Je ne sais pas ce qui m'a pris.
Moi, l'écrivain à succès, diplômé de la faculté de lettres de Bordeaux, sorti premier de sa promotion, moi, l'homme réfléchi, qui a toujours décrié cette société où tout se passe virtuellement, j'en suis là. Je suis comme un con, assis à la terrasse d'un palace dont je n'ai que faire à enchainer les expressos. Je suis en train de poireauter, moi qui déteste ça.
J'attends une parfaite inconnue qui m'a chauffé sur le net. J'ai quel âge sérieux pour me conduire ainsi ?
Je me redresse et guette l'application Dating sur mon iPhone au cas où elle chercherait à me contacter. J'aurais pu lui donner mon numéro de téléphone, tout simplement, mais une frousse enfantine m'en a empêché. Je ne sais pas si c'est parce que je me suis souvenu des mises en garde de maman qui nous a souvent raconté qu'avant de tomber sur Alf, elle a eu maille à se défaire de lourdingues et de pervers qui ignoraient la signification du mot « non » et qui avaient parfois tendance à lui envoyer le cliché de leurs bijoux de famille. Je ne parle pas de ceux qu'on hérite d'une vieille tante, cela va de soi.
Je me giflerai parfois de me montrer si froussard.
Un parfum fort et capiteux me fait tourner la tête en direction du serveur et je comprends tout de suite pourquoi.
Et bien...
Ça valait le coup d'attendre un moment.
Elle ne m'a pas encore aperçu mais Clara est bien là. J'avais peur que sa photo soit un fake surtout après que Ted m'a charrié là-dessus. Je dois dire que de découvrir Clara en vrai va au-delà de mes espérances. Grande, brune, ses longues jambes semblent interminables sous l'effet de cette minijupe ou mini robe blanche. Si je m'arrêtais à cette description, on pourrait croire qu'elle est aguicheuse mais non. Ou si. Ou non. Elle porte un manteau trois quart en vernis gris qui va à ravir ainsi que des escarpins marrons aux talons si fins et si hauts que je me dis que c'est un art de marcher ainsi chaussée.
Ses longs cheveux noirs masquent une partie de son visage mais brillent au soleil. On dirait que tout l'univers tourne autour d'elle alors que je l'observe minauder avec le serveur qui semble apprécier la vue. D'ailleurs, l'ensemble des hommes présents paraissent dans le même état, poussant certaines femmes à jeter à Clara des regards lourds de haine et d'envie.
Je me décide à aller à sa rencontre, très pressé de savoir si son visage est aussi beau que ce que j'ai pu apercevoir d'elle.
— Coucou, ma belle !
Une boule d'appréhension fait chevroter ma voix. Clara fait volte-face et enfin je découvre son visage en vrai. Elle m'accorde un immense sourire auquel je lui réponds par la même hilarité nerveuse. Parce que oui, je l'admets, je suis nerveux.
— Coucou beau gosse ! m'accueille-t-elle d'une bise franche. Je suis désolée. Je suis en retard mais je voulais me faire belle après le taf !
Je lui indique d'un geste de la main ma table et la laisse s'y assoir avant d'en faire de même. Il fait beau aujourd'hui et j'en suis particulièrement heureux. Clara retire sa veste et suspend son sac à l'accoudoir de la chaise avant de croiser les jambes. Elle a eu la bonne idée de revêtir un décolleté à réveiller un mort. Une chainette en forme de cœur sertie de strass s'amuse à venir se planquer dans le pli de ses seins. J'ai un mal fou à ne pas regarder. J'agis vraiment comme les gros lourds queutards que je décris dans mes bouquins. Jamais je n'aurais pensé que je puisse réduire une femme à un corps et à sa beauté. Je me giflerais pour cela si je le pouvais.
— Tu commandes quelque chose ? Nous dinerons ensuite, si tu le veux bien, lui proposé-je en lui souriant.
— D'accord, y'a pas de blem' ! Je vais prendre un coca light, du coup !
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J'ai juste cliqué
Chick-LitTout cela n'était qu'une expérience. Les choses ne devaient pas tourner ainsi. Je suis un chirurgien de l'amour. Je sais comment les choses arrivent, ce qu'il faut faire pour y arriver, à quel moment il faut s'inquiéter et surtout quand ça va trop l...