chapitre xiv

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Joy et César quittèrent aussitôt la salle commune pour aller s'enfermer dans le centre de commandement, emmenant Porter avec eux, murmurant à propos de stratégie et de plans de secours. Poppy se retira au sous-sol, non sans déposer un baiser las sur la joue de Blythe, tandis que son frère restait assis, le front appuyé contre son poing, perdu dans ses pensées.

Félix, quant à lui, pleurait. Ses larmes n'avaient cessé de couler durant toute la discussion, et chaque mot, chaque reproche l'avait fait frémir comme un coup violent. Même la présence d'Eden à ses côtés ne pouvait le réconforter.

Le cœur de Blythe se déchira face à la vision qui s'offrait à lui. Eden n'était pas le seul à avoir souffert à cause du Bunker ; Félix était tout autant un survivant que lui, et Blythe s'en voulut de ne pas avoir été là pour lui avant que la vérité ne soit affichée au grand jour comme une cicatrice que l'on rouvrait.

Il ne put s'empêcher d'approcher des deux amis, ignorant s'il serait accueilli. Eden lui adressa un regard et un sourire fatigué avant de se tourner à nouveau vers Félix, et Blythe interpréta son manque de réaction plus virulente comme un feu vert.

Félix sursauta quand Blythe posa sa main sur sa tête avant de la glisser dans ses cheveux. Les mèches étaient sèches ; c'était une décoloration, un peu semblable à celle de Porter, un détail que Blythe n'avait jamais remarqué à présent.

— Je ne sais pas si je suis le mieux placé pour m'excuser, mais je suis désolé, murmura Blythe. Je t'assure que personne n'avait l'intention de te faire du mal. Porter... Porter a dépassé les bornes, et sois assuré que je lui ferai la remarque.

Félix renifla et s'essuya le nez sur sa manche.

— Non, croassa-t-il. Non, c'est inutile. Il a eu raison d'être en colère. Je l'aurais aussi été. Je sais que mentir est un vilain défaut et que ça ne m'attire que des ennuis, et je n'ai pas pu m'empêcher de le faire... Je le mérite.

Eden se figea à ses côtés avant de jurer sous son souffle.

— Je t'interdis de penser comme ça. Ce n'est qu'une connerie qu'ils utilisent pour nous retourner le cerveau, affirma Eden.

Il ajouta ensuite pour Blythe :

— Le Bunker interdit le mensonge. On devait dire la vérité si on était interrogé, et si quelqu'un suspectait que l'un de nous mentait, on était puni. Félix plus que les autres.

Tout s'expliquait, et surtout la façon qu'avait Félix d'être brutalement honnête. On lui avait appris à l'être, sous menace de représailles. Blythe frémit.

— Tu n'as pas menti par malice, ou avec l'intention de nous causer du tort, fit Blythe. Tu l'as fait pour te protéger, car tu croyais sincèrement que c'était la solution. Je ne t'en veux pas, et je suis sûr que Porter verra bientôt la raison. Il peut se montrer impulsif, mais ce n'est pas une mauvaise personne.

— Tu lui fais confiance ? demanda Félix. À Porter ?

— Je lui confierai ma vie sans hésitation.

— Alors moi aussi.

Blythe ne put s'empêcher de glousser devant l'air déterminé qu'afficha soudainement Félix.

— Comme ça, alors qu'il s'est comporté comme le pire des goujats ?

— Oui. Je lui laisserai une chance de faire ses preuves, mais en attendant, je lui accorde ma confiance. Ce n'est qu'en étant soudés que l'on surmontera les épreuves qui nous attendent.

— Tu es plein de sagesse. C'est pour chance pour le refuge de t'avoir parmi nous, ne l'oublie pas. 

Blythe ne put s'empêcher de serrer Félix contre lui. Le jeune homme était plus grand que Blythe d'une bonne tête, et terriblement mince. Blythe espérait que son affection aurait au moins le mérite d'apaiser l'esprit paniqué de Félix. Ce dernier lui rendit son étreinte, enroulant ses longs bras autour de lui.

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