Chapitre 8 Le coeur bleu ADAM

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— Je savais que tu allais accepter ! Tu vas cartonner, Adam ! Les premiers chapitres sont bons mais...
Honnêtement, j'avais du mal à croire que Sandrine me suive les yeux fermés sur mon nouveau roman. Même si son titre est très évocateur, je me doutais bien que All my love date puisse lui plaire sans que mon éditrice n'y ajoute un « mais » caractéristique de son exigence.
J'écoute patiemment ce qu'elle va objecter au bout du fil.
— Les chapitres que j'ai lus relatent uniquement les premiers instants d'un homme paumé qui surfe sur un site de rencontre ainsi que les pires rencarts qu'il a eus. Au passage : sensas l'idée du postiche de la nana !
Je ricane en remerciant intérieurement Clara pour ses artifices qui m'ont donné une bonne dose d'inspiration.
— Seulement, poursuit Sandrine sur un ton plus sérieux, tu sais bien que ce que les lecteurs veulent, c'est la grande histoire d'amour et pas seulement un collectif de rendez-vous amoureux plus catastrophiques les uns que les autres. Il faut que tu crées la magie avec autre chose que le récit d'amourettes sans lendemain.
Je pianote l'assise de mon canapé en acquiesçant. Je pensais recevoir de la part de Sandrine des conseils et des encouragements mais pas une remise en question totale de mes dix premiers chapitres.
— C'est un bon début de roman mais dis-toi que tu arrives à un point de ton intrigue où le lecteur attend que l'on passe désormais aux choses sérieuses. Il faut donc LA rencontre. Tu comprends ce que je veux dire ?
— Oui mais tu sais comment je travaille, Sandrine. J'ai déjà donné beaucoup de ma personne mais je n'ai trouvé aucune femme sur Dating qui parvienne à me faire trembler le cœur...
— Ecoute Adam, je te conseille de laisser tomber tes principes de travail habituels. Tu n'as pas besoin de devenir un cobaye pour écrire une très bonne histoire et n'oublie pas que c'est un partenariat. Si tu t'inscris sur Dating, c'est pour trouver l'amour, pas pour tester l'amour et t'en servir de base pour une histoire fictive.
Je ne trouve rien à répliquer. Je sais que quoi que je dise, Sandrine ne comprendra pas. Elle n'a jamais saisi mon obsession du réalisme. C'est pourquoi je la laisse m'abrutir de recommandations. En réalité, je n'écoute que ma voix intérieure qui me chuchote la solution au coup de foudre.
— Tu sais de toute façon que ton histoire peut mal finir ! Tu n'es pas obligé de finir par un happy-end ! conclue Sandrine après un moment. Je dois même dire que cela changera des histoires d'amour que l'on trouve dans la romance actuelle. Donne-toi toutes les possibilités. Cela permettra à ta plume de se libérer d'un quelconque schéma préétabli.
Je réponds d'une voix faussement gaillarde que je lui fournirai mes cinq prochains chapitres d'ici la fin de la semaine prochaine. Je finis par raccrocher en relâchant un soupir qui dure bien dix secondes. Je dois vraiment me dégoter celle qui me donnera envie de réellement m'impliquer dans ce que je vis et dans ce que j'écris. Et je dois faire ça vite.
Je me saisis de mon ordinateur alors que mon portable se met à vibrer.
**Ted : Alors vieux ? T'es toujours partant pour un barbeuc chez moi demain soir ? Je sais que tu bosses sur ton bouquin mais il faut bien fêter mes vacances !**
Mon meilleur ami ne prend que rarement ses congés si ce n'est que pour quinze jours début juillet. Il a pour coutume de fêter ça chez lui dans l'immense demeure qu'il habite à St Médard en Jalles. C'est toujours l'occasion pour lui de nous réunir ma famille et moi. On se connait depuis si longtemps que ma mère, mon beau-père et ma sœur sont des habitués de cette réception.
