Chapitre 10

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Elias suait corps et âme. Son entraînement venait de commencer, toutefois il était déjà exténuant. S'il n'y avait pas eu sa volonté de partir en France, il aurait volontiers abandonné, laissé tous ses rêves de côté. Mais non... Il devait résister.

À quelques mètres, Louis soulevait un poids lui aussi. Son visage était rouge et tendu pendant que ses bras se gonflaient. Malgré les muscles qu'il décuplait, l'haltère retomba sur le sol dans un bruit sourd. Plusieurs ricanements s'élevèrent dans la pièce, les résistants regardèrent le jeune homme puis se détournèrent. Ce dernier restait souvent à la traîne, il n'avait pas la puissance d'Elias, mais une volonté de fer qui lui permettait tout de même de rester en lice. Il se rattachait à la perspective d'aider ses compatriotes.

Dès leur arrivée, les apprentis avaient été séparés en groupes distincts en fonction de leur nationalité et de leur sexe. Une grande partie d'entre eux était des Anglais qui souhaitaient aider leur pays, mais il y avait également une dizaine de Français réfugiés à Londres et dans ses environs.

Sitôt le repas avalé, les informations avaient plu sur les futurs espions, ils avaient ensuite commencé la routine qui allait être la leur pendant de longs mois.

Elias n'avait pas fait de rencontres pendant cette première semaine. Les hommes qui se connaissaient déjà étaient restés entre eux, les deux amis n'avaient pas échappé à la règle. Pourtant, il sentait que cela lui portait préjudice de passer du temps avec un faible. Il essayait de s'éloigner un peu de Louis, mais ce n'était pas chose simple.

Il effectua le tour de la pièce du regard. Dans la salle de sport, seules les respirations haletantes se faisaient entendre, pas une conversation. Ses yeux rencontrèrent ceux d'un grand résistant, lequel semblait être un peu plus âgé qu'Elias. Alors que ses prunelles vertes lançaient des éclairs de défi, son visage se contractait à cause de l'effort.

Un courant invisible passa entre les deux hommes, comme une déclaration de guerre. Elias trouva tout de suite ce garçon antipathique et il eut envie d'écraser son faciès sur une plaque de bois pour lui faire perdre sa superbe.

La hache venait d'être déterrée.

Soupirant, Ailes chercha des visages plus amicaux, des sourires ou des hochements de tête parmi les autres espions. Un groupe semblait s'être formé près du tapis. Il pesa le pour et le contre. Devait-il laisser son ami ?

— Je ne prendrai jamais mon envol sinon... marmonna-t-il entre deux respirations.

Tandis que Louis l'observait, il marcha à grands pas vers les hommes en regardant droit devant. Puis, il engagea la conversation comme si de rien n'était. Ils l'accueillirent avec moults sourires ; leur compagnie était bien plus agréable.

***

Deux semaines plus tard, une grande partie des espions partirent vers l'Écosse pour aller dans un nouveau camp. Certains n'avaient pas réussi leur premier entraînement, ils avaient quitté l'équipe de leur plein gré, le visage cerné, poussés à bout.

Elias, pendant ces dizaines de jours de musculature, s'était considérablement renforcé. Il n'hésitait pas une seule seconde avant d'afficher à quiconque ses biceps. Il en était très fier.

Un seul voile à l'horizon... L'un des chefs du nouveau camp était un vétéran de la première guerre mondiale, il en avait vu des vertes et des pas mûres à Verdun... Il ne se laissait donc pas impressionner par des gamins, nom qu'il donnait aux apprentis. Ainsi, il n'hésitait pas à punir ces derniers avec rigueur.

Ailes s'était fait reprendre plusieurs fois, malgré ses piètres tentatives d'être irréprochable. Le major n'appréciait pas la virilité de son caractère. Dès qu'il exhibait ses pectoraux, il écopait d'une restriction de nourriture.

RésistantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant