Chapitre 39

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Je hoche la tête, peinée par toute cette discussion.

« - D'accord... Je prends bonne note de tout ça, mais j'ai besoin d'un peu de temps. Je vais retourner dans... J'hésite un peu. Dans ma cabine. Est-ce que tu pourras le dire à tout le monde ? Pour ma mémoire, je veux dire... Je ne suis ni prête à aller tous leur en parler un à un, ni d'humeur à faire semblant...

- Oui bien sûr, je comprends totalement. Ne t'en fais pas, je m'en occuperai.

Je sors de la cabine et fais le chemin inverse pour retourner dans la mienne mais Ace rajoute quelque chose :

- Hum Alya ? Je me retourne. Quoi qu'il se soit passé... J'ai toujours été vrai dans ce que je ressentais et... Rien n'a jamais changé. »

J'ignore si le mien indique la même chose, mais le regard d'Ace est empli de remords et surtout de tristesse. Je le fixe longuement, ne sachant pas quoi répondre, je passe la porte et la referme derrière moi sans une parole de plus.

À présent nous sommes au beau milieu de la nuit, et bien que mille pensées fourmillent en moi, je dois reconnaître que la fatigue me gagne. Je décide de me coucher dans ces draps qui sont les miens, non sans éprouver une étrange sensation. Toujours celle d'être à ma place sans vraiment y être mais contrairement à ce que je m'imaginais, je m'endors avant même d'en avoir conscience. Mes rêves sont alimentés par mes anciens souvenirs auxquels j'ai de nouveau accès, comme si je n'avais pas cessé de me les passer en boucle depuis que c'est le cas.

Je me réveille vidée de toute émotion, je n'éprouve ni joie, ni colère ou tristesse. J'ai retrouvé la mémoire, je suis de retour à la place que j'occupe depuis maintenant deux ans. Ce n'est pas comme je l'imaginais ? Ainsi soit-il, c'est ce que je suis, c'est ce que j'ai vécu. Rien ne sert de le renier, de le crier à qui que ce soit, de toute façon, rien ne changera.

Je reste un moment dans mon lit à fixer le plafond, sans parvenir à avoir une pensée claire, vide. Finalement je décide de me lever et vais à la salle de bain. Alors que je me lave les cheveux, je passe une main dans ma nuque, celle-ci s'arrête. Là, il y a mon tatouage. La preuve que j'appartiens à l'équipage de Barbe Blanche.

Encore une clé de mon passé, si proche. Je soupire. Comment aurais-je pu le savoir de toute façon ? Je termine de me laver et alors que je sors de la pièce, dans un excellent timing, j'entends qu'on toque à la porte, je réponds oui dans un calme olympien.

« - Alya ? C'est moi. Je reconnais Ace. Père aimerait te parler dans sa cabine, quand tu le souhaiteras.

- J'arrive.

Je l'entends hésiter derrière la porte.

- Lui et les commandants sont au courant. Ce n'est qu'une question de temps avant que ça ne fasse le tour du navire, je voulais te prévenir.

- Merci. »

Il s'éloigne tandis que je prends mon courage à deux mains. Tous ces discours sont bien beaux mais il faut à présent que je ressorte et affronte les regards des autres. Plus facile à dire qu'à faire. Après une ultime hésitation, je sors de la chambre et arpente le couloir pour aller jusqu'à la cabine de Barbe Blanche, père.

Pour la première fois depuis que la mémoire m'est revenue, je traverse le navire en étant calme. Désormais je regarde tout autour de moi, avec un œil nouveau. Redécouvrant tout, non pas pour la deuxième mais la troisième fois. Cette étrange sensation est toujours en moi. J'arrive devant la cabine de Barbe Blanche sans avoir croisé personne. Je toque.

« - Entre !

Je fais ce qu'il me dit et me retrouve devant le capitaine du navire, mon capitaine. Il esquisse un sourire que je ne lui connaissais pas encore, un de ceux qui semblent nostalgiques.

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