Chapitre 15

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Les deux mains d'Arthur encadrent mon visage. La pulpe de ses pouces effleure les courbes de mes joues, puis ses lèvres déposent un nouveau baiser sur mon front.

«On fait quoi maintenant ? s'enquiert-il en haussant les épaules.

— Pourquoi tu m'as détachée ? Pour me laisser partir ?

— Non. Je veux qu'on aille te livrer à la police, recommande-t-il.»

Je lui réponds par un soupir. Je sais que c'est la meilleure solution. Mais mon cerveau ne peut même pas, ne serait-ce que commencer à accepter une telle réalité. Je suis incapable de faire-face. Je me sens emprisonnée et sale, comme ce sous-sol, crasseux. Des gouttières fuient le long des murs et le plafond moisi. Je me sens pareil. Quelque chose en moi de malsain s'écoule et me ronge en me rendant sale. Si je décide de faire confiance à Arthur, je sais que je peux dire adieu à ma petite vie. Mais si à l'inverse, je refuse de le suivre, non seulement, je vais continuer à m'enfoncer dans mon propre enfer, mais je vais l'emmener avec moi. Depuis qu'il sait, c'est plus comme avant, c'est plus juste ma vie qui est sur le fil.

«Laura ? T'es avec moi ?

— Oui...

— On va y aller tranquillement d'accord ? Je sais que t'es du même avis que moi.»

Faiblement, je tente de lui résister. J'ancre mes pieds au parterre et au fur et à mesure qu'il me pousse vers la porte, je me penche dans sa direction, comme si je faisais le poids face à lui. Toujours debout au milieu de la pièce, il place ses mains sur mes hanches, en essayant de me déloger.

«S'il te plaît, attends... Je ne peux pas faire ça. Pas à mes filles. S'il te plaît !

— Hey, hey ! Calme-toi. Doucement, me chuchote-t-il en posant des mains rassurantes sur mes épaules.

— Tu vas faire quoi là-bas ? Tu vas juste me laisser me dénoncer ou tu vas donner toutes les preuves que tu as ?»

À tâtons, j'essaye de me faire une image de mon futur proche. Je peux sentir l'anxiété monter et comprimer mon cœur et mes poumons. Arthur me laisse une plus grande marge de mouvement et je recule de son étreinte. J'ai besoin d'air.

Sans vraiment parvenir à ajuster ma vision, j'évolue entre ces quatre murs, qui sont ma nouvelle maison depuis près d'une semaine maintenant. On doit commencer à me chercher dehors. En voyant tout ce qu'il y a ici, je me reconcentre sur la situation actuelle. Il dispose d'une myriade de preuves contre moi. Cette fichue pelle, des articles de journaux qui pointent directement vers des disparitions ou des meurtres non élucidés, les photos des cadavres. Il a même mon arme. Je suppose qu'il a dû la récupérer dans ma voiture, quand il l'a envoyée dans le fossé.

«Tu vas leur donner mon arme ?

— Oui, je vais la donner. Elle permettra de faire le lien entre une partie des affaires. Pour le reste tu devras t'expliquer. C'est pas contre toi, mais tu dois parler de tout ça avec quelqu'un en position de pouvoir sur toi. C'est ton seul moyen de te libérer de tout ce que tu portes. Que tu le veuilles ou non, que tu en sois consciente ou non, tu te détestes pour ce que tu as fait, je le sais. Je te connais depuis des années et des années.

— Je sais que tu as raison, mais quand je pense aux conséquences que ça va avoir sur ma vie, sur mes filles surtout... J'ai envie de rester cachée. Je ne peux pas leur faire vivre ça. Ce sont encore des bébés. Ils vont m'enfermer et je ne les verrai plus.

— Il vaut mieux que leur maman assume ses actes et prenne ses responsabilités, plutôt que du jour au lendemain cette histoire ressurgisse et vous tombe sur la tête. Et même si ça ne vaudra jamais tes filles, moi je serais là. À chaque étape.»

DoubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant