chapitre xvii

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Le plan était simple. Peut-être un peu trop, si l'on prenait en considération l'ennemi qu'ils s'apprêtaient à affronter, mais c'était mieux que rien. Du moins, c'était ce que se répétait Blythe tandis qu'il se préparait à partir à la rescousse d'Eden.

Il avait été décidé à l'unanimité qu'ils partiraient peu avant que la nuit tombe à bord du véhicule tout-terrain de César. Ils abandonneraient la voiture peu avant la montée du lac, et ils couvriraient la distance restante à pied. Ils auraient quelques heures de marche avant d'arriver aux collines et, si les estimations de César étaient correctes, au campement du Bunker, couverts par l'obscurité.

Le reste du plan était un peu plus incertain, construit sur des suppositions et des espoirs, qui étaient les seules choses dont disposait Serendipity dans cette situation. Il leur faudrait analyser l'installation du Bunker, repérer où était détenu Eden, et le récupérer en attirant le moins possible l'attention des soldats.

Tout cela était bien beau en théorie, mais la réalité se montrait souvent décevante, et personne n'était assez naïf pour penser que cette fois serait l'exception. C'était pour cela que les quatre membres de l'expédition – César, Porter, Félix et Blythe – se servirent librement dans le stock d'armes amassées par Serendipity au fil des années.

— Tu avais peut-être raison de t'inquiéter, fit remarquer Porter tandis qu'il soupesait un fusil noir.

— Pardon ?

— La dernière fois que je suis venu, juste avant l'arrivée d'Eden et de Félix, j'ai ramené une caisse d'armes, et tu te faisais du mouron. Je t'avais persuadé de ne pas te poser trop de questions. Il semblerait que j'avais tort.

— Tu ne pouvais pas le prévoir.

— Et même si je le pouvais, je ne l'aurais pas souhaité.

Les armes furent distribuées avec soin, par rapport aux compétences de chacun. Porter passa la lanière du fusil sur son épaule avec familiarité ; il expliqua que c'était le même modèle qu'il maniait lors de son expérience de guide autour de New-Hope. César se décida sur un revolver massif, avec lequel il s'était longuement entraîné sur le stand de tir qu'il avait mis en place derrière la serre. Quant à Blythe, on lui confia le même revolver qu'il amenait toujours avec lui lors de ses virées au lac. Il avait beau être habitué au poids du pistolet, il lui parut extrêmement lourd quand il enfila l'étui à sa ceinture.

Félix refusa de manier la moindre arme à feu.

— Je n'en ai jamais utilisée de ma vie, argumenta-t-il en croisant les bras. Je risque plus de me tirer une balle dans le pied que d'abattre un ennemi.

À la place, il lui fut confié le sac contenant leur recours ultime, cadeau de Joy. Elle avait disparu au milieu de la journée pour réapparaître quelques heures plus tard, brandissant trois cylindres métalliques.

— C'est du poison, annonça-t-elle.

Isaac, qui s'était approché avec curiosité des objets qui ressemblaient étrangement à des bombes de peinture, recula précipitamment avec une expression horrifiée.

— Ils sont sans danger tant que vous ne retirez pas la sécurité et n'enclenchez pas le mécanisme, leur assura-t-elle.

— Où as-tu trouvé cela ? demanda César. Je ne me souviens pas de les avoir vus dans l'inventaire.

— Parce qu'ils n'y sont pas. Ils font partie du système de défense du refuge. La tradition veut que, en cas de faille au sein-même du refuge, les habitants aient la chance de choisir une mort plus paisible que l'anéantissement. 

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