**Adam : Oui, t'inquiète. Par contre ce soir, je vais sécher le jogging si tu veux bien. Je dois partir à la recherche de la perle rare sur Dating**
**Ted : Ton éditrice n'a pas aimé le récit de ton dernier rencart ?**
**Adam : En fait, j'ai démultiplié le rendez-vous avec Clara et j'en ai créé quatre. J'avoue m'être bien bidonné en les écrivant**
**Ted : Si tu veux que je te raconte des histoires de diners craignos, demande-moi ! Il y a une semaine, ou deux, j'ai croisé la route d'un couple atypique !**
Ce n'est pas la première fois que Ted me narre les anecdotes dont il est le spectateur dans son restaurant. Si je ne parviens pas toujours à les intégrer à une intrigue construite, je finis toujours par pisser de rire en les écoutant.
**Adam : Vas-y, dis toujours**
**Ted : Le mec s'est retiré pour aller aux chiottes alors que sa nana était tout sourire pour lui et ça toute la soirée. Je ne sais pas ce qui s'est passé mais d'un coup, la fille a pété un plomb et s'est levée pour s'en aller sans même prendre son dessert ! Truc de dingue ! Elle a laissé 20 euros mais en revenant, le gars n'avait pas assez de fric pour payer sa part en plus du pinard ! Du coup, il a fini à la plonge, le pauvre vieux !**
**Adam : Elle ressemblait à quoi ton hystérique ?**
**Ted : Petite, les cheveux frisés, de grands yeux verts. Plutôt bien roulée, je dois dire. Le mec devait être bien dégouté qu'il ne l'ait pas ramenée chez lui !**
Je souris alors que j'ouvre une page internet sur mon ordinateur, tout cela en étirant mes longues jambes sur ma table basse, comme je le fais quand j'écris. Sauf que là, je ne vais pas vraiment écrire...
Je prends congé de Ted en lui le félicitant d'être et de rester mon « œil de Moscou ». Cette fois j'éteins mon portable pour ne plus être dérangé. Je clique sur le site Dating. J'ai passé la semaine complète à écrire et à me remémorer les moments les plus tordants de mon rendez-vous avec Clara. Depuis, si j'ai reçu quelques rares notifications, la seule qui me soit restée en tête, c'est bien celle de cette SchtroumpfetteNymphette au profil si mignon et si proche du mien. Je suis heureux que mon profil Dating se souvienne de ma dernière navigation puisque c'est sur ce profil à la fois énigmatique et complet que s'ouvre ma page. Mon cœur rate un battement quand je découvre que pour une fois, elle est connectée. Un point vert clignotant m'indique d'y aller mais une frousse inexpliquée me retient encore. Qu'est-ce qui me prend, sérieux ? Je ne sais même pas si elle est jolie, ou même sympa. Est-ce parce qu'elle a dit qu'elle adorait lire et que je sais que nous sommes compatibles que je stresse comme ça ? J'en ai bien peur.
Peut-être est-ce aussi à cause de ce pseudo qui me rappelle l'une des expériences les plus catastrophique de ma carrière et...
[SchtroumpfetteNymphette : Coucou Adam ! Je ne m'appelle pas Eve mais je suis enchantée de pouvoir te parler !]
Comme un con, je fixe la petite fenêtre en bas de mon écran sans être en mesure de cliquer dessus. J'ai subitement un coup de chaud qui paralyse tous mes membres et laisse mes doigts en suspens au-dessus du clavier.
[SchtroumpfetteNymphette : Timide ?]
Bordel, mais qu'est-ce qui me prend à la fin ? Je suis en train de me laisser à nouveau bouffer par mon caractère effarouché ou quoi ? Niant de toutes mes forces cette cruelle évidence, je me redresse d'un coup, comme un écolier assoupi qui se prépare à répondre à l'interrogatoire vicieux d'un instituteur. Mais qu'est-ce que je dois répondre ?
[AdamSansEve1 : Bonjour, je m'appelle Adam]
Quel nul ! Nullos de chez nullos ! Je viens d'envoyer la réponse la plus pathétique et la plus ringarde qui soit. J'avale ma salive quand les trois points me signifiant sa réponse imminente se mettent à clignoter.
