Chapitre 10 : Enjeux (2/2)

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Ragaillardie par la conversation, l'esprit entièrement occupé par l'idée de retrouver sa meilleure amie et par le travail qui les attendait, elle se dirigea vers la sortie de l'abbaye sans regarder autour d'elle. Aussi manqua-t-elle de heurter Pierre qui arrivait en courant dans son angle mort. Ce dernier glissa dans les graviers de la cour intérieure de l'église et s'arrêta de justesse. Il contourna rapidement son amie et reprit sa course en lançant par-dessus son épaule :

― Désolé, Magdelaine ! Ma femme...

La sorcière de l'eau comprit immédiatement à l'air à la fois paniqué et heureux de son ami que son épouse était sur le point de donner naissance à leur enfant. Cette nouvelle balaya ce qu'il restait d'amertume et de colère dans ses pensées et elle arbora un grand sourire. Lui adressant un signe de la main, elle lui cria :

― Ne sois pas en retard ou elle va te tuer !

Le jeune homme leva la main pour accuser réception d'un avertissement qu'il avait déjà dû recevoir par le biais d'un familier et disparut côté rue.

Pierre s'était marié très jeune pour un sorcier. L'espérance de vie dans leur communauté atteignait facilement les cent cinquante ans et ils échangeaient généralement leurs vœux entre leurs trente et quarante ans. Seulement, cinq ans auparavant, le sorcier des plantes était tombé éperdument amoureux d'une jeune femme et ils n'avaient pas attendu longtemps avant de sceller leur union.

La naissance d'un enfant dans la communauté des sorcières était toujours un grand événement. Les périodes de fertilité des femmes étaient beaucoup moins fréquentes que chez les humaines, ce qui limitait fortement le nombre d'enfants qu'un couple pouvait espérer avoir. Dans le cas de Pierre, leur premier n'arrivait que quatre ans après leur mariage.

Tout sourire, elle reprit sa route vers la rue Tristin. Elle sentait la motivation lui revenir, après plusieurs semaines d'absence. Si elle luttait aujourd'hui, c'était aussi pour l'avenir de ce bébé. Pour qu'il ne soit jamais confronté à la même situation. Pour que tous les enfants de sa génération à travers le monde fussent libérés de ce fléau.

Magdelaine et Lison passèrent une bonne heure dans les allées sombres de la Bibliothèque, rassemblant autant d'ouvrages traitant d'alchimie qu'elles le pouvaient, dans l'espoir de trouver la perle rare qui pourrait éclairer cette affaire de sang volé.

Elles s'installèrent ensuite sur une table avec leurs trouvailles, confiant à leurs familiers le soin de poursuivre les recherches.

Deux tables plus loin, Jeanne, en compagnie de trois sorciers, feuilletait plusieurs piles de textes manuscrits jaunis sans trop y croire. Après plusieurs mois passés à étudier d'innombrables livres sans succès, il leur paraissait à présent improbable de trouver quoi que ce soit à la Bibliothèque.

En soupirant, Magdelaine se détourna de la tablée respirant le désespoir et saisit un premier ouvrage qu'elle ouvrit à la page du sommaire, soulagée qu'il y en ait un. Elle lut quelques lignes avant de s'arrêter, se rendant compte que ses yeux passaient sur les mots sans les comprendre.

― Pourquoi ne trouve-t-on rien ici ? finit-elle par se demander.

Lison leva la tête de son livre et Magdelaine s'aperçut qu'elle avait parlé tout haut.

― Que veux-tu dire ? s'enquit-elle.

La jeune femme désigna la table où leurs pairs travaillaient.

― Nous nous trouvons dans la Bibliothèque, les Archives de l'Assemblée, et après plus de deux mois de recherches, nous n'avons trouvé absolument aucune information concrète et utile sur la Sorcière au Corbeau. Rien !

La Malédiction de la Sorcière au Corbeau (50%)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant