Elias murmura un vague mot d'excuse à l'encontre de la bande, il leur promit de les retrouver le lendemain devant l'église puis il prit les jambes à son cou. Le vent lui fouettait le visage, il courait, toujours plus vite. Même s'il avait étudié le plan de Metz et se repéra avec tâtonnement. Il se dirigea tout de suite vers sa nouvelle maison. Tout son corps tremblait, il avait peur.
Peur qu'on retrouve sa trace, peur qu'il ne puisse pas achever sa mission, peur de mourir aux mains des Allemands.
Une enquête avait été ouverte, quiconque aurait des renseignements devait les remettre aux SS. L'étau se resserrait, il y avait un risque, un gros risque. Elise pouvait les trahir, ce n'était pas à exclure.
À cette idée, Elias se figea. Était-ce une mauvaise idée de retourner chez la femme ?
Non, non... jamais elle nous trahirait !
Il poursuivit sa route, serein. Des dizaines de papiers décoraient les rues. Elias décelait toutes ces feuilles qui décideraient de sa mort.
Ses mains tremblaient, il aurait voulu les arracher, mais est-ce que ce n'aurait pas été une preuve de sa culpabilité ? Il avait tué deux soldats. Ce n'était pas rien mais il ne pouvait plus revenir en arrière de toutes les façons. Et même s'il pouvait, il n'aurait pas modifié son acte. C'était lui ou eux qui y passaient.
Il ouvrit soudainement la porte de la bâtisse et les murs vibrèrent. Il jeta son manteau sur la chaise près de l'entrée et courut pour parvenir jusqu'au salon. Personne.
De délicieuses odeurs sortaient de la cuisine mais, doutant à nouveau, Elias décida qu'il était plus prudent de parler d'abord à Eugène qu'à Elise. Il grimpa les marches deux à deux, n'écoutant pas la salutation de la vieille femme et toqua avec force à la chambre de son compagnon.
Pas de réponse. Encore une fois. Elias pesta et ouvrit la porte. L'espion n'était pas là, il devait être dans la ville et à quelle heure rentrerait-il ? Aucun moyen de le savoir... Plutôt qu'attendre, il préféra se référer malgré tout à leur hôte. Même si elle pouvait représenter un danger, elle était résistante, elle ne les trahirait pas.
Il redescendit l'escalier, faisant grincer le bois. Son cœur battait encore à toute allure, ses cheveux se dressaient sur sa tête et ses joues étaient rougies par la course. Il entra en trombe dans la cuisine et se laissa tomber sur une chaise.
— Qu'est-ce qu'il se passe Elias ? demanda la vieille femme, tournée vers sa casserole, faisant mijoter des légumes.
Il ne savait pas quoi dire, comment annoncer la fatidique nouvelle, ce qu'ils redoutaient depuis leur arrivée. Devant son silence, Elise se retourna et recula devant le visage d'Elias.
— Tu t'es battu avec un tigre, dis-moi ? se moqua-t-elle.
Sa phrase mit Elias en rogne et il s'écria :
— Bordel ! Ces putains de Boches ont trouvé Louis, des affiches sont placardées partout dans la ville ! Si quelqu'un vient à apprendre que c'est moi qui ai tué ces deux nazis, je vais mourir. Et toi, tout ce que tu trouves à dire c'est que j'ai une tête de con !
Elise resta impassible et Elias se décomposa encore plus.
Pourquoi je lui ai fait confiance ? À tous les coups, elle est dans le camp des nazis.
— Je sais que tu as peur que je vous trahisse, mais ce ne sera pas le cas. Je m'étais attendue à cette nouvelle. Peut-être pas si tôt en revanche...
Elle se laissa glisser sur un siège et posa la tête entre ses mains. Ses cheveux blancs pendouillaient tristement sur son front tandis que sa peau s'était étirée encore plus que d'habitude. Son sourire avait disparu, tout comme l'éclat dans ses yeux bleus.
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Résistant
Historical Fiction18 juin 1940. Pendant des semaines, la voix du général de Gaulle résonne dans le cœur d'Elias. Un soir de septembre, prenant son courage à deux mains, il intègre la Résistance mais très vite, distribuer quelques tracts dans les rues de Londres ne lu...