Saroumane était rentré. Il était de plutôt bonne humeur. Sa virée au Mordor avait été fructueuse. Elle lui avait permis de retrouver tout un tas d'artefacts anciens, longtemps perdus dans une forteresse abandonnée des sorciers de Sauron. Saroumane se rendit dans son laboratoire et posa son lourd sac sur la grande table en bois. Il en sortit les différents objets qu'il aligna soigneusement côte à côte. Des livres, des parchemins, des fioles, ainsi qu'un magnifique poignard à la lame de jais et à la garde finement sculptée. Le vieux Maia sourit en sortant délicatement sa plus grande trouvaille. Un bocal transparent, rempli à ras bord d'une substance blanche comme la neige. Le sage était aux anges. La vieille forteresse de Gurthang lui avait également livré le secret de la création des Uruk originels. Il était grand temps que son projet prenne de l'ampleur. Un sourire aux lèvres, il partit en direction du sous-sol.
Dans les jours qui suivirent, Alexandre évita de croiser le magicien autant que possible, restant dans sa chambre toute la journée, et n'en sortant que pour aller chercher de la nourriture dans le garde manger, nourriture qu'il remontait manger dans sa chambre.
Le vieux magicien ne s'inquiéta pas de ce changement outre mesure.
Au contraire, il en était plutôt content, son plan de création de sa propre armée étant désormais en marche dans les profondeurs de la tour. Son unique tracas était à propos de la poudre à canon. Il parvenait à obtenir l'effet désiré, mais pas dans des proportions suffisamment grandes.
Après un ultime échec, il décida d'aller réclamer au garçon le reste de la liste, estimant que ce dernier avait bien eu le temps d'y réfléchir. Il avait passé les deux derniers mois à chercher le moyen de voyager entre les mondes, sans succès. S'il avait fait ces recherches, ce n'était évidemment pas dans le but de se débarrasser du garçon, au fort potentiel d'utilité, mais pour s'y rendre et en rapporter des armes qui lui avaient semblé appréciablement dévastatrices, d'après les dires du jeune homme. Il sourit en imaginant la facilité avec laquelle ces armes lui permettraient de soumettre toute la Terre du Milieu, et Sauron lui-même. Décidément, il avait bien fait de s'intéresser à ce garçon naïf. Certain de son plan et fier d'avoir réussi à manipuler tout le monde jusqu'aux souverains elfes, il quitta son laboratoire à la recherche du jeune humain.
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On toqua à la porte. Alexandre sursauta. Non, pas lui, pas maintenant. Ne pas paniquer, surtout ne pas paniquer. Soit naturel. Il attrapa un livre, l'ouvrit au hasard et fit mine d'être entrain de lire sur son lit. Il inspira un grand coup.
"Entrez !"
Saroumane ouvrit la porte. Alexandre releva la tête, faisant semblant d'être dérangé en pleine lecture. Saroumane tiqua. Le livre était à l'envers. Il passa outre et rentra dans la pièce.
"Avez-vous fini de travailler sur la liste ? Le temps presse, et l'ombre de Sauron s'étend..."
Juste que dans ta tour... Hypocrite. Ça te réjouis qu'elle s'étende. Tu mérites presque une nomination aux oscars. Il ne laissa rien paraître. Alexandre referma le livre et le posa à côté de lui, puis il pris un air ennuyé. Ah, c'est moi qui mérite un oscar.
"Je l'ai presque fini. Laissez-moi encore jusqu'à ce soir. Je vous l'apporterai dans votre bureau."
Saroumane hocha la tête et repartit sans dire un mot.
Alexandre respira de nouveau. Il venait de réussir à s'accorder plus de temps pour prendre une décision, sans pour autant paraître suspect. Il se leva et se remit à tourner en rond. Il n'avait pas pu dormir depuis sa découverte du sous-sol, la panique et l'angoisse le tenant éveillé.
Une fausse liste. Je vais lui donner une fausse liste. Il avait déjà prévenu le magicien qu'il n'était pas capable d'expliquer précisément tous les éléments de cette liste. Ça ne paraîtra pas vraiment suspect. Cela pourrait même être crédible. Il saisit une plume et de l'encre.
