Prologue

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Avant propos : seule le début de l'histoire est disponible sur Wattpad dans sa version brute, non corrigée.
La version intégrale a été publiée par les éditions Addictives 😍😘

« Apprends à écrire tes blessures dans le sable et à graver tes joies dans la pierre »

Lao-Tseu

Juillet 2016

J'observe les doigts de Georges se plier et se déplier avec amertume sur les coutures du volant en cuir de sa décapotable. Il roule vite dans les rues de Seattle. Mes cheveux frappent mon visage face à l'air qui s'engouffre dans l'habitacle. Instinctivement, je me cramponne, d'un côté à la ceinture de sécurité, de l'autre à la poignée de la porte. Je sens la colère de Georges gronder, s'amplifier à mesure que le temps s'écoule. Je n'ai aucune idée de ce qui l'a mis dans cet état-là. Je pensais pourtant que le dîner dans ce grand restaurant du centre-ville lui avait plu. Il a tout dévoré, leur souris d'agneau aux cèpes était délicieuse, leur vin succulent, nous en avons consommé une bouteille. Je me demande d'ailleurs si nous n'aurions pas dû prendre un taxi pour rentrer. Je tente de faire la conversation :

— Ça faisait longtemps que je n'avais pas aussi bien mangé !

Je tapote mon ventre qui essaie de se faire une place dans ma robe moulante.

— Pourquoi ? Lorsque tu restes dormir chez moi le week-end, ma cuisine n'est pas assez bonne pour toi ? éructe-t-il immédiatement.

Je me tends, frappée de plein fouet par le ton acrimonieux qu'il a employé. Je n'hésite pas une seconde :

— Je peux savoir ce qu'il se passe ?

A la lueur des réverbères, je le vois prendre une grande inspiration avant de saisir ma main et d'y déposer un baiser. Je m'apaise aussitôt.

— Désolé BB, je pense à la semaine de dingue qui m'attend. Tu connais mon père, il ne me lâchera pas d'une semelle.

Bien entendu, je connais son père. Marchand d'Art de renommée internationale, au même titre que le mien, il possède aussi de nombreuses galeries dans plusieurs États. S'il parait extrêmement agréable et avenant de prime abord, je sais, de ce que m'en a déjà dit Georges, que ça n'est pas un homme tendre. Je ne comprendrais jamais ces gens qui ont un besoin maladif d'attester de leur supériorité, d'utiliser la violence pour obtenir ce qu'ils veulent, de s'en prendre aux plus faibles. Et surtout, de battre sa propre chair, le sang de son sang, sans raisons. Comme je ne comprends pas comment Georges a tout de même marché dans les pas de son père pour aller travailler à ses côtés. 

Je resserre mes doigts sur les siens pour lui faire entendre que je suis là et passe à autre chose :

— Je pourrais essayer de te refaire ce délicieux crumble aux pommes...

C'est instantané. Sa poigne sur ma main se fait si forte que j'en crie de douleur.

— Georges ! hurlé-je, arrêtes ! Tu me fais mal !

Je me tords pour me dégager de sa prise. Mes phalanges s'écrasent entre elles, mes doigts craquent. Je hurle encore plus fort, les larmes me montent aux yeux.

— Je ne veux plus entendre parler de ce putain de restaurant ! enrage-t-il. Si nous n'étions pas partis, le serveur t'aurait baisée devant moi sur la table !

Il me libère enfin. Je niche ma main contre ma poitrine et m'écrase contre la portière, le plus loin de lui. Qu'est-ce qu'il a dit ?

— C'est de ta faute, insiste-t-il. Tu as vu comment tu es fringuée !

Je ne peux m'empêcher de me regarder : je porte une robe noire qui tombe à mi-cuisse avec une veste de tailleur beige et des escarpins de la même couleur. Rien d'affriolant. Je pense avoir déjà mis plus court et plus clinquant. Je regarde Georges de nouveau.

Fight & DealOù les histoires vivent. Découvrez maintenant