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Le lendemain matin, il se réveilla tôt, très tôt. Le calme instauré la veille avait disparu. Une seule pensée le hantait : il ne pouvait partir sans dire adieu à Amaria. Il était horriblement tôt ; il espérait qu'elle lui pardonnerait de la réveiller. Mais comme tous les Shinobis, il savait : on part en mission, mais on ne sait jamais si on en revient.

Il rassembla en toute hâte ses affaires préparées dans la soirée, apposa les sécurités sur sa maison avant de filer dans les rues du village. Le soleil ne se lèverait pas avant une bonne demi-heure, les rues étaient désertes.

Il ne lui fallut pas longtemps pour atteindre le quartier où elle vivait. Evidemment, les volets étaient clos et le silence régnait. Il toqua à la porte plusieurs fois avant d'entendre des grognements ensommeillés tenter de formuler un j'arrive.

C'est une Amaria avec les cheveux en bataille et à moitié encore endormie qui lui ouvrit la porte. Elle avait tout de même l'air prête à incendier l'opportun, mais elle referma la bouche en voyant qui lui faisait face.

— Ibiki ? Tout va bien ?

En un instant, elle fut pleinement réveillée. Elle resserra sa longue veste contre elle, tenta de se recoiffer de l'autre main. Décidément, il ne la voyait jamais sous son meilleur jour, il faudrait qu'elle change cela. En même temps, il débarquait toujours à l'improviste, que pouvait-elle faire... Elle chassa ses pensées parasites : il n'était pas venu si tôt pour rien. Son cœur se serra en voyant l'accoutrement du shinobi. Il partait...

— Je ne pouvais pas partir en mission sans te le dire, annonça-t-il finalement. Je...

Il poussa un soupir. Que dire ? « Je reviendrai » ? Et bien justement, peut-être pas...

Il était un shinobi, il pouvait mourir demain, il ne pouvait pas avoir de regrets. Il ne voulait pas avoir celui-ci en tout cas. Il l'attira contre lui tendrement, la faisant sursauter légèrement, elle aussi devait s'être perdue dans ses pensées. Comme lors de leur dernière soirée ensemble, il replaça doucement une mèche noire et bleu derrière son oreille avant de délicatement relever son menton vers lui. Il déposa un doux baiser sur ses lèvres. Ça ne dura qu'un instant, ça eut le goût de l'éternité.

C'était un baiser doux.

Un baiser bref.

Un baiser chaste.

Un baiser plein de promesses.

Un baiser amer qui avait le goût d'un adieu.

Il s'éloigna à regret.

Il était temps.

Il disparut en un instant, la laissant en proie à un tourbillon d'émotions. La gorge nouée, le cœur comprimé, elle retourna s'envelopper dans sa couette. Des larmes perlaient au coin de ses yeux. Elle n'avait rien dit. Qu'aurait-elle pu dire ? « Reviens » ? Pourquoi lui demander une promesse aussi cruelle ? Elle le savait, il était ninja. Elle comprenait cela. Elle comprenait ce besoin de ne pas avoir de regrets, ce refus de faire des promesses impossibles à tenir. Elle savait que trop bien qu'un ninja partait en mission sans certitude d'en revenir.

Elle supplia qu'on le laisse lui revenir.

La journée fut éprouvante. Elle ne cessait de ressasser la scène dans son esprit. Puis, dans sa tête se jouaient les pires scénarios possibles. Les journées suivantes ne furent guère plus faciles. Au bout de deux semaines, elle réussit à prendre suffisamment sur elle. Elle ne pouvait se rendre malade ainsi. S'il revenait, il repartirait tôt ou tard en mission. C'était évident.

Elle ne pouvait se ruiner la santé à chacun de ses départs.

Elle recommença à dormir la nuit, même s'il n'était pas rare qu'un cauchemar vienne hanter sa nuit. Tous les jours, elle restait à l'affût de l'annonce de son retour. Elle avait entendu dire qu'il était parti avec une équipe. Au moins n'était-il pas seul. Bien qu'elle ne douta pas un seul instant de ses capacités. Mais, il était toujours plus sûr d'avoir quelqu'un pour couvrir ses arrières.

Elle savait donc qu'il était parti avec plusieurs autres ninjas dont la plupart était membre d'un grand clan. Yamanaka, Aburame, Nara... Que des grands noms. Certes, ils n'avaient pas la force de frappe d'un Uchiwa ou d'un Hyuga, mais tout de même. Elle savait très bien que ces deux grands clans ne se mêlaient guère aux autres. Les Uchiwa rentraient tous dans la police et n'étaient que peu présents dans les forces générales. Les Hyuga s'orientaient vers la traque et évitaient d'être dans les missions périlleuses pour protéger leurs précieuses pupilles.

Elle poussa un long soupir en posant une énième pile de dossiers sur son bureau. Il était tard, vraiment très tard. Elle avait accumulé trop de retard, si bien qu'on lui avait ordonné de rester plus longtemps pour terminer. Pourquoi ce soir là en particulier alors que ça faisait trois semaines que les dossiers traînaient : elle n'en savait rien. L'ordre était tombé sans préavis.

Elle en aurait jusqu'au lever du soleil.

Elle termina finalement vers deux heures du matin. Elle eut un sourire victorieux en posant le dernier dossier à sa place. Sa section était désormais parfaitement rangée. Il ne lui restait plus qu'à rentrer chez elle et se glisser sous sa couette toute moelleuse. Elle avait hâte !

Quand elle posa le pied à l'extérieur, toutes envies de rentrer chez elle la désertèrent.

Elle se sentit oppressée. Un poids immense semblait peser sur son estomac. L'air lui-même était pesant. Et ce silence... Il y avait quelque chose d'anormal. Elle fit un pas en arrière. La boule dans son ventre sembla remonter dans sa gorge. Elle rouvrit la salle d'archive et une fois entrée, elle remit en place toutes les sécurités. Elle récupéra le kunai dissimulé dans la doublure de sa veste et fila dans la salle de pause. Elle activa deux niveaux de sécurité sur la porte de la pièce. Cette pièce pouvait être utilisée comme bunker en cas d'attaque.

Elle s'assit sur le lit de camp tout au fond. Elle affermit sa prise sur l'arme pour tenter de stopper les tremblements de ses mains. Elle n'avait ressentit une telle peur depuis bien longtemps. Et la dernière fois... Non, ce n'était pas le moment d'y songer.

Elle effleura du bout des doigts les différents sceaux sur les murs. Ils étaient bien actifs. Il y avait d'autres armes de jets dans la pièce. Elle avait de quoi se défendre.

Que découvrirait-elle en sortant de la pièce demain matin ?

Rien, espérait-elle.

Rien, espérait-elle

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Douce Torture || Ibiki MorinoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant