Louve [Fanfiction Twilight]

Chapitre 18

J'avais repoussé l'échéance suffisamment longtemps. Je devais parler à Jacob.

Je n'avais jamais aimé avoir à m'excuser. Reconnaître qu'on a eu tort n'est agréable pour personne, mais surtout, je ne m'étais pas exercée depuis longtemps. Je considérais que je n'avais pas à m'excuser pour mon comportement ces dernières années, et que c'était plutôt l'univers qui me devait de sérieuses explications pour le tour incongru et amer qu'avait pris ma vie. Mais aujourd'hui, c'était différent.

D'accord, peut-être Jacob avait sa part de tort aussi. Mais c'est souvent le cas : j'avais appris à la dure que rien n'était tout noir ni tout blanc, et de la même façon, il n'y avait pas d'un côté les bonnes personnes et de l'autre les mauvaises ; il n'y avait pas celle qui avait eu raison de bout en bout, et celle qui avait eu tort tout du long.

Et, oui, j'avais pensé chaque mot que j'avais prononcé ce soir-là. Mais cela ne voulait pas dire que j'avais été très maligne de les prononcer. Surtout ce soir-là.

J'avais aussi conscience que, pour beaucoup de jeunes, refuser de s'excuser était une question « de fierté ». Là encore, j'avais appris à quel point c'était une idée ridicule. J'étais fière : Fière de ma famille, fière de la louve que j'étais, fière de ma place dans la meute, de ma vitesse et de mon habileté. J'étais même fière, tout court. Je marchais la tête haute et je n'avais besoin de personne.

Tout du moins, j'essayais de m'en convaincre.

Nous avions tous besoin de quelqu'un. Les loups ne sont pas des animaux solitaires. Pas plus que les humains.

Oh, bien entendu, j'étais capable de vivre seule ! Je l'avais fait. Je l'avais expérimenté. Mais un loup est plus fort, plus puissant et plus heureux en meute. J'avais vécu loin de ma mère et de mon frère, et j'avais survécu. Mais maintenant que j'étais de retour auprès d'eux, je ne pouvais nier qu'ils étaient de véritables sources de lumière dans ma vie. Pourquoi se contraindre à marcher dans le noir, lorsque nous pouvions nous laisser guider par les étoiles ? J'avais mis du temps à accepter cette idée. A accepter que, peut-être, j'avais besoin d'être entourée. Que je pouvais refuser de créer de nouveaux liens, mais qu'il serait inutilement douloureux et contre-productif de s'acharner à briser ceux qui existaient déjà.

Et cela ne m'avait pas rendue plus faible. Quelque part, je sentais que j'avais encore beaucoup de chemin à faire, beaucoup de choses à comprendre. Mais je sentais aussi que j'étais en bonne voie, aussi tortueuse soit-elle. J'avais grandi et évolué. Ma vie était étrange et contenait son lot de douleurs, mais j'espérais bien qu'un jour viendrait où je serais en paix avec elle.

Et en paix avec moi-même.

Me réconcilier avec Jacob s'inscrivait dans cet état d'esprit. Tout ce que nous avions traversé ensemble par le passé nous avait lié, et je ne pouvais nier que je n'aimais pas le savoir fâché contre moi. Nous nous étions blessés comme seuls deux amis proches pouvaient le faire : en tapant juste, sans mâcher nos mots. Notre querelle n'avait que trop duré. Si nous avions été n'importe qui d'autre, Sam s'en serait déjà mêlé, jouant le médiateur entre nous comme il l'avait déjà fait des milliers de fois au sein de la meute, nous exportant à nous calmer, à discuter, et à régler notre différend. Il était naturel qu'il y ait des petites disputes au sein de la meute, mais elles ne devaient pas durer ou prendre des proportions trop larges.

Mais j'étais Leah. Et Jacob était, de par son sang, hiérarchiquement supérieur à Sam. Alors Sam ne s'en était pas mêlé. Et je ne savais que trop bien tous les autres sujets d'inquiétude qui le taraudaient.

Je me suis assise au sol, dos au mur. Je me trouvais un peu à l'écart de la forêt, à l'arrière d'un vieux bâtiment qui avait autrefois été un entrepôt de stockage, mais qui ne servait plus depuis longtemps. C'était un endroit poussiéreux, inintéressant, et tranquille. J'ai rapidement pris les lieux autour de moi en photo, et j'ai envoyé la photo à Jacob, accompagné de quelques mots : Je dois te parler.