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Oliver

« - Mmhhhm....

Mes paupières étaient lourdes. Les souvenirs de la soirée de la veille me revenaient petit à petit. J'avais peut-être un peu bu. Un peu trop peut-être alors même que la rentrée approche. Je passe une main dans mes cheveux. En bataille, comme à mon habitude, j'ai grand mal à les coiffés. Une trace de bave se dessine au coin de ma bouche. Mec, c'est dégueulasse !

De violentes courbatures m'assaillirent d'un peu partout. Peut-être à cause du match d'hier après-midi. Avec mon mètre quatre-vingts, je n'étais ni le plus grand ni le plus petit mais je ne me débrouillais comme personne sur le terrain. Mes yeux bruns, presque noirs, sont vif et me permettent de repérer chacun des mouvements effectués par les autres joueurs présents.

Mon regard se porte sur la figure d'Albert Einstein. J'adore la science, je suis intelligent, mais je déteste le montrer. Parfois les gens agissent par intérêt lorsqu'ils l'apprennent. Et honnêtement... je me fout un peu de mes résultats scolaires.

Je suis le type de mec que tout le monde envie, pour ma beauté, ma popularité et le mystère qui m'entourent, et vous allez me dire, assurément, que je suis un de ces garçons charmeurs et qui n'a d'intérêt pour personne. C'est le cas. Je me lasse si facilement, pas par choix, non. Simplement je ne suis pas fait pour ressentir de l'amour envers quelqu'un. Ou du moins je n'ai pas trouvé celle qui me fera aimer. Toutes les filles sur lesquelles je suis tombé m'ont toutes insupportées, superficielles, braillardes et pleines de problèmes. Comme si moi je n'en avais déjà pas assez. Avec elles je ne faisais que m'amuser.

Je porte de nouveau mon regard sur mon réveil. Il affiche neuf heures... NEUF HEURES ? Je suis en retard ! Ce n'est pas ce qui m'embête le plus mais je ne supporte pas de me sentir perdu et je sais que si je n'arrive pas à temps au lycée, je serais paumé. Mon sens de l'orientation me fait grandement défaut. A tel point que lorsque nous avons emménagés, je me suis perdu en essayant de rentrer chez moi. On va dire que rien n'est vraiment simple car j'ai récemment changé d'école. J'étais en privé, et on va dire que l'on m'a attrapé à une soirée organisée par les terminales. Encore ça aurait pu être pardonné mais j'avais bu. J'ai ignoré les appels des flics lorsqu'ils m'ont demandé de m'arrêter. Je ne voulais pas risquer de causer de problèmes à ma mère. Et puis merde, je me suis pris un refus d'obtempérer dans la gueule. Du coup, j'ai fini en public.

Ma mère quitte souvent la maison pour son travail. Elle est assez rarement présente. Elle travaille comme sénatrice et voyage beaucoup et pour ce qui est de mon père, ou plutôt de ce qui était... Il est mort quand j'avais treize ans. Depuis l'eau a coulé sous les ponts, même si on ne supprime pas une peine aussi facilement.

J'enfile rapidement un t-shirt, un jean et des baskets. Je ne prends pas le temps de coiffer mes cheveux et attrape en coup de vent mon blazer en cuir noir.

En bas, il flotte dans l'air une odeur de gaufres. Elles traîne dans une assiette sur la table. Nature. C'est comme ça que je les aime. Je m'empare de l'une d'entre elle et fonce jusqu'à ma moto. Noire et saillante. Je l'enfourche et démarre. Sur la route, le paysage californien est rafraîchissant, il entraîne presque une brise de nouveauté et d'apaisement en moi. Le ciel, d'un bleu cobalt, presque trop foncé, m'inspire toute la profondeur de l'immensité des cieux. Et le champ des cigales dans les fourrés sèches, me ramène dans mon enfance.

Il me semble me souvenir de cheveux roux, seulement c'était il y a si longtemps.

J'arrive enfin sur le parking du lycée. Sur mon passage, quelques têtes se retournent. Il y a très peu de personnes. Je suis encore en retard. Je gare ma bécane, place mon casque sous mon bras et marche d'un pas assez rapide vers l'accueil de l'établissement. C'est là qu'une femme assez âgée me jauge de ses yeux pervenche et me demande ce que je fais là.

« - Jeune homme, n'êtes-vous pas censé avoir rejoint votre classe il y a de cela plus de trente minutes ? Vous êtes en retard ! Et ce pour le jour de la rentrée ! J'espère que ça ne se reproduira pas dans le futur. Bien votre nom s'il vous plaît.

- Oliver madame, Oliver Woods. Je rentre en terminale. Euh.... Si vous ne trouvez pas mon nom c'est parce que je suis un nouvel inscrit. Lui répondis-je.

- Ah, je ne te trouve pas, me dit-elle en plissant les yeux sur la feuille ou tout était écrit en petites lettres serrées.

Je lui pointe du doigt la fin de l'alphabet où se situe mon nom de famille.

- Là. Woods, madame.

Et elle me remercie puis m'indique le numéro de ma salle et le chemin à prendre.

- Je vais vous y conduire. Restez derrière moi, en silence s'il vous plaît. »

Les couloirs sont vides et les rangées de casiers se succédent. Tous les huit rangs on avait le droit à un changement de couleur. Beige, vert pomme, orange, rouge...

A m'en donner le tournis. Ce qui est sûr, c'est qu'il ne faut pas être épileptique dans cette école.

Ils auraient pu paraître lugubres, ces couloirs, si seulement la lumière ne passait pas par les grandes fenêtres donnant une vue imprenable sur le terrain de foot. Un sport que je ne pratiquerais pas.

La C.P.E, m'emmène jusqu'à une porte jaune citron et frappe trois coups distincts. Un silence presque pesant se fit puis la porte s'ouvrit. Mon visage se pare de mon meilleur sourire ravageur et moqueur et j'entre. Une femme se tient à côté de l'entrée et se met à discuter avec Mme.Swan.

Mon regard se promene sur les personnes présentes dans la salle. A vrai dire, je n'eus pas à beaucoup bouger pour que l'on me remarque. Les leurs étaient déjà tous fixés sur moi. Tous, à part un. Un seul, je n'aperçois de cette personne, que ses cheveux roux. Elle est tout au fond de la salle, elle dessine. Comme si rien d'autre n'existait autour d'elle. Comme s'il n'y avait qu'elle et ces pages blanches qui attendent patiemment d'être remplies.

Elle dut sentir mon regard posé sur sa nuque car elle relève vivement la tête. Ses yeux accrochent les miens. De manière vive et inoubliable. Ils sont d'un vert profond. Presque pailletés. Comme une forêt emplie de fées. Une ambiance chimérique. Irréelle.

Elle rompt cette image en haussant un sourcil nonchalamment et en replongeant dans son œuvre d'art.

Quant à moi, je me sens retourné. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai très certainement l'air d'un idiot là, planté au milieu de la pièce les bras ballants. Par ailleurs mon professeur m'interpelle à plusieurs reprises. Je ne reprends mes esprits qu'après un court flottement. Et les autres élèves ont l'air dans l'incompréhension totale. Il m'indique une place, à l'opposé de cette fille aux yeux saisissants. Et je ne sais toujours pas pourquoi mais ça me dérange.

Je m'y assois et sors mes affaires de mon sac. Le cours commence. Il est lent. Je connais déjà toutes ces notions. Je m'ennuie, donc je me met en tête d'observer mon entourage. Quand je me retourne pour regarder ce que les autres font, je vois que toutes les filles ont les yeux tournés vers moi et me détail de haut en bas. Il n'y a rien de plus agréable, de savoir que je fais de l'effet. Mais encore une fois, quelque chose me pousse à me tourner vers cette silhouette fine et pâle. Elle. Elle est la seule à ne pas me regarder. C'en est frustrant. Je fais un clin d'œil à mes camarades de classes qui détournent immédiatement le regard et je retourne à mon travail. Je soupire en passant une main dans mes cheveux. L'heure est longue. Trop longue. 

A nos cœurs brisésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant