Chapitre 19

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Emilia se laissa tomber sur son sofa, dépitée. Ce départ précipité n'était pas sans lui en rappeler un autre. Elle avisa son téléphone. Rien pas de message. Elle souffla. Des larmes lui montèrent aux yeux. Pourquoi était-elle déçue ? Elle n'avait pas arrêté de se dire qu'elle n'attendait rien de plus que de l'amitié de la part de Bly. Il ne lui devait rien. Son départ était un peu étrange. Peut-être avait-il eu une urgence. Mais pourquoi n'avait-il rien dit ? Elle s'allongea brusquement sur son canapé et hurla dans les coussins, se maudissant d'être affectée.

- Cela ne va pas ?

Elle fit un bon de deux mètres. Surprise par la voix de l'homme qui se tenait à la porte de son appartement. Il déposa les clés sur la table ainsi que les sachets de nourriture thaï qui commençaient à libérer leurs parfums épicés.

- Bon sang !! Bly ! Tu veux me faire mourir ?

- Désolé, j'ai toqué mais tu n'as pas entendu, occupée à crier dans tes coussins.

Son sourire en coin craquant n'ôta pas la gêne que ressentait Emilia. Elle baissa la tête contrite.

- J'ai cru que tu étais parti.

Il prit un air tout à fait sérieux, s'approcha du canapé et s'agenouilla pour être à sa hauteur :

- Comment je pourrais faire cela ? Il m'est impossible...

Voyant l'air troublé de la jeune femme, Bly comprit qu'il allait trop vite. Il aurait l'air d'un psychopathe s'il dévoilait ses sentiments. Il se reprit rapidement :

- ... de commander par téléphone. Je préfère voir ce que j'achète. Donc pendant ta douche je suis descendu pour prendre notre repas. Je n'allais tout de même pas te laisser mourir de faim !

Elle lui donna un coup dans l'épaule de s'être moqué d'elle et suivant son instinct, elle se jeta dans ses bras. L'étreinte ne dura que quelques secondes, mais cet instant d'éternité apaisa leurs deux cœurs.

- Mangeons avant que cela ne refroidisse.

Bly fit un effort monumental pour se dégager des bras de la femme dont il était épris. Il était encore trop tôt, il le savait, mais il avait bien le droit de profiter de ses gestes tendres.

Ils s'installèrent sur le canapé, les boîtes encore chaudes posées devant eux. Ils piochaient librement dans chacune d'elles partageant ce repas dans la simplicité et la complicité. Emilia était