Chapitre 11

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Je serpentais les diverses rues qui constituaient Neal Town, tout en courant du plus vite que je pouvais. La Grande Bibliothèque se percevait de loin, devenant de plus en plus petit au fur et à mesure de ma course. Le ciel s'assombrissait dangereusement, sous mes airs paniqués. Je ne devais pas traîner à cette heure-ci. Nous ne devions pas circuler autre part que chez nous, quand le soleil laissait place à la lune ; c'était une des nombreuses règles de plus à suivre pour rester en vie ici. Et une fois de plus, je les déifiais. Il faisait désormais très sombre et ces petites gerbes étincelantes recouvraient le ciel, en illuminant harmonieusement la nuit.

- Eh, oh, gamin !

C'était un Garde-Portier. J'étais dans le pétrin ; pourquoi suis-je resté aussi tard avec Ella ? Je suai à grosses gouttes, perlant sur mon front, pendant que celui-ci, un homme à la carrure intimidante, s'approchait de moi avec un air féroce. Je ne bougeai plus. Impossible, la peur m'en empêchait. Il s'approcha de moi, et me regarda droit dans les yeux.

- Je vous promets que j'étais en train de rentrer chez moi. Je ne faisais rien d'autre que suivre le chemin qui ramène à mon foyer... je vous le promets.

- File !

Mes jambes n'attendirent pas une seconde le reste de mon corps pour courir à une vitesse phénoménale. Je n'en croyais pas mes yeux : il m'avait laissé m'en aller sans rien me dire ou me faire. En cas normal, il m'aurait emmené au poste des Gardes, afin de téléphoner à ma famille, ou pour une action plus grave, m'envoyer au Centre de Rééducation Social pour me « réapprendre » les règles de base que nous devions respecter dans cette société. J'avais craint cette sanction en allant chez Mrs. Hodgkin, car il n'y avait rien de pire que ces centres. Et pourtant, une bonne douzaine avaient été construits à Neal Town, alors qu'il n'y avait que deux établissements scolaires ; maternelle-primaire et collège-lycée-université. Je ne comprenais toujours pas l'attitude de ce garde, mais je n'allais pas m'en plaindre. Je m'en sortais indemne, qui aurait pu espérer mieux de la part d'un Garde ? J'étais persuadé qu'un Garde Territorial n'aurait rien laissé passer.

Cette maison, construite en bois d'ossatures des Sapins, assez sombre, ayant la forme de deux longs pavés superposés, était bel et bien ma maison. Elle n'était ni différente, ni plus ravissante ou horrible qu'une autre maison, non elle était comme toutes celles qui fleurissaient tout le long de ma rue, et sur toutes les autres rues de la ville. Il n'y avait qu'un seul modèle de maison pour les personnes de mon rang : ce pavé en bois. Les Précieux se différenciant une fois de plus à nous avec leurs villas de grands luxes, toutes différentes, chacune étant plus grande et somptueuse que l'autre. Encore une fois nous étions inférieurs à eux.

Mes clés cliquetèrent dans la serrure de la porte et elle s'ouvrit sous mon poids. J'entendais une discussion provenant de la cuisine. Intrigué, j'accourais dans la pièce aux diverses senteurs. D'après mon odorat, ma sœur était sûrement en train de préparer des lasagnes.

- Derek !

- Maman ! m'écriai-je, en la serrant dans mes bras, coucou Lynn !

- Où étais-tu tout ce temps ? demanda ma mère, tout en haussant un sourcil.

- Eh bien...

Je n'avais jamais su mentir, surtout face à mes proches en qui j'avais entièrement confiance.

- Il était à la Grande Bibliothèque, maman. Il avait besoin de chercher des informations sur..., lança ma sœur, afin de m'aider à répondre. Elle avait bien vu que j'avais été perturbé par sa question.

- Sur Robert Allister et le Mur Noir. C'est pour l'Histoire, finissais-je, tout échangeant un sourire avec ma sœur, pour la remercier de m'être ainsi tiré d'affaire.

RéclusionnaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant