Chapitre 12 : Jamie

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« Tout est écrit dans les sons. Le passé, le présent et le futur de l'homme. Un homme qui ne sait pas entendre ne peut écouter les conseils que la vie nous prodigue à chaque instant. Seul celui qui écoute le bruit du présent peut prendre la décision juste. » Paulo Coelho





Qu'importe que nous soyons dimanche, l'heure à laquelle je me suis couché ou que j'ai pu mal dormir, mon réveil sonne à la même heure que tous les autres jours de la semaine.

Six heures du matin.

Et comme tous les matins, c'est le même rituel. Sitôt un pied en dehors du lit, après de longues minutes d'étirement et une rapide toilette, je rejoins la salle de boxe sous mon appartement pour deux heures d'entrainement intensif.

Bien entendu, à cette heure-ci, elle est vide. Le seul avantage d'habiter au-dessus et d'en être le proprio, c'est de pouvoir en user à sa guise, sinon, ça ne présente que des inconvénients. Le moindre pépin – le chauffe-eau en panne, une ampoule grillée par exemple – et on sait où me trouver.

Temporairement, je n'ai pas le choix.

Le lundi, le mercredi et le dimanche c'est tapis de course, les autres jours, c'est rameur. Pour garder l'endurance, et pour voir bien plus loin, pour maintenir un rythme dans une vie où je n'ai pas beaucoup de marge de manœuvre, où la plupart des choses me sont imposées.

Et même cette semaine, alors que j'ai choisi ce job chez Vic, j'ai l'impression que tout le reste m'échappe, de ne pas avoir la main sur tout. Je bosse pour elle parce que je le veux, et pourtant, je ne le devrais pas. Je prends des risques avec son ex dans les parages. Comme je prends des risques en m'impliquant dans sa vie.

Je prends mon temps pour me laver, pour me préparer, pour déjeuner et finalement à dix heures, je ne tiens plus. Je décide de faire un détour par la librairie du quartier, une idée bien précise en tête. Je n'arrive toujours pas à comprendre comment elle a pu croire un seul instant que son ex ne reviendrait pas, qu'elle serait à l'abri.

Et tant bien même, son ex n'est pas le seul connard sur Terre. Il en existe tellement. Ma mâchoire se contracte. Je mets gaze sur la moto. On devrait initier toutes les femmes au self-défense dès leur plus jeune âge.

Je me gare dans l'impasse où donne la porte de service de son bâtiment. Je coupe le moteur, ôte mon casque et lève la tête vers le ciel en quête d'une brise d'air qui pourrait me revigorer. Rien ne vient. Bien sûr puisque c'est un cul de sac. Une poubelle dans le fond, peut-être long de 6 mètres mais juste assez large pour que je puisse garer ma bécane et circuler autours.

À ma montre il est à peine onze heures. Tant pis si je suis en avance, je rejoins la porte de service et sonne à l'interphone. Quelques secondes plus tard, un point vert dans un cadran noir s'allume et me fait réaliser que je suis filmé. J'entends Vic geindre :

— Tu as une heure d'avance !

Pour une fois...

— Je sais. Ne te presse pas, je t'avertissais juste que j'étais en bas.

Quand on sait les deux derniers jours qu'elle vient de passer, on peut qu'imaginer qu'elle ne doit pas avoir l'esprit tranquille. Qu'importe qu'elle veuille l'avouer ou non, je suis sûr qu'elle doit être soulagée de me savoir en bas.

Comme je ne m'attends pas à ce qu'elle me fasse monter, je rejoins ma moto et sors mon téléphone. J'envoie un message à Isaac :

[ Toujours ok pour la caisse de ma patronne demain ?]

Un bruit strident me fait lever la tête de mon écran. Il provient de la porte de service. Elle est d'ailleurs ouverte maintenant. Vic se tient juste dans son encadrement.

Fight & DealOù les histoires vivent. Découvrez maintenant