Hello !
J'ai 25 minutes d'avance, première historique, mais j'espère que vous me pardonnerez.
Bonne lecture !
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Ils allaient venir, Zelyan le savait. Tous les ans ils venaient. Ereyne avait installé cette maudite tradition en l'an 64, alors qu'ils séjournaient tous les deux tranquillement à Rome et que Néron décidait de tout cramer. Depuis, à date fixe, le dernier mois de l'année, ce qui coïncidait avec cette fichue date au sapin et au bonhomme rouge, tous les fils de Zelyan faisaient un effort et se réunissaient au château, que Zelyan les ait invités ou non. Woodcastle devenait le théâtre de la personnification du chaos. Comme tous les ans Zeus ferait le pitre, chacun lui demanderait la raison de la mise en carpette de Ling (le mystère insufflait la crainte, précieuse arme que Zelyan n'était pas prêt rendre), loups et vampires se disputeraient ses faveurs et Ereyne critiquerait le choix du menu. Oui, à l'instar des autres années, des vierges seraient sacrifié(e)s sur l'autel du lit de petits pois – carottes, du PVC (Plasma Sanguin, Vodka, Citron) serait offert à quiconque en ferait la demande, et, si la chance était avec eux, au dessert il y aurait du soufflé d'ange. Pour achever la constance de l'aléa, le Premier Homme lui-même pourrait s'incruster lors du réveillon et tenter de convertir deux ou trois âmes. Mais pour l'heure il n'y avait qu'Ereyne et un immense sapin orné de mille et unes boules de verre coloré.
— Je suis particulièrement fière de cet agencement sur le sapin cet année, annonça Ereyne. Je trouve que nous avons particulièrement bien réussi à pondérer les boules et les guirlandes. Quant au choix des couleurs, j'avais peur de la froideur du bleu mais finalement les nuances marines couplées au blanc plutôt qu'à l'argent nous évitent un effet reine des neiges. Qu'en dis-tu ?
Le diable haussa les épaules. Il n'en avait cure.
— Je m'en remets à ton jugement ma douce.
Ereyne, du haut de son escabeau, croisa les bras.
— Tu t'en moques n'est-ce pas ?
— Totalement.
Zelyan tendit un bras salvateur et l'aida à descendre. Sa mauvaise humeur s'envolant avec un sourire de sa compagne, il se surprit à lancer le pari annuel. Lequel de ses fils serait le premier à franchir la porte ? Ereyne tenta sa chance en misant sur son propre fère, Seth, actuellement en mission en Irlande. Le pays, catholique s'il en était, n'en était pas moins soumis à l'épreuve de la foi. Le Déluge, puis les cataclysmes des vingt-et-unièmes et vingt-huitièmes siècles, avaient laissé le pays, ou ce qu'il en restait, dans un état de délabrement certain. De plus, au nord de la route de la Foi, seuls les fous croyaient encore en Dieu. Seth, le premier fils de Zelyan et troisième fils d'Adam, avait la périlleuse mission d'acheminer les quelques croyants qu'il rencontrait vers Saint Michael's mount, le mont Saint-Michel gallois, bastion angélique le plus proche. Il était donc à proximité de Woodcastle, ce qui en faisait le candidat idéal.
— Izanagi, annonça Zelyan. Son épouse le frustre depuis des mois, il n'aura qu'une envie : la fuir.
Les paris étaient donc lancés. Cette année, chacun misait sur un vampire à croire que les loups, si fidèles, n'étaient plus assez fiables.
Ereyne et Zelyan continuèrent leur débat autour d'un thé. Le vainqueur n'allait pas tarder à faire son apparition, et chaque immortel attendait impatiemment de pouvoir célébrer sa victoire au détriment de l'autre.
Enfin résonnèrent quelques coups frappés sur l'immense double porte d'entrée. Le couple marcha, courut presque jusqu'au hall central où Fitz, le majordome parfait, accueillait l'origine du bruit.
— Bon alors, où elle est la buvette ?
Match nul. Ce n'était ni Seth, ni Izanagi. En lieu et place quatre individus, à la propreté douteuse, s'incrustaient au château. Le sniffeur de buvette, Rocco de son nom, s'inclina devant le couple maléfique, et observa la décoration des lieux.
— Vous avez repeint, c'est bien, commenta-t-il. J'aime bien la manière dont vous avez utilisé le sang du massacre de 1012 pour mettre en exergue les tableaux souillés.
— Le voilà parti à faire son expert en art, maugréa Mamie, le second du groupe, qui n'oublia pas de saluer avec déférence Ereyne et Zelyan, surtout ce-dernier, en mesure de l'assassiner en une fraction de seconde. Veuillez accepter notre présence en ces murs sacrés.
— Sacrés, sacrés, mais est-ce qu'il y a de la bière ? demanda Polochon, une dent cassée et une forte envie de bière.
Zelyan soupira devant cet échec de sa lignée : un vampire plus attiré par l'orge distillé que par le sang, quelle était donc cette sorcellerie ? Ereyne en revanche fut ravie de le voir, enfin un vampire qui ne tuait pas tout humain à sa portée. Elle se fit donc une joie de lui annoncer que la cave était pleine, toutes les cités sanctuaires productrices de ce liquide avaient envoyé le meilleur de leur cuvée annuelle.
Enfin, le dernier de l'équipe s'acquitta de la tâche de politesse et s'inclina devant le couple.
— Bonjour Virgule, dit Zelyan.
Le silence se fit. Tout le monde était suspendu aux lèvres de l'immortel. Le grand, l'unique, le père de tous, avait salué en retour l'un de ses descendants.
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— Vas-tu donc achever ta phrase ? s'emporta Ereyne.
— J'ai oublié, répondit Zelyan, penaud.
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Merci d'avoir lu ce chapitre !
A demain !
Axel.