Chapitre Trente-Trois

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Isia

J'étais consciente, mais je ne voulais pas ouvrir les yeux. La peur me tordait le ventre, et je sentais mes larmes rouler sur mes joues. Mes oreilles sifflaient, bourdonnaient, à cause de l'explosion. J'avais mal à mon bras gauche, et à ma tête qui devait avoir heurté le sol. Sebastian s'en était-il sorti ? Je n'entendais rien ; je n'avais pas d'autres choix que de braver ma peur pour vérifier son état. Je clignai plusieurs fois des paupières, terrifiée. Tout le monde courait pour sauver sa peau, et je voyais leur bouche hurler de peur. Ça sentait la fumée, et je voyais quelques mèches jaunes et rouges au loin, même si je n'aurai pas pu dire à quelle distance elles étaient. Je m'obligeai à bouger, tournant lourdement sur le côté pour me remettre debout. Mes jambes tremblaient, mais je réussis à marcher de quelques pas, fouillant les alentours. Où était Seb ? Il y avait des corps autour de moi, mais je ne reconnaissais aucun visage familier, malheureusement. Le mot "attentat" traversa mon esprit, mais je refusais d'y penser. Les larmes coulèrent de plus belle le long de mes joues ; la nausée m'envahit. J'avais de plus en plus peur, et mon instinct me criait de m'enfuir à toute jambe. Mais il fallait que je le retrouve. Tout de suite. Mes oreilles commencèrent à moins siffler, et je pus entendre de nouveau. Je m'essuyai les yeux, commençant à ne plus rien voir à travers mes larmes et cherchai autour de moi. Je parvins à crier son nom plusieurs fois, mais personne ne me répondait. Peut-être ne m'entendait-il même pas, entre les explosions et les cris terrifiés des autres. Une autre explosion retentit, me projetant de nouveau plus loin ; mais je restai consciente, malgré ma chute. Tout mon corps était douloureux. C'est là, dans la mêlée générale, que je le repérai. Il était allongé sur le sol, les yeux clos. Non, non, non, non. Non. Tout. Mais. Pas. Ça.

Oubliant la douleur, je me ruai sur lui, toujours en larmes.

Isia (en sanglotant) : Seb... Seb... Réponds-moi par pitié...

Je le secouai doucement, cherchant un quelconque signe de blessures ; mais rien. Pourquoi n'ouvrait-il pas les yeux ? Qu'est-ce qu'il avait ? Était-il... ? Je suffoquai, pleurant encore et encore. Non, c'était impossible, il ne pouvait pas. Pas lui. Pas maintenant. Je caressai son visage, agenouillée à côté de lui. Il fallait d'abord que je le transporte ailleurs. À l'abri du danger. Mais était-ce prudent ? Qu'est-ce qu'on préconisait pour les gestes de premiers secours ? Je n'en savais plus rien. Je me relevai, et tentai de le tirer à l'aide de mes bras. Mais le gauche refusa de coopérer, me lançant atrocement. Je ne voulais pas le regarder, sachant déjà que ça ne devait pas être joli. J'étais tombée sur des bouts de verre, tout à l'heure. Mes deux chutes m'avaient considérablement affaibli, et je ne pouvais même pas déplacer Sebastian. Je n'avais donc plus que deux options : soit partir seule, soit rester ici avec lui. Cette pensée m'arracha un hoquet de terreur. Hors de question qu'il reste ici tout seul. Mais qu'est-ce que je devais faire ?

****

Ella

Elle était dans le hall de l'aéroport avec Dylan, attendant son embarquement pour Paris. Comme d'habitude, il y avait foule. Ella regardait distraitement les passants, d'abord sans remarquer quelque chose d'anormal, avant qu'elle ne s'aperçoive que les personnes changeaient de direction, observant tous un des grands écrans placé dans le hall. Elle lève les yeux vers ce dernier, curieuse. C'était les informations, un flash spécial, et Ella comprend rapidement que quelque chose de grave était en train de se produire... Mais où ? Quand elle aperçut la Tour Eiffel sur les images, elle retint son souffle, soudain paniquée ; c'était à Paris ! Le stress lui monta à la gorge, boule d'angoisse et de panique, et prit immédiatement son téléphone pour appeler Isia.

