Néanmoins, l'accès y était interdit, à toute visite touristique et même scientifique ; à l'exception d'avoir une autorisation, par inscription rétinienne, de l'Instéo.

Par contre, quoiqu'informé de ces restrictions, Dédé formula une phrase bien étrange, à la nanoseconde où il entendit Ayk arrivé, derrière lui :

— J'aime beaucoup la vision de Ngatnom, depuis ici !

Aphte, qui escaladait l'échelle, venait à peine de montrer sa tête et poser les mains sur la toiture. Quand il entendit l'exclamation du géologue, le mounia acheva d'abord sa progression, sur l'escalier à barreaux. Ensuite, il afficha un sourire ironique, avant de déclarer à son tour :

— Naali, tu sais ce qu'on dit ? Toute chose interdite semble toujours belle !

— Si tu le dis.

Toutefois, face à une scène, qui lui était pourtant familière, Cowe junior fut saisi d'une indésirable appréhension. Car, deux jours plus tôt, ici même, durant leur coutumière conversation, il s'était aperçu que Dashmad se servait de son acuité visuelle pour observer le paysage. Cette capacité ou « miggimi » était une vue perçante qui permettait à chaque Toraïte, grâce aux cellules coniques microscopiques présentes dans ses yeux, de transmettre à son cerveau une image claire d'un objet très éloigné. Plus explicitement, lorsqu'un animal mesurait au moins un mètre, un natif de Tora pouvait observer ses pirouettes, même si la bête était localisée à cinq kilomètres d'intervalle.

Or, l'Hano (Génie en mécanique) avait découvert l'astuce du naali, en la soirée 421, des périodes stellaires de l'an 7 006. Et depuis, un pressentiment l'assaillait, chaque fois qu'il devait rejoindre son camarade, pour leur rituel du bavardage sur le toit. Et tandis qu'il se rapprochait à petit pas de Dash, qui était concentré à regarder les formes pittoresques de l'enveloppe terrestre, l'intuition d'Aphte se renforçait, voire évoluait. Au fur et à mesure, la vague impression de crainte se transformait en inquiétude. Puis, elle grossissait en anxiété.

Le gamin arriva à hauteur du géant Ice qui lui sourit, en guise de bienvenue. Malencontreusement, à la vision des sclérotiques bleues azurées du joyeux observateur, le sentiment d'Ayk mua instantanément en angoisse.

Chose intéressante sur l'usage du miggimi, il se reconnaissait à la coloration des sclérotiques de son activateur. Pendant l'utilisation, le disque de l'œil du Toraïte délaissait son teint naturel pour un coloris bleu. Quant au contraste, il évoluait avec le zoom visuel, employé par l'utilisateur.

Finalement, Cowe junior fut irrité par cette peur, silencieuse et tenace, qui découlait du récent usage du miggimi par Dashmad, lors de ses contemplations. Sur ces entrefaites, il demanda à son naali :

— Au fait, pourquoi, ces derniers temps, tu as recommencé à prêter autant d'attention à ces montagnes ?

— Parce qu'il va bien falloir que j'aille y jeter un œil.

À ces mots, le sang d'Ayk se mit à bouillir d'un seul coup. Et au cours d'une seconde, Dédé put quasiment apercevoir, sortir des oreilles du mounia, une immense fumée ; les nerfs du courroucé étaient en ébullition.

Les habitants de ToraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant