Prologue

41 3 0
                                    

L'oiseau était magnifique.

Minuscule,aussi.

Des ailes à la symétrie parfaite, aux plumes bleues. Un minuscule petit corps d'un vert paon, avec une touche de bleu roi sur la gorge et sous les yeux, dans un superbe dégradé. Un bec long et fin, presque rose. Des petits yeux noirs.

Le colibri faisait du surplace dans le coin le plus reculé du plafond.Il tournait le dos au mur, observant le reste de la pièce avec prudence.

Le Dr Shwavsky était admiratif, mais pas seulement de toute cette beauté. De cette intelligence, également. Les colibris étaient réputés pour être des oiseaux très intelligents, mais celui-ci dépassait tout ce à quoi il s'attendait. Lorsqu'il avait vu l'homme rentrer dans la grande pièce blanche, épuisette en main, l'oiseau s'était éloigné immédiatement de l'unique pot de fleurs qui décorait la pièce pour se mettre à l'abri dans ce petit coin éloigné.

Le chasseur commençait à s'impatienter. Il était petit, et même en sautant ne parvenait pas à atteindre le colibri. Celui-ci ne prenait même pas la peine d'esquiver. Il donnait même l'impression de le narguer.

Le chasseur sauta une nouvelle fois en l'air, le bras tendu, l'épuisette à bout de bras. Cette fois-ci, il fut suffisamment proche de l'oiseau pour que celui-ci soit contraint de se déplacer légèrement sur le droite.

Le chasseur se tourna vers le miroir sans teint derrière lequel se trouvait le Dr Shwavsky. Le visage rouge de colère, les lèvres pincées, l'épuisette tenue à deux mains, le chasseur aboya :

-Quand allez-vous passer à la suite ? Je n'ai pas payé pour me faire ridiculiser par un oiseau !

Shwavsky eu un sourire moqueur, moquerie qui ne transparut pas dans sa voix lorsqu'il enclencha le micro pour répondre :

-Nous garantissons la chasse, pas sa réussite, rappela-t-il d'un ton froid.

Comme le chasseur semblait au bord de l'apoplexie après cette remarque, il reprit :

-Je vous envoie la suite.

Il appuya sur un bouton. Le sol se modifia autour du chasseur, se soulevant par endroit pour former de petits murs d'une dizaine de centimètres de hauteur. Un labyrinthe se formait sur le sol de la pièce, et à son extrémité : une sourire blanche.

Celle-ci reniflait, ses petites moustaches s'agitant dans tous les sens.

-Enfin!s'exclama le chasseur.

Shwavsky ricana. Ce type n'était pas parvenu à ses fins avec une seule cible, alors avec deux ? Il n'avait aucune chance.

Shwavskyse rassit sur son siège en cuir, observant l'attitude de la souris.Elle était prudente : plutôt que de foncer dans l'inconnu,elle avançait avec précautions, reniflant à chaque intersection.Manque de chance pour elle, le chasseur ne pouvait pas ne pas la voir de sa position.

-N'oubliez pas, rappela Shwavsky, vous ne devez pas utiliser l'épuisette pour la souris.

Le chasseur se renfrogna. Les règles des chasses étaient strictes, et s'il ne les respectait pas, il serait sorti de la pièce sans possibilité de discussion.

Il rangea l'épuisette dans le harnais qui se trouvait dans son dos. La souris, il devait la piéger avec des graines de maïs, de blé et d'orge. S'il y parvenait, si la souris convulsait sous l'effet de la mort au rat dans lesquelles les graines avaient été trempées, il gagnait. Dans le cas contraire, à la fin du temps imparti – soit plus que quinze minutes – il perdait.

Jusque-là,personne n'avait réussi à piéger cette souris, qu'elle soit seule ou en duo avec le colibri.

D'ailleurs,très vite, ce que Shwavsky attendait arriva. La souris se rapprochait des graines ; le colibri passa à l'action.

Il plongea, battant de ses ailes à une vitesse incroyable même pour lui. Dans ses minuscules pattes, il saisit la souris par la queue et repartit dans les airs.

Shwavsky éclata de rire. Le chasseur ne l'avait pas vu venir, comme tous ceux qui étaient passés avant lui. Comme tous, il avait sous estimé la force de l'animal, la supposant aussi faible que celle de son homologue sauvage.

Dès lors, la suite de la chasse se passa comme il s'y attendait. Le colibri faisait tous les efforts possibles pour éviter l'épuisette,la souris donnait des coups de patte lorsqu'elle se rapprochait trop,la déviant de son objectif. Le chasseur s'énervait de nouveau,rendant ses gestes d'une prévisibilité affligeante.

Bientôt,la sonnerie retentit. Une grille descendit du plafond, séparant le chasseur de ses proies mais surtout les proies de la porte. Il jeta son épuisette au sol avec rage avant de sortir d'un pas lourd.

Shwavsky saisit les dossiers déposés devant lui. A gauche, celui du colibri.Ici, ils l'appelaient Titi. Elle était née Natalia Flores. Une véritable merveille. A droite, celle de la souris. Bianca. Ils ne connaissaient pas son véritable nom, personne ne le connaissait,même pas elle.

Les métamorphes reprirent leur forme humaine.

Bianca était une petite femme blonde un peu boulotte – certains diraient pulpeuse - , ce qui était étonnant vu le mode de vie des métamorphes dans la cage. Ils n'étaient pas affamés, loin de là,mais il était surprenant de voir cette petite femme avoir plus de formes que nécessaire en captivité.

Titi était une grande femme fine, aux courbes légères. Ses beaux cheveux bruns retombaient généreusement sur ses épaules. Elle était aussi belle là qu'en tant que colibri.

Shwavsky ne l'avouerait jamais à Jafar, son patron, mais depuis le temps qu'il étudiait le comportement des métamorphes durant les chasses,il avait fini par tomber amoureux d'elle.


Prime de chasse - Chasses interdites 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant