Chapitre 17 : Vic

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« Ne demandez jamais quelle est l'origine d'un homme ; interrogez plutôt sa vie, son courage, ses qualités et vous saurez ce qu'il est. Si l'eau puisée dans une rivière est saine, agréable et douce, c'est qu'elle vient d'une source pure. » Abd El-Kader





Je n'ai pas voulu laisser ma Mustang devant le Cupcake & Coffee. Même si sur le coup ça relevait du bon sens – juste au cas où Georges reviendrait – lorsque Jamie m'indique de me garer dans une ruelle tout près d'une salle de boxe, je ne peux m'empêcher de me dire qu'elle pourrait toujours me permettre de partir vite en cas de besoin.

L'idée me traverse mais je n'ai pas peur. Pour l'instant, du moins.

Tout le monde sait ce qui se trouve dans un lieu comme celui-là. En dehors d'un ring et de sacs de frappes, bien entendu... nous avons des hommes, de la testostérone et des muscles ! Adieu les T-shirt et les pantalons, ici, les bites se baladent dans des shorts extra-confortables et il n'y a pas besoin d'avoir la vue d'un pilote d'avion pour savoir à chaque saut dans les airs de quel côté elles se promènent !

Et je vais devoir subir ça pendant... aucune idée. En tous cas, maintenant je sais quelles obligations le poussaient à partir vite : ses entrainements ? des cours ? Je me souviens qu'il a vaguement abordé le sujet avec Matthew hier.

— Ça va aller ? demande Jamie lorsque je sors de ma voiture.

C'est une blague ? Il ne s'est pas préoccupé une seule fois de mon état alors que mon commerce a été saccagé, et là, soudainement, mon bien-être est son centre d'intérêt ? Ou alors il m'emmène ici pour m'entrainer comme je le lui ai demandé. Au lieu de répondre à sa question j'en pose une autre pour être certaine de ses intentions :

— Ça dépend... Tu en as pour longtemps ? Parce que sinon, je peux t'attendre dans ma voiture.

— Mais de quoi tu parles ? s'interloque-t-il avant de suivre des yeux mon regard. Tu penses que nous allons à la salle ?

Il se met à rire.

— Non, reprend-il. Enfin pas toi. J'habite juste au-dessus.

Au moins la réponse est claire, il n'a aucune intention de m'apprendre à me défendre. Et pire que tout, j'ai bien compris que j'allais passer une partie de ma soirée toute seule. Je me renfrogne mais hors de question qu'il le remarque. Je baisse tête la première dans la voiture afin de prendre mon sac de fortune sur le siège passager. Sitôt de nouveau en dehors du véhicule, Jamie tente de me le récupérer. Je lui arrache fermement la lanière des mains.

Finalement, il sait que je suis agacée.

Il est la goutte d'eau de toute cette journée. Et j'ai beau essayer de trouver des choses positives, comme ma Mustang, comme le comportement anormal de ma mère, ou le fait de passer la soirée avec Jamie – et merde, ce dernier n'a rien à faire là – je n'arrive pas à me débarrasser de cette colère.

Je suis en colère parce que je me sens obligée de partir de chez moi faute de m'y sentir en sécurité. Je suis en colère parce qu'une nouvelle fois ce connard de Georges vient saccager ma vie et on ne peut rien contre lui. Je suis en colère parce que je vais avoir besoin de Jamie pour ne pas me sentir vulnérable.

Et après ? Après je ne veux pas avoir peur. Alors autant nourrir ce monstre en moi que de le laisser s'apaiser pour ensuite se faire bouffer par la terreur.

— Je te suis, dis-je à Jamie les dents serrées. 

Il pousse un soupir lourd de sens. Il doit me voir comme quelqu'un d'inconstant, de capricieuse, de folle, et je l'emmerde. Aussi lorsqu'il se retourne, je tends mon majeur en l'air. Je marche dans ses pas jusqu'à la porte de l'immeuble accolée à la salle de Boxe dont l'enseigne au-dessus de l'entrée indique The Last Round. Les vitrines sont martelées, et cachent tout ce qui se passe dedans. Néanmoins, grâce à la lumière à l'intérieur, je peux distinguer des formes. Il y a du monde.

Fight & DealOù les histoires vivent. Découvrez maintenant