[SchtroumpfetteNymphette : Oui j'avais compris que tu t'appelais Adam, ton pseudo parle pour toi, t'inquiète. Moi, c'est Ysé. Et si tu déstressais ? On pourrait enfin faire connaissance plus sereinement, tu ne crois pas ? Je ne te cache pas que je suis très nerveuse aussi. Tu es le premier profil parmi ceux qui me correspondaient que j'ai trouvé intéressant et j'attendais avec impatience de pouvoir échanger avec toi. ]
Cette fois, la vapeur de la confusion rend mes joues cramoisies. J'en suis sûr parce qu'une lente chaleur est en train d'irradier ma face sans que je n'arrive à la calmer. Je me dandine encore sur place tandis que je ne peux lâcher du regard ces quelques mots qui semblent être surlignés en fluo :
« J'attendais avec impatience de pouvoir échanger avec toi »
J'avale ma salive et laisse un sourire niais me transformer en canard. Ça m'énerve mais j'apprécie cette sensation nouvelle.
[AdamSansEve1 : Je dois dire que pour ma part, c'est un peu la même chose]
[SchtroumpfetteNymphette : C'est vrai ? Tu m'en vois heureuse ! Alors comme ça toi aussi tu es un dingue de lecture ? Désolée mais c'est vraiment ce détail qui m'a sauté aux yeux ! Surtout que ta photo ne me dit rien de toi et que ta fiche laisse toute la place à l'imagination.]
Cette fois, un ricanement nerveux me fait glousser. Je me reprends très vite et me concentre sur ma réponse. Je n'ai pas envie de lui avouer qui je suis, pas tout de suite, en tout cas. Je veux juste qu'elle me découvre sans a priori, ni intérêt. Si ça se trouve, cette Ysé a déjà lu un de mes livres, en plus.
[AdamSansEve1 : Je suis un grand lecteur, c'est vrai et j'avoue que c'est aussi ce que tu as dit de la lecture dans ton profil qui m'a attiré]
Queutard !
[SchtroumpfetteNymphette : Quel est le dernier livre que tu as lu, du coup ?]
La tuile ! J'aimerai beaucoup ne pas lui dire que j'ai versé ma larme sur le dernier Coleen Hoover. Pour qui me prendrait-elle ? Parce que j'avoue qu'un homme qui s'émeut en lisant une histoire d'amour exemplaire, c'est loin d'être viril. Qu'est-ce que je peux lui sortir comme livre qui fasse un peu sérieux sans paraitre complètement ringard non plus ?
[AdamSansEve1 : Je suis en train de lire Misery de Stephen King. Il est assez intrigant.]
Putain ! Mais elle va s'endormir si je continue à l'assommer de ces banalités !
[SchtroumpfetteNymphette : Je t'avoue avec honte que je ne l'ai jamais lu mais par contre, je connais le film par cœur ! Je ne suis pas écrivain mais cela m'a fait revoir l'avis que j'avais sur eux. Est-ce que parfois nous ne sommes pas des Annie Wilkes qui attendons que l'auteur ne nous surprenne pas et qu'il écrive ce qu'on veut qu'on écrive ? ]
Ce que cette Ysé me raconte me vrille un instant. Je la trouve très intelligente, cultivée et son avis respectueux concernant les auteurs me donne envie de poursuivre la discussion avec plus de passion.
[AdamSansEve1 : Il est vrai que parfois, on ne comprend pas trop où l'écrivain veut nous emmener et ça m'est même arrivé de sauter des pages ou même de reposer le livre parce que l'intrigue était bien trop dérangeante. Mais c'est en insistant que je me suis dit « j'ai bien fait de ne pas arrêter ». Tu vois ce que je veux dire ?]
[SchtroumpfetteNymphette :Tout à fait ! En fait l'adage « Ne pas juger un livre à sa couverture » prend tout son sens dans ce que tu dis]
[AdamSansEve1 : C'est un peu pour cette raison que je me trouve sur ce site. Bien souvent, les gens disent que les sites de rencontre sont réservés aux frustrés et aux malades mais j'ai voulu vérifier ces idées reçues par moi-même]
[SchtroumpfetteNymphette : Et ça a donné quoi jusqu'à maintenant ?]
[AdamSansEve1 : Une seule et malheureuse rencontre catastrophique. Le chaos total. ]
[SchtroumpfetteNymphette : À ce point ?]
[AdamSansEve1 : Pire que ça ! Tu n'imagines même pas]
[SchtroumpfetteNymphette : On fait un deal : tu me racontes ton rencard et moi je te narre mais deux pauvres rendez-vous bien pitoyables eux aussi, je te prie de me croire !]
[AdamSansEve1 : Tope-là !]
Et c'est ainsi que nous échangeons notre bêtisier spécial Dating. Je lui raconte ma mésaventure chevelue dans les bras de Clara et de son côté, je découvre qu'Ysé a eu le privilège de tomber sur un pervers et sur un fana de son ex qui l'a bassinée pendant toute la durée du diner qu'elle lui avait accordé.
[SchtroumpfetteNymphette :Tu te rends compte qu'il est allé jusqu'à me montrer la première lettre d'amour qu'elle lui a écrite ? Je te passe le spectacle navrant de ses larmes et de sa voix chevrotante quand il me l'a lue ! ]
[AdamSansEve1 : En voilà un qui s'est pris pour Alfred de Musset]
[SchtroumpfetteNymphette : Ça m'apprendra à donner rencard à un mec qui prend KingKongStyle en pseudo ! Plus nul tu meurs !]
[AdamSansEve1 : Je ne vais pas critiquer, le mien est bien naze ! Mais je n'y suis pour rien, c'est ma sœur qui a déliré là-dessus !]
[SchtroumpfetteNymphette : Rooh ! C'est ta sœur qui t'a inscrit ? C'est un point commun qu'on a toi et moi puisque moi, c'est ma meilleure amie qui m'a forcée la main. J'adore ton pseudo, t'inquiète. Et toi, tu penses quoi du mien ?]
Euh...
Comment lui expliquer ça ? Devrais-je le lui raconter, d'ailleurs ? Non, je ne veux pas. On discute bien Ysé et moi et puis, je ne veux pas passer pour celui qui se plaint comme un débile. J'aurais bien le temps de lui expliquer.
[AdamSansEve1: Je trouve ça assez mignon. Tu aimes les Schtroumpfs, n'est-ce pas ?]
[SchtroumpfetteNymphette : Oui ! Surtout la Schtroumpfette ! C'est la première féministe que je connaisse !]
J'adore le fait qu'elle ait un avis sur tout. Ma question aurait pu avoir comme simple réponse un « oui, j'aime ce dessin animé ». Là, je m'amuse du petit roman pro-féministe qu'elle m'envoie et de sa théorie selon laquelle ce petit personnage bleu a tout compris à la condition de la femme.
Et c'est ainsi que je lui réponds, qu'elle en fait de même et que je ne vois ni les minutes, ni les heures défiler. La nuit vient bientôt m'envelopper sans que je ne m'en aperçoive vraiment. Ce n'est que lorsque je me rends compte de la lourdeur de mes lunettes pesant sur mon nez que je me dis qu'il est super tard. Mais je ne révèle rien de cette pensée à Ysé. Je la laisse me raconter ses dernières vacances et comment elle s'est retrouvée avec un coup de soleil portant l'ombre de son livre sur le ventre.
[SchtroumpfetteNymphette : Attends, il faisait super chaud et moi quand c'est comme ça, je roupille ! Mais j'ai dû me passer de bikini pendant un mois !]
[AdamSansEve1 : Tu devais être maligne comme ça ! Tu avais le livre tatoué au fer rouge, du coup ! ]
[SchtroumpfetteNymphette : Ma mère m'a charriée comme tu viens de le faire !]
Je lui confie comme si je la connaissais depuis hyper longtemps que j'ai une sœur jumelle que j'adore, que j'ai une mère sacrément chipie mais que j'aime énormément et je dérive même à lui confier la mort de mon père, emporté du jour au lendemain par une crise cardiaque foudroyante. Mes yeux deviennent tout petits mais mon sourire, lui, reste immense. Je suis crevé mais je reviens sans lutter sur des choses douloureuses de mon passé, assis dans le noir, tout sourire. Je me sens bien et je ne peux nier que c'est parce que j'apprécie cette Ysé, planquée derrière son masque de Schtroumpfette. Je le sais, je tiens mon histoire, celle du roman qui me ramènera à ma vie d'écrivain. Le frémissement que j'attendais est là. C'est agréable même si je sais que cela durera que le temps de l'écriture. Il est hors de question que je m'attache à une femme rencontrée par voie virtuelle.
Passons donc aux choses sérieuses sans perdre de temps. Je sais de quoi je parle. Plus la romance est fulgurante, intense et pleine de cœurs partout, plus la femme s'y laisse prendre.
