24 - Tout allait pourtant si bien...

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Le Professeur, quelques minutes auparavant...

Je n'arrivais pas à dormir mais je ne bougeais pas de peur de réveiller Raquel. Sa tête posée sur mon épaule me donnait une sensation que j'avais déjà connue lors de notre première fois : la paix. Je m'efforçais de ne plus penser au passé et de profiter un peu de l'instant comme Andrés me l'avait si souvent répété. Pour cela, je ne devais pas sombrer dans les bras de Morphée mais simplement rester conscient et observer, grâce au clair de lune, l'inspectrice que mon âme, que mon corps, que mon cœur désiraient plus que tout. 

Le peu de lumière qui nous entourait, lui conférait un côté irréel, insaisissable. A vrai dire, je ne comprendrai jamais ce qu'il faut dire ou faire... « Je suis un incapable » me dis-je subitement... Cependant, je souhaitais rendre sa vie la meilleure possible. Si malheureusement, un jour, elle décidait de partir, je la laisserais... Je ne voulais que son bonheur et elle choisirait si j'en ferais partie ou non. Je la contemplai quand, je sentis le bateau tanguer subtilement à plusieurs reprises. Le vent n'avait pas repris pourtant... J'essayais de distinguer quelque chose au loin. « Une tâche noire, on dirait ». Je plissai les yeux et compris rapidement qu'elle se déplaçait dans notre direction. C'est alors que j'entendis un bruit sourd, à peine audible. « Un bateau ! » Instinctivement je me levai, en déposant la tête de Raquel sur le banc délicatement. Je me dirigeai à la proue et observai de chaque côté. Une autre tâche à l'opposé avait la même destination que la première : nous. Mon souffle se coupa et je fis demi-tour. Je me rendis compte qu'une veilleuse était allumée dans la cabine. Une fois éteinte, je savais pertinemment que c'était trop tard. Nous étions repérés. Or, cette approche silencieuse et quasiment imperceptible n'augurait rien de bon...Je déglutis et cherchai une solution en revenant sur le pont. Je commençai à énumérer nos possibilités en désespoir de cause... « Nous ne pouvons pas démarrer en urgence car nous sommes en panne. Nous ne pouvons pas feindre l'abandon du bateau, ils m'ont vu, ainsi que la lumière. La seule solution est de connaitre leurs intentions et de négocier. Sauf si ce sont des policiers... Mais je ne vois pas comment ils auraient pu nous retrouver... Et puis, quoiqu'il arrive, je n'ai pas d'armes à bord donc si ce sont au pire des braconniers ou pirates, on est mal... » Mon cerveau chauffait et je pestai intérieurement à chaque obstacle théorique... Que pouvions-nous faire ? Et que s'était-il passé ? Quelle erreur avais-je commise ? « Le téléphone... » Mais cela s'avérait improbable et impensable car il était sécurisé. J'en étais sûr et certain mais je...

Mes pensées furent coupées à la seconde où deux énormes spots m'éblouirent. Je mis ma main en visière pour protéger mes yeux. Au même moment, une sirène assourdissante se mit en marche et m'éclata les tympans mais je restai de marbre. En tout cas, physiquement car intérieurement, je paniquais. Aucun plan ne pouvait m'aider, nous aider. Je tournai légèrement la tête vers Paula qui ouvrit les yeux. Son visage d'abord traversé par l'incompréhension se déforma pour rendre compte de sa terreur. A peine sur ses pieds, elle courut se réfugier dans les bras de Raquel. Je la suivis du regard et rencontrai celui de sa mère. Elle avait compris elle aussi. Alors me vint l'idée de me dénoncer pour l'enlèvement de l'inspectrice et de sa fille.

Je devais capituler et n'offrir aucune résistance. Pour elles. Je leur devais au moins cela. La seule pensée de savoir Raquel en prison ou séparée de sa fille me révulsait. « Inconcevable ». Ainsi, je me mis à genoux tout en lui présentant mes excuses à travers mes prunelles. Puis, je fixai l'horizon sentant que les ombres s'emparèrent de moi une nouvelle fois. Le Professeur reprit le contrôle de mon corps.

« Sergio Marquina, Raquel Murillo, vous êtes en état d'arrestation pour organisation et complicité dans le braquage de la Fabrique Nationale de la Monnaie et du Timbre.... »

Il déblatéra son charabia et je déviai de quelques millimètres ma tête en direction de Raquel. Je la découvris à genoux aussi. Je lui indiquai dans un roulement d'yeux les cordes à sa droite puis entrecroisai mes poignets au-dessus de ma tête le plus discrètement possible. Elle suivit mon regard et se figea devant mon mouvement. Elle nia immédiatement. J'insistai mais elle me fusilla du regard. Je voulais sauver les meubles mais comme il fallait s'y attendre, elle était têtue et courageuse. Je n'en doutais pas après tout. La personne la plus forte que j'avais rencontrée depuis bien longtemps...

La casa de papel // Et si... (Serquel)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant