Chapitre 15 : Vic

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« Si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde. » Antoine de Saint-Exupéry

Je suis en bas de chez ma mère à 15h précises. Jamie est là lui aussi. Et à en croire son casque posé sur la selle de sa bécane et à sa position près de celle-ci : les mains dans les poches et le visage levé vers le ciel, ça fait déjà un moment. Je prends le temps de l'observer tout en le rejoignant. La luminosité de l'après-midi accentue l'angle saillant de sa mâchoire qu'une légère repousse recouvre. Même si ébloui par le soleil, il a les sourcils froncés, il parait détendu, serein. Comme s'il se réjouissait du moment présent.

Comme si son passage ombrageux de ce matin n'avait jamais existé.

— Mais c'est que tu es à l'heure, ne puis-je m'empêcher de faire remarquer une fois à sa hauteur.

Il quitte le ciel des yeux et m'offre un regard badin. Je siffle.

— Et en plus tu souris.

Il arque un sourcil, la mine joueuse.

— Assez parlé. J'ai un rendez-vous important dans une demi-heure.

C'est immédiat, je fais les calculs dans ma tête.

— Et ma voiture ? Nous ne devions pas récupérer ma voiture ?

Je vois bien au pincement de ses lèvres qu'il se retient de rire. Dois-je me sentir rassurée ?

— Monte !

Il me tend mon casque, puis enfile le sien avant de grimper sur sa moto. Je l'imite et m'installe derrière lui.

— Alors ? Ma voiture ? Tu ne comptes pas me jeter au garage comme un vulgaire paquet ?!

Cette fois-ci, il ne se retient pas de rire. Son corps s'agite sous ma main, son dos effleure ma poitrine, une douce chaleur s'insinue en moi, je me surprends à sourire. Heureusement qu'il ne me voit pas, il pourrait se vanter de me faire du bien ou que je puisse aimer ça...

Dans un cas comme dans l'autre il aurait raison.

Nous démarrons. Et comme ce matin, je me laisse aller contre lui. J'ai confiance en lui et même pire, je me sens en sécurité avec lui. Et c'est mal. Parce que je pourrais bien m'y habituer et ne plus vouloir le laisser me quitter. Ça se rapproche un peu de l'idée qu'il se fait de ne surtout pas avoir une petite amie. Moi aussi je refuse d'avoir quelqu'un.

Je suis si préoccupée à jauger mes sentiments, que je remarque tardivement le quartier dans lequel nous nous trouvons. Je vois déjà l'école de Charlyne au loin.

— Nous n'allons pas au garage ?

Pas de réponse. Il ralentit et je comprends soudain son silence. Garée sur une place de parking, ma Mustang est là. Mon cœur cadence vite et fort. Je laisse à peine le temps à Jamie de couper le moteur de sa moto et en saute littéralement. Je pousse des cris de joie tout en faisant le tour de ma voiture. Il n'y a pas moins d'une semaine se trouvait une vilaine balafre sur sa carrosserie. Aujourd'hui, sa calandre luit sous les rayons de soleil. Elle est comme neuve. Comme si ce fameux incident n'avait jamais eu lieu. Pourtant, il me suffit de regarder Jamie, bien entré dans ma vie, pour me souvenir.

Au-delà de ce que représente cette voiture à mes yeux, c'est aussi le symbole de ma liberté ! Qu'importe que je puisse aimer me balader à moto avec Jamie, j'ai besoin de savoir que mon bien-être ne dépend pas d'une personne ou pire... d'un homme.

Et ma réflexion, là, maintenant, ne veut rien dire quand Jamie me rejoint d'un pas assuré, la mine insolente. Il est grand, beau, sexy. Je me fige, le souffle court mais le cœur galopant. Je me mords la lèvre pour m'éviter de sourire. Sa surprise a fonctionné, il m'a rendue heureuse. Jamie est enfin devant moi, je le laisse défaire la sangle de mon casque. Ses doigts effleurent mon cou. Je frissonne.

Fight & DealOù les histoires vivent. Découvrez maintenant