[AdamSansEve1 : Tu sais quelle heure il est ? ]
[SchtroumpfetteNymphette : 3 heures du matin. Tu as de la chance que je commence plus tard demain mais ça va être raide. Tu es pire que du café noir coupé au RedBull !]
Sa petite plaisanterie me fait sourire, chose que je n'arrête pas de faire depuis tout à l'heure.
Adam, tu n'es pas un canard mais si tu es là, c'est en tant que scientifique, alors calme tes zygomatiques et tout de suite !
Fort de mes incantations, je plaisante en disant qu'on devrait me commercialiser, tout cela en associant mon message à plusieurs émoticônes morts de rire.
[SchtroumpfetteNymphette : Ne te moque pas ! Tu ne bosses pas toi ?]
Merde ! Avec mes conneries, je vais finir par me trahir. Ysé ne m'a pas parlé romance. Elle ne doit pas en lire, ni connaitre l'écrivain que je suis. Cependant, je reste accroché à l'idée selon laquelle je dois conserver ma profession secrète. Mais alors, qu'est-ce que je vais bien pouvoir inventer pour expliquer la façon dont je gagne ma vie ?
Et si je me servais de la vérité ?
[AdamSansEve1 : En fait, je suis une sorte de salarié indépendant. J'ai créé mon entreprise et j'en vis bien ce qui fait que je ne suis pas esclave des horaires]
[SchtroumpfetteNymphette :Alors comme ça, tu vas me laisser galérer seule au boulot demain ? Merci mister Adam !]
[AdamSansEve1 : Est-ce que ça te dirait de laisser nos écrans respectifs pour se rencontrer en vrai ? ]
Il m'arrive quoi ? Encore une fois, je n'ai pas réfléchi. Avec ce qu'elle m'a raconté des rencontres qu'elle a faites sur Dating, j'ai peur qu'Ysé me prenne pour un cinglé, moi aussi. Si elle refuse, je risque de la voir m'échapper et avec elle, mon inspiration toute neuve.
[SchtroumpfetteNymphette : Je préfère attendre un peu. Cela te dérange ? ]
J'ai beau jouer les braves, ce râteau fane ma bonne humeur. Heureusement, le virtuel empêche de se taper la honte.
[AdamSansEve1 : Non, il n'y a pas de mal. Après ce que tu m'as confié, je te comprends. Alors...
Comment dire ça ? Comment lui demander de revenir discuter avec moi demain sans passer pour un queutard ?
...ça te dit de revenir discuter ?]
[SchtroumpfetteNymphette : Demain, 19h ! Je serai là ! 😊]
Son émoticône me donne espoir et attise la flamme de mon inspiration. J'ai hâte de fermer cette conversation pour écrire autant que j'ai envie qu'elle se prolonge pour découvrir Ysé. C'est très paradoxal.
[SchtroumpfetteNymphette : Bonne nuit, à demain 💙]
Je reste un instant à fixer son message. À côté de son « à demain »très neutre, il y a un petit cœur bleu, tout mignon, tout simple et qui fait encore trainer sur mes lèvres ce sourire de canard que je m'empresse d'effacer. Je me redresse en reprenant le contrôle de la situation.
[AdamSansEve1 : A demain, chère Ysé. Hâte de pouvoir te reparler.]
J'hésite à associer moi aussi un cœur à cette déclaration déjà très mielleuse et surjouée. Mais non.
Pour qu'une femme soit à vos pieds, il ne faut jamais que dès le départ, elle sente que vous êtes conquis. En même temps, moi je ne le suis pas, alors...

SchtroumpfetteNymphette est hors ligne

Je soupire comme si j'avais couru le marathon de ma vie. La lumière pâle et rosée du soleil levant éclaire mon appartement et redessine les contours des meubles. Je devrais aller dormir mais je n'en ai pas la moindre envie. Je ferme ma page internet et ouvre mon Word.
Je sais que tout est revenu. La flamme et la fougue des premiers instants est là. Dans ce que j'écris, je deviens le héros. Ce dernier est un bourreau des cœurs de Théo qui n'a eu de cesse de tomber sur des femmes bizarres. Il a enfin trouvé celle qui lui donne envie de se rendre encore et encore sur ce site, pour la découvrir et peut être finir par la rencontrer.
Ysé...euh...non...
Milla.
C'est beau prénom pour un personnage féminin, non ?

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