Le jeune homme passa donc le reste de la matinée à rédiger de nouvelles idées, vagues et inutiles, ou encore impossibles à réaliser, les barrant et les annotant pour la vraisemblance. Plutôt content de lui, il la posa sur la table de chevet, et tâcha de se reposer avant d'aller la donner au magicien.
Sa montre le réveilla quelques heures plus tard. La nuit était en train de tomber. Il se leva et s'étira en regardant par la fenêtre le ciel coloré où scintillaient déjà quelques astres. Il relut son papier une dernière fois, tâchant de ne pas réfléchir à ce qu'il se passerait si le magicien découvrait qu'il savait la vérité.
Comme un animal se rendant volontairement à abattoir, il monta les étages jusqu'au bureau du sage. Il était vide. Continuant de monter, il se retrouva dans le couloir menant au laboratoire du magicien. Il s'arrêta. Du bruit sortait de la pièce. Le magicien semblait être en train de parler à quelqu'un dans une autre langue. Le jeune homme hésita à faire demi-tour, mais, avisant la porte restée ouverte, il se rapprocha sans un bruit et jeta un coup d'œil à l'intérieur de la pièce.
Le magicien se tenait debout au milieu de celle-ci. Alexandre ne pouvait apercevoir son interlocuteur. Saroumane regardait une pierre sombre et sphérique posée devant lui sur un piédestal. Le jeune homme compris qu'il n'y avait personne d'autre dans la pièce. Il parle à la pierre. Ou à travers la pierre... Le centre de celle-ci rougeoya, attirant le regard du jeune homme. Il la fixa, et il lui sembla qu'elle le fixait aussi. Soudain, des images apparurent dans sa tête.
Des montagnes de cadavres devant une gigantesque porte noire. Des elfes, des hommes, des nains. Des guerriers, des paysans. Des enfants. Tous le dévisageaient de leurs yeux vides. Toute cette souffrance... Un enfant tendit vers lui sa main livide, ses yeux le regardant sans pour autant le voir...
Alexandre eut envie de vomir.
Une grande tour noire, couverte de cendres. Et le grand œil. Brûlant. Le fixant. Sa pupille étroite. Cet œil immense. La silhouette d'une armure qui s'avance. Masse à la main. Son casque à pointe. Elle t'appelle à lui... Elle murmure, Elle murmure à l'oreille du magicien... Vous n'êtes pas seul...
Alexandre tomba en arrière contre le mur, en sueur, le regard égaré, sa main tremblante serrant toujours cette maudite liste. Il essaya de reprendre sa respiration. Cligna des yeux. Soudain, une main l'agrippa par le col et le plaqua contre le mur, la tête en arrière. Il reconnut à peine le visage de Saroumane, déformé par la colère, tenant son bâton magique contre son cou. Alexandre s'immobilisa, conscient qu'un geste trop brusque pourrait lui être dangereux. Voir fatal.
" Qu'avez vous vu ?" Siffla le magicien.
" Rien" tenta le jeune homme d'une voix trop peu assurée " je viens juste d'arriver".
Il tenta de se reprendre et agita sa liste.
" je venais vous la donner comme je vous l'avais promis." Crédible, soit crédible...
Saroumane le plaqua encore plus fort. Alexandre suffoqua.
"N'essayez pas de jouer au plus malin avec moi. Je sais que vous mentez. Que savez-vous?"
Il commençait vraiment à manquer d'air. La tête lui tournait. Il faisait chaud.
"QUE SAVEZ-VOUS ?" Hurla le magicien, hors de lui.
Les yeux du garçon brillèrent et il sourit, d'un dernier air de défi :
"Tout" murmura t-il du bout des lèvres.
Puis tout devint noir.
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Un ciel étoilé
FanficIl ne savait pas ce qu'il s'était passé. Il devait être mort. Il aurait dû l'être en tout cas. Pourquoi ? Il ne savait pas. Est ce que quelqu'un le savais au moins? Les elfes ? Le magicien ? Dans quelle merde je me suis encore fourré moi...