****

Une sonnerie me tira de mes pensées lugubres. Étrangement, je la reconnaissais, avant de comprendre que c'était ma sonnerie de portable ; qui était lui-même dans la poche de Sebastian, puisqu'il l'avait pris avec lui tout à l'heure. Les doigts tremblant, je le sortis, et vu à peine qui m'appelais, tant les larmes me brouillaient la vue. Je décrochai, cherchant de l'aide, de n'importe qui.

Ella (paniquée) : Isia... Isia, est-ce que tout va bien ? Où es-tu ?

En entendant la voix de ma meilleure amie, je me remis à pleurer encore plus fort, tout en m'accrochant à la main de Sebastian.

Ella (encore plus paniquée) : Isia, Isia écoute-moi, dis-moi que tu n'es pas dans cet attentat, est-ce que tout va bien ?

Isia : Ella... Ella...

Ma voix tremblait, et n'était qu'un murmure rauque. Je tentai de me reprendre ; mais impossible avec Seb étendu à côté de moi, encore inconscient.

Ella : Isia, écoute-moi attentivement, où es tu ?

Isia : Je... Je... Suis là-bas... Seb... Il est...

Ella : Quoi ? Qu'est ce qu'il se passe ? Vous êtes blessé ?

Isia : Je sais pas... Je sais plus. Ella... Je fais quoi ?

Ella (paniquée) : Va te mettre à l'abri, essaie de le dégager...

Isia : J'ai essayé, mais je n'ai pas... Assez de force... Je...

Une autre détonation retentit, me coupant la parole. De peur, mon corps se remit à trembler encore plus fort. On va tous y rester si je ne bouge pas. J'entendis Ella hurler à l'autre bout du fil, qui avait sûrement dû entendre l'explosion.

Isia : Je ne peux... Plus bouger...

Ma main se mit à trembler violemment, et mon portable me lâcha des mains. Je posai ma tête contre le torse de Seb, incapable de faire un mouvement. J'étais pétrifiée de peur.

****

Ella

Ella n'entend plus Isia, la ligne avait été coupée. Ce qui la mit dans tous ces états et la fit éclater en sanglots dans les bras de Dylan. Que pouvait-elle faire ? Rien, elle ne pouvait rien faire, à part prier pour que sa meilleure amie s'en sorte vivante.

****

C'est... Mon dernier rêve ? Où est-ce que je suis ? Tout est calme. Paisible. Je n'entends plus les cris ; les pleurs... Où est Seb ? Je le cherche autour de moi. On est à l'appart'. Je vois sa tignasse brune sur le canapé. Ah, le voilà. Je m'approche. Je veux lui parler, mais aucun son ne sort de ma bouche. Pourquoi je ne peux pas parler ? Je retente, tout en m'approchant pour le voir de face.

Isia : Seb... ?

Ma voix n'est qu'un filet faiblard et rauque. Pourquoi j'ai si mal quand je parle ? J'entends qu'on me répond, mais ce n'est pas sa voix à lui. Une autre, masculine aussi, et inquiète.

La voix : Mademoiselle ? Vous m'entendez ?

Je décide d'ouvrir les yeux. Un visage est penché sur moi. J'entends de nouveau les cris, mais aussi des sirènes de police et de pompiers. Où est Seb ? Je tente de formuler ma question, mais rien ne sort.

La voix : Ne vous inquiétez pas, vous êtes en sécurité, maintenant. Rester calme, tout va bien, on va s'occuper de vous.

Mais je m'en fiche. Je veux voir Seb. Où est-il ?

Isia : Sebastian...

Le visage semble se crisper, je ne comprends pas. Est-il... ? Les larmes me montent une nouvelle fois aux yeux. Non. Impossible. Je ne veux pas y croire. Le visage détourne ma question.

La voix : Restez calme, on va vous amener à l'hôpital. Ça va aller, vous êtes hors de danger.

J'ai dit que je m'en fichais. Je veux Seb. Juste lui. Que lui. C'est si compliqué ? Alors je ferme les yeux, là où je pourrai peut-être le voir dans mes rêves. Ceux où je suis bourrée, ceux où il m'aime, où il m'embrasse. Ceux où je me sens simplement vivante. Avec lui. Pour lui. 

Love & Fashion [TOME 1] {TERMINÉE}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant