Chapitre 5

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Ce n'était pas possible. Non.

Elle se tenait là devant moi, à me dévisager étrangement, se demandant si la folie n'était pas venue me prendre. Je ne pouvais pas en croire mes yeux. Voilà déjà plusieurs jours que je l'avais accidentellement bousculé dans les couloirs, mais par je ne sais quel phénomène surnaturel, elle était à nouveau en face de moi, radieuse et souriante, une lueur malicieuse brillant dans son regard. J'avais pourtant tout fait pour la chasser de mon esprit. Je pensais m'être débarrassé de cette attirance déstabilisante. Je frôlais l'interdit en restant avec elle. Mais à ce moment-là, je l'ai su. J'ai su que quoi qu'il puisse arriver, que quoi que je puisse entreprendre, elle serait là, à vivre dans mes rêves les plus profonds. Hier matin encore, j'avais eu une petite pensée à son égard, que j'avais immédiatement chassé de mon esprit. Pourquoi donc était-elle revenue ? Était-ce peut-être un mauvais rêve ? Je secouais vigoureusement la tête. Le tournis résulté m'en prouvait bien le contraire. J'étais fini. Et dire que j'étais sur le point de l'oublier à jamais.

Mes idées s'emmêlèrent pour ne former qu'un gros paquet de nœuds impossible à défaire. Puis divers sentiments commencèrent à prendre possession de mon corps. J'éprouvais une attirance mortelle, une peur effroyable, une haine dévastatrice, une mélancolie affligeante. Je commençais à perdre pied, à me sentir égaré, comme un verre de cristal se fragmentant sous le choc d'une chute redoutable.

Ses yeux semblaient scintiller comme de l'or, aussi envoûtant que cette pierre précieuse, révélant en moi une envie folle de m'en emparer. Je voulais les atteindre, les dérober et les garder, pour ne plus jamais les lâcher. Son iris semblait désormais aussi doux que du miel, coulant tout autour de cette pupille d'un noir de jais. Oh, je crois que je les dévorerai. Tout comme son regard, aux lueurs vertes et or, qui me fascinait un peu plus chaque seconde. Cette fascination qui m'empêchait de bouger et qui me murmurait à l'oreille de savourer, comme je ne l'avais encore jamais fait, ce moment rare. Je n'aurai plus cette chance.

Je laissais alors mon regard se plonger dans le sien, celle-ci possédant des yeux mordorés étincelants, creusés dans sa peau opaline. Ses pommettes hautes, son long nez finement travaillé sur sa peau, ses joues rosies, ses lèvres pulpeuses et sensuelles, ses délicates petites taches de rousseur parsemant son nez, m'hypnotisaient tel le chant de sirènes. Ses cheveux châtain clair, aux reflets dorés, ondulaient tout comme le mouvement des vagues jusqu'à ses épaules.

Mais que faisais-je ? Encore une fois, mon esprit me jouait des tours. Comme dans ce couloir. Je devenais fou. Complètement fou. Je ne voulais pas finir comme tous ces gens qui avaient perdu leur vie à cause d'un amant caché ou d'une relation secrète. Je voulais vivre auprès de ma famille, rester fort, et me sentir plus protéger que jamais grâce à cette force que me prodiguait mon père et qui m'aidait à vaincre tous les multiples malheurs de cette vie. Je ne demandais rien de plus.

Rien. Rien du tout. Juste moi. Lynn. Et maman.

« Non ! Non ! murmurai-je pour moi. »

- Il y a quelque chose qui ne va pas ? me demanda-t-elle soudain.

Je me crispai soudainement, chaque membre se bloquant. Mes lèvres essayèrent de faire sortirent des sons complètement sourds pendant que j'essayais de garder mon calme. Que faisait-elle ? M'adresser la parole devant ce nombre incalculable d'élèves grouillant à chaque coin. Je reculais doucement, un pas après l'autre, comme pour montrer que je n'étais pas avec elle, que je ne lui avais jamais adressé la parole. Mais elle me suivit obstinément et garda le même espace qui nous séparait. Je ne comprenais vraiment plus rien.

- Que fais-tu ? demandai-je inconsciemment.

- Je veux juste t'aider. Tu me parais angoissé, peut-être même malade.

RéclusionnaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant