XXII - Souvenir d'une ère révolue

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Dosanko traversait furtivement la rue.
Elle ne lançait pas un regard en arrière, ne se préoccupait pas des passants, et ne s'excusait pas lorsqu'elle les bousculait. Ses yeux étaient rivés sur le sol, à regarder le béton et les pieds d'inconnus.
Elle ne savait pas où elle allait, mais elle souhaitait juste partir, le plus loin possible.
S'enfuir.

Ses mains tremblaient, mais elle n'osait pas les ranger dans ses poches. La moindre chose qu'elle toucherait se transformerait en désastre. Tout venait de recommencer une nouvelle fois. Elle avait encore commis l'irréparable.
Et tout ça à cause de ce fichu pouvoir.
Si seulement elle avait pu naître sans. Ou si elle n'avait pas ses mains tâchées de noir, qui lui portait malheur. Elle avait déjà tenté de se les couper, à plusieurs reprises, mais la jeune femme s'était avérée trop faible pour aller jusqu'au bout de son geste. Ses marques laissées par ses mutilations la démangeaient, mais elle n'osa se les gratter par peur d'altérer sa propre peau.
Elle se contentait d'avancer vers l'inconnu, sans se soucier du reste.
Elle voulait sombrer, sombrer, sombrer.

« Eh ! »

Soudainement, quelque chose la retint par le bras et la tira en arrière.
Elle faillit trébucher par surprise, mais la personne qui l'avait attrapée la retenait.

C'était un homme à la chevelure brune, aux grands yeux chocolat et au regard indéchiffrable. Il portait un long manteau beige par-dessus un gilet noir. Sa main tenait toujours fermement le poignet de la brune, qui se dégagea d'un coup sec de la prise. Elle n'avait pas envie de blesser quelqu'un par mégarde.

« Qui êtes-vous ? » Questionna-t-elle, sur ses gardes.

« C'est comme ça qu'on me remercie ? » Commença l'inconnu en prenant un air faussement vexé. « Je t'ai sauvé la vie, je te signale. »

Dosanko jeta un coup d'œil derrière elle, et constata avec effroi qu'elle se serait engagée sur la route bondée si cet homme ne l'avait pas retenue. Une voiture l'aurait fauchée et... elle ne serait sans doute plus de ce monde.

« Mais dis-moi, pourquoi ce regard si triste sur ton beau visage ? » Poursuivit-il avec un sourire joueur. « Si tu ne veux pas me le dire, ce n'est pas grave, mais je serai ravi de faire un double suicide avec toi ! »

La jeune femme se demanda comment quelqu'un pouvait aborder ce sujet aussi funeste avec une telle expression. Et surtout, d'où il tirait cette question ? Ce n'était pas... commun, de faire ce genre de proposition.
Mais, en y réfléchissant, ce n'était peut-être pas une mauvaise idée.
Elle pourrait enfin cesser de causer des torts à ce monde.

« P... pourquoi pas... » répondit-elle, les yeux dans le vague.

Le brun resta figé pendant quelques secondes, avant de subitement reculer en sursaut. Il poussa un cri d'incompréhension, et Dosanko se sentit bien stupide sur le coup. Elle lui lança un regard glacial dont elle avait le secret.

« Attends, attends ! C'est la première fois qu'on me dit oui ! Kunikida-kun, tu as entendu ça ?

- Dazai, arrête d'embêter toutes les femmes que tu croises. Tu la perturbes avec tes questions bizarres. »

La brune lança un regard à l'homme derrière son interlocuteur. De grande taille, il arborait un air très sérieux et exaspéré. Ses cheveux blond foncé étaient attachés en queue de cheval, et ses lunettes lui allaient à la perfection. Il était revêtu d'une chemise noire et d'un gilet beige, et un fin ruban rouge était noué autour de son col.
Il regarda un moment la jeune femme comme s'il cherchait à lire en elle. Puis, tout d'un coup, il fronça les sourcils et poussa un long soupir.
Ce fut le dénommé Dazai, à en juger par les propos de son ami, qui décida de répondre à la question de Dosanko.

Les Lucioles Dansent - Bungo Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant