XVI - Les flammes dansent

480 61 56
                                    

Sa vision se brouillait.
La faim lui entravait la gorge, l'obligeant ainsi à rester muette.
Ses pieds lui faisaient tellement mal. Tellement.
Mais ce n'était rien comparé à ses mains.
Elle aurait voulu se les trancher, les arracher, les découper.
Tout faire pour ne plus voir les horreurs qu'elles créaient.
Tout.
Elle était désespérée.

Entre les arbres, une lueur persistait.
C'était le Soleil, qui filtrait ses rayons à travers les branchages.
C'était par là qu'elle décida de s'avancer.
De ses pieds fatigués elle fit un pas. Elle écrasa des feuilles mortes, sentit le vent fouetter son visage. Un frisson lui parcourut la nuque lorsqu'elle franchit un ruisseau.
Les traits d'une maison se dessinaient, peu à peu.
Elle était si proche.
Si proche.

Une silhouette apparut au coin de la bâtisse. Elle était figée, comme une statue.
Mais sa main bougea, et elle semblait tenir une pelle. Ou peut-être était-ce une hache.
La silhouette fit un pas, s'avança.
Avait-elle vu l'intruse, parmi les feuillages ?
Elle s'approcha, encore.
Peut-être avait-elle dit quelque chose.
La forêt se referma sur elle.
Sa vision se troubla.
L'obscurité l'enlaça.
Et tout devint noir.

.

.

Dosanko ouvrit les yeux.
Elle avait terriblement mal à la gorge, et ne réclamait qu'une chose : de l'eau.
Puisant dans ses dernières forces, elle se redressa en s'appuyant sur ses bras. Et elle se rendit compte qu'elle était dans un lit, plutôt confortable, même si rien n'égalerait le confort de son matelas de sa maison.
"Est-ce vraiment ma maison ?" se posa-telle comme question, esquissant un léger sourire forcé. Mais bien vite, sa lèvre inférieure se mit à trembler. Elle ne pouvait pas pleurer. Elle n'avait plus de larmes.
Essayant de reprendre contenance, elle fouilla le lieu du regard en dodelinant de la tête.
Une simple chambre, aux murs en bois. Les meubles semblaient usés et vieillis par le temps. Une étagère où s'entassaient des dizaines de pots de plantes semblait sur le point de céder à tout moment. Sur une chaise reposaient plusieurs couches de tissu, bien trop grande pour un enfant. Dans le coin de la pièce trônaient arrosoirs, pelles, et autres outils de jardinages.
Tout semblait avoir été poussé pour laisser la place au futon dans lequel la jeune fille reposait.

À côté des draps se tenaient un verre transparent et un pichet d'eau plein.
Soit la petite était placée sous une bonne étoile, soit le propriétaire des lieux était une âme vraiment charitable.
Dosanko n'hésita pas une seule seconde à s'en servir, quitte à en renverser un peu à cause de sa maladresse. Elle porta le verre à ses lèvres et avala une gorgée. Le liquide frais lui faisait tellement du bien. Elle aurait voulu tout boire d'un coup, mais sa gorge desséchée devait peu à peu s'humidifier. Avaler tout trop vite risquait de lui faire mal plus qu'autre chose.

« Tu devrais être plus prudente. » S'exclama une voix encore inconnue aux oreilles de la brune.

Cette dernière sursauta, lâchant sans verre vide au sol. Par chance, il ne se brisa pas.
Un homme se tenait sur le pas de la porte, fixant de ses yeux gris son invitée. Ses cheveux en batailles, recouverts par un chapeau de paille, oscillaient entre le blond grisonnant et le châtain. Il portait une salopette brune, tâchée par endroit, par-dessus une chemise à carreau jaune et verte. Ses manches étaient retroussées, laissant voir un grand nombre de cicatrices - dues à un long et éreintant travail ou à un quelconque conflit, ça, Dosanko ne risquait pas de le savoir de sitôt. Ses bottes étaient pleines de boue, et la paire de gants qu'il tenait dans une main était toute aussi souillée.

« Imagine que j'avais mis du poison dedans. Tu l'aurais bu sans même t'en soucier. »

La jeune fille écarquilla les yeux et recula comme elle le pouvait. C'était bien la première fois qu'on lui disait une chose pareille. Mais si l'homme avait vraiment mis du poison ?

Les Lucioles Dansent - Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant