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8. Le prince

Un petit garçon se penche au-dessus de moi. On dirait un ange joufflu.

Le soleil joue avec ses boucles blondes et fait comme une auréole autour de son petit visage.

« Tu fais la sieste ? il me demande. Moi, j'aime pas la sieste. C'est pour les bébés.»

Je me redresse sur un coude et cligne des yeux. Je rêve ou il ressemble au petit prince de Saint Exupéry ?

« Qui es-tu ? je regarde tout autour pour savoir si ses parents sont à proximité.

- Je suis Théo, j'ai ça.

Il me plante presque sa paume de main sur le nez, je louche devant ses quatre doigts pointés vers le ciel.

- Presque et demi ! il précise.

- Quatre ans et demi, je conclue d'un hochement de tête. Moi, je m'appelle Roxanne.

- On joue ? Mon papa peut pas, il doit défaire des cartons. On en a une montagne, grande comme comme ça ! il accompagne le geste à la parole en se mettant sur la pointe des pieds avant de sauter sur place.

Je pense au camion de déménagement que j'ai aperçu en venant.

- Tu es mon nouveau voisin, alors ! Ton papa sait-il que tu es ici ?

Théo se balance d'un pied sur l'autre.

- Il m'a dit d'aller jouer dans le jardin et j'ai vu un trou ici.

Il désigne la haie qui délimite nos deux jardins. Entre les arbustes, des branches moins fournies et un léger dénivelé laisse entrevoir un passage assez étroit pour s'y faufiler en rampant.

- C'est le trou d'Alice, il sourit. Mais j'ai pas vu de lapin avec une montre. Je t'ai vue, toi. Tu veux jouer ? Tu as des « tites » voitures ?

Je souris, il est trop mignon.

- Non, je n'ai pas de petites voitures. Hé, ne vas pas si près de l'eau !

Je me précipite à sa poursuite alors qu'il court vers la piscine. Je l'attrape par le bras avant qu'il ne se penche trop et tombe dans l'eau. La maison et le jardin datent un peu, je dois absolument penser à faire installer des barrières pour la sécurité des enfants si Théo prend l'habitude de venir ici en cachette. Il ne manquerait plus que quelqu'un se noie parce que je n'ai pas eu le temps de faire de petits travaux. Je dois le mettre en haut de ma liste de choses à faire et regarder si j'ai le budget.

- Je dois aller travailler, Théo. Je vais te raccompagner chez toi.

- Nan ! Je veux nager.

- Je t'inviterai une autre fois à goûter, on fera un gâteau. Quel est ton gâteau préféré ?

- Un gâteau ? Avec des paillettes en sucre de toutes les couleurs ?

- D'accord, je ris en lui prenant la main pour le raccompagner chez lui.

- Tu promets ?

- Je promets.

Nous sortons de chez moi, descendons l'allée vers la maison voisine. Le son d'une perceuse siffle dans l'air et les odeurs de peinture nous prennent à la gorge quand nous pénétrons chez Théo. Le couloir est encombré et nous zigzaguons entre de hautes piles cartons. Je le suis alors qui se faufile sans avoir peur qu'une caisse ne lui tombe dessus au moindre écart.

Théo me fait signe de le suivre vers le premier étage. J'hésite avant de monter l'escalier à mon tour. L'étage est également tapissé de cartons à peine ouverts.

- Mon papa ! dit Théo en montrant du doigt quelqu'un dans une des pièces.

- Bonjour, je suis votre voisine ! j'essaie de m'annoncer mais le bruit de la perceuse est trop fort pour qu'on m'entende.