La confiance ne se donne pas, elle se mérite

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Citation de Samuel Ferdinand-Lop


       Le coup de feu retentit dans toute la salle et la cible fut atteinte sur le côté gauche. Evelyn se redressa le sourire au lèvres et essuya les gouttes de sueur dues au stress qui gouttaient sur son front.

      - Pas mal ! s'exclama Jorge.

       Il venait de faire irruption derrière elle en applaudissant. Elle sourit et sentit ses oreilles chauffer :

      - Ce n'était pas du tout au centre.

      - Tu l'as tout de même touchée.

      - Tu te moques de moi ou tu es sincère ? railla la jeune femme.

       Jorge ricana et lui donna un petit coup amical sur l'épaule :

      - Je trouve que tu t'améliores vraiment.

       En effet, pendant ces longs mois de vie chez les sans factions, la jeune femme s'était améliorée aussi bien sur le plan physique que sur le plan social. Par son courage et sa détermination, elle avait impressionné Marco ainsi que ses deux bras droits Jorge et Ethan qui ne la considéraient plus comme une moins que rien à présent, mais comme  une femme forte qui avait encore beaucoup de choses à apprendre.

       - Montre moi comment tu te débrouilles avec les couteaux, proposa Jorge.

       Il n'était plus exécrable et moqueur envers elle mais avait développé une sorte de respect, sans tout de même cesser de la taquiner.

      - C'est vrai que je suis peut être plus à l'aise avec des couteaux.

       Elle se munit alors de petites lames au manche fin et prit de l'élan. Elle bascula sa main derrière son épaule et la projeta violemment en avant tout en lâchant son projectile qui atterrit à quelques centimètres du centre.

       Jorge la félicita et elle déposa alors les autres couteaux qu'elle avait en main.

      - Tu penses vraiment qu'une guerre se prépare ? demanda-t-elle à l'homme près d'elle qui s'entraînait à son tour à atteindre le centre de la cible.

      - C'est inévitable, articula Jorge. Cette société n'est pas faite pour nous, il nous faut la rendre meilleure pour tout le monde.

       Evelyn soupira.

       - J'aimerais continuer à m'entraîner indéfiniment et ne jamais à avoir à me servir de ces armes en dehors de ces murs.

       - Tu n'aimes pas la violence hein, tu aurais du venir vivre avec moi plutôt qu'avec Éden qui t'a mis ses idées pacifiques dans le crâne.

      La jeune femme rit en pensant à Éden qui ferait tout pour éviter une quelconque violence.

       - Je ne suis pas contre la violence. Je pense que la violence permet d'éduquer le peuple et de les rendre dociles. Mais je n'aime pas faire le travail moi même.

        Le soir tomba et la salle d'entraînement se vida petit à petit. Evelyn n'avait pas envie de dormir et continua de tirer avec son pistolet en espérant atteindre au moins une fois le cœur de la cible.

       Il ne resta bientôt plus qu'elle dans la salle avec Edgar, tous deux éclairés par la faible lumière des néons grésillants qui constituaient leur seule lumière, leur quartier général étant dépourvu de toute fenêtre.

      - Eden doit être rentré maintenant, affirma Edgar à l'autre bout de la salle.

       Evelyn appuya sur la détente et le bruit de la balle résonna dans la grande pièce. Elle se tourna ensuite vers le jeune homme :

      - Va le rejoindre si tu veux, je rentrerais plus tard.

       Eden avait été chargé aujourd'hui d'aller récupérer certaines informations sur l'organisation des factions et sur leurs leaders respectifs. De quoi prévoir la manière dont les aborder pour les négociations qui adviendraient certainement beaucoup plus tard.

      Edgar hocha la tête et laissa ses althères avant de quitter la grande salle vide. Evelyn poursuivit ses tirs pendant encore de longues minutes. Allongée sur le sol, elle positionnait son arme à côté de son œil et visait tant bien que mal le centre de la cible qu'elle n'atteint pas une seule fois.

       Frustrée de son échec, elle se reporta sur les couteaux. Elle avait l'impression d'avoir toujours su manier ces lames, comme si c'était dans son sang.

       Pendant qu'elle tirait, son esprit vagabonda, et elle se mit à s'imaginer elle même à la place de Marco, en tant que Leader des sans factions. Bien que ce jour n'arriverait certainement jamais, elle se vit en train de commander son armée de sans factions. Elle aurait tous ses sujets à ses pieds qui lui obéiraient au doigt et à l'œil et elle les commanderait. Le pire, c'est qu'elle aimerait cela.

       Alors que la fatigue se faisaient enfin sentir, elle éteignit toutes les lumières qui moururent une par une avant de laisser la salle dans un noir complet. À tâtons, elle se dirigea vers la sortie et les faibles lueurs dans l'étroit couloir lui permirent de distinguer où elle mettait les pieds.

       Elle marchait seule dans ce long corridor sombre, ses pas claquant sur le sol et résonnant dans ce tunnel de béton. Elle ne vit pas tout de suite la silhouette qui se dessinait à quelques mètres devant elle.

       La tension était palpable dans l'air et Evelyn ralentit sa marche. L'ombre s'avançait vers elle. Elle continua sa route en essayant de masquer son appréhension, les yeux baissés, et l'attitude décontractée. L'ombre s'approchait, elle avait vraiment peur, sa respiration s'accélèra. Elle songea à faire demi tour, mais dès qu'elle se retourna, elle vit de nouveaux deux ombre la suivre silencieusement.

       Effrayée, elle tenta de masquer ses émotions. Les trois hommes formaient un piège qui se refermait petit à petit autour d'elle. Elle déglutit, baissa la tête et ne s'arrêta pas pour autant, cherchant désespérément une solution pour s'enfuir.

       Les silhouettes s'approchaient, elle devait réagit vite. La solution se présenta sur sa droite. Un carrefour ! Elle le remarqua et ne perdit pas un instant pour s'élancer en courant vers cette porte de secours, tandis qu'elle entendait ses poursuivants se lancer dans une course effrénée à leur tour, à sa suite.

       Redoublant d'efforts, elle fit appel aux dernières forces qui lui restait pour leur échapper. Malheureusement, que pouvait elle seule face à ces trois hommes ?

       Ils eurent vite fait de la rattraper. Tout en étouffant un cri, elle sentit de puissantes main la coller violemment contre un mur. Les trois hommes étaient là et Evelyn apercevait à peine les traits de leurs visages dans l'obscurité.

       Deux lui saisirent les poignets et l'immobilisèrent contre le mur froid en béton. Elle serra ses dents et se débattit avec ardeur :

      - Tout doux ma mignonne, on a pas vraiment envie de t'assommer alors tiens toi tranquille.

       Elle lança un regard noir à son interlocuteur et se remit à gesticuler et hurlant :

      - Qu'est ce que vous voulez ?

      - Nous ? Pas grand chose, ricana un autre de ses agresseur.

      - Tu sais, si les bons soins de Marcus Eaton te manquent... commença le troisième qui lui enserrait le poignet gauche.

       - Tu peux compter sur nous pour combler le vide qu'il a laissé.

       Evelyn ne chercha pas à savoir de quoi ils voulaient parler. Elle ne voulait pas savoir elle voulait juste partir. Dans son cou, elle ressentit alors la chaleur d'une respiration avant que le meneur ne siffle :

      - Chacun son tour.

       Et il se colla alors contre la jeune femme avec un sourire malicieux sur les lèvres. Tandis qu'il plongeait sa tête dans son cou et s'amusait à découvrir toutes les parcelles de son corps avec ses doigts, elle tenta d'hurler, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Elle était piégée, une nouvelle fois, et impuissante.

Tobias Eaton (Origines) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant