18 - Nous sommes responsables de nos choix mais sont-ils les meilleurs ?

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Professeur, trois mois après la fin du braquage...

Comme chaque jour depuis notre arrivée à Palawan, je marchai avec détermination en direction d'un bar aéré, près de la plage. L'espoir et la crainte m'accompagnant, mes jambes tremblaient le plus souvent. Une fois n'était pas coutume, Andrés se joignait à moi. Il s'affaiblissait de jour en jour mais les injections estompaient les symptômes la plupart du temps.

Le voir à mes côtés me gênait. Certes, mon frère souhaitait savoir où je passai mes journées entières depuis plus de deux mois mais cela me rendait nerveux. Le connaissant, il me lancerait des remarques déplacées et sarcastiques si je lui avouais la raison de ma présence ici. Alors je me tus, tout simplement. Arrivés, nous nous installâmes sur des tabourets. Le patron du bar me salua en anglais, en souriant. Son expression passa à l'interrogation quand il vit que je n'étais pas seul. Évidemment, Andrés se précipita pour se présenter avec emphase, ou du moins par sa fausse identité. Je levai les yeux au ciel, exaspéré. Nous parlâmes peu et de broutilles durant deux heures. Puis, certainement ennuyé, il aborda un sujet plus délicat.

- Bon, on ne va pas rester là toute la journée, si ? Ironisa-t-il.

- Si. Affirmai-je devant l'incompréhension de mon frère.

- Comment ça ? Ne me dis pas que tu passes littéralement tes journées à boire, assis à cette même chaise ?!

- Je ne bois pas, j'attends. Le corrigeai-je.

- Hermanito, je vais t'apprendre quelque chose. Dans la vie, il faut profiter des bonnes choses. Tu es riche, tu as réussi ta vengeance. Papa est certainement fier de toi.

« Je ne crois pas, justement... »

- Mais d'ailleurs, qu'est-ce que tu attends ? Demanda-t-il, curieux. Ta petite fliquette ?

Mes yeux fixèrent l'horizon, le visage grave. Devant mon silence, son sourire s'effaça. Il reprit une nouvelle fois.

- Non ?! Ne me dis pas que cette inspectrice va débarquer d'une minute à l'autre ?

- Je ne sais pas, j'attends mon destin. Assenai-je d'un ton ferme, signifiant que je ne voulais pas continuer de parler de cela avec lui.

- D'accord. Eh bien attends ton destin merveilleux, fit-il avec sarcasme, je vais profiter des derniers instants de ma vie.

Je voulus l'en empêcher mais les mots restèrent bloqués dans ma gorge pendant qu'il s'éloignait à grands pas. Je l'avais blessé. Je l'observai du coin de l'œil jusqu'à ce qu'il disparaisse derrière un kiosque. Une impression étrange se dispersa dans mon corps, comme si jamais je ne le reverrais. Un frisson me parcourut l'échine. Je tournai ma tête dans la direction opposée. Les passants parlaient rapidement entre eux, en chuchotant. Les phrases étaient vite déblatérées et les regards inquiets. La foule semblait préoccupée et observait les alentours suspicieusement. Je passai les dix prochaines minutes à dévisager ces gens qui paniquaient ou riaient de plus en plus. Les expressions changeaient du tout au tout. Vingt minutes plus tard, la place se vidait de plus en plus alors qu'habituellement, les touristes affluaient davantage à cette heure-ci. « Étrange ». Cinq minutes plus tard, l'endroit semblait désert, de toute part. Certaines personnes restèrent mais elles étaient plus loin. Un mauvais pressentiment me traversa. « Avait-elle fait son choix ? » Pensai-je.

La réponse ne tarda pas. Des dizaines de policiers, après avoir sécurisé la zone, débarquèrent équipements et armes au poing, en avançant dans ma direction. Pourtant, je ne bougeai pas d'un millimètre mon corps. Seule ma tête sondait les alentours. Mes yeux ne se préoccupèrent pas de ces hommes et femmes en uniforme mais cherchèrent désespérément la commanditaire de cet assaut. Ainsi, je l'aperçus dans son tailleur gris, surmonté d'un gilet pare-balle. Ses cheveux entortillés dans un crayon, elle me fixait de ses iris couleur café. De la colère et de la jubilation les remplissaient. Alors, je lui rendis son regard. Le mien, en revanche, parlait d'amour et de soulagement. De toute façon, je ne méritais pas d'être heureux. Je l'avais compris depuis longtemps.

La casa de papel // Et si... (Serquel)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant