Chapitre 12

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«Et dire que je t'imaginais si innocente. Depuis la fac, tu inspirais la confiance. J'ai du mal à imaginer que tu ai pu faire ça. Tu vois, en avoir l'idée, je comprends, ça arrive. Tout le monde à le droit de déraper. Mais sauter le pas... C'est complètement irréaliste.»

Il piétine en dessinant des cercles au sol et passe compulsivement ses mains dans ses cheveux. Son air devient hésitant. J'arrive presque à percevoir ses doutes. Si ça ne tenait qu'à moi, je dirait qu'il doute d'avoir fait le bon choix en m'emmenant ici et en me forçant à lui avouer mes actes. Il n'était peut-être pas près à entendre ce que je lui ai dit, malgré ce qu'il pense. Il remet en question mes actions et les siennes. S'il continue à faire les cents pas de la sorte, il va creuser un trou dans son sous-sol. Après un moment, il reprend sa tirade moralisatrice, et je me rends compte :

«Même si tu en avais tué un seul, j'aurais pu comprendre à la rigueur. Dans un accès de rage ou emportée par tes émotions. Je ne peux pas dire que ce sont des choses qui arrivent. Mais dans certaines circonstance, j'aurais pu essayer de voir les choses de ton point de vue. Mais là, tu m'excusera de ne pas avoir compté précisément tes trophés, ça dépasse les limites de toute rationalité. Assassiner autant de personnes. De façon tellement méthodique. Sans jamais laisser de traces derrière toi, sans éveiller le moindre soupçon... Punaise... Je crois que je suis presque impressionné en fait. T'es une grande malade. T'es complètement dérangée à un point inimaginable. Et pourtant, t'as gardé la tête froide, ton objectif bien ancré au fond de ta mémoire. C'est surréaliste. Tu fais vraiment flipper. Et moi je n'ai rien vu venir..., annonce-t-il, déconcerté

— Je n'étais plus moi-même, je me suis laissée emporter par mes émotions.

— J'ai bien compris ça. Ton désir de justice, à tout pris. Ce qui me choque, c'est ta manière d'agir. Tu as maîtrisé la situation avec perfection. Je ne veux pas faire l'apologie de ce que tu as fait. Mais tu as minutieusement planifié tes coups, et sans jamais laisser la moindre preuve de ton passage.

— Avec notre boulot, on connait toutes les ficelles de la police. On sait comment ils montent leurs enquêtes, sur la base de quels éléments. À partir de là, ce n'était plus compliqué de nettoyer mes traces. Je savais comment ils fonctionnaient, expliqué-je simplement.

— Non Laura, un tel détachement, un tel "professionnalisme", ça n'existe pas chez tout le monde. Toi tu as ça en toi. C'est profondément marqué dans ta personnalité. Tu te rends même plus compte à quel point t'as vrillé, me crache-t-il.

— Arthur, s'il te plaît, le supplié-je.

— Il n'y a plus de "s'il te plaît qui tiennent''. T'as réussi à tenir ça loin de moi alors qu'on était dans une relation, si proches. Et pire encore, t'as fait tourner en rond la police pour plusieurs crimes ! Encore mieux que n'importe quel psychopathe ou tueur en série !»

Mes croisades s'enchaînent. J'ai jamais vraiment compté. La première fois était censée être la seule. Et puis j'ai perdu pied. Le plus malheureux dans tout ça, c'est que je deviens plutôt douée dans ce que je fais. Quand je regarde le temps que j'ai passé à perfectionner ma méthode, à monter des plans, je me dis que c'est bien plus que pour n'importe quelle autre activité que j'aurais pu avoir. Jamais je n'aurais été capable de passer autant de temps focalisé sur, disons, une passion, comme le dessin. Ma patience à ses limites, mais il semblerait que mes capacités soient décuplées quand je veux venger une injustice.

Encore installée à l'avant de ma voiture, je contrôle une dernière fois le contenu de mes poches. Au cas où, j'ai une arme à feu sur moi. J'ai également en ma possession un mouchoir en tissu et une petite bouteille remplie de chloroforme. Cependant, il n'y a aucune place pour l'improvisation. Je dois suivre le plan.

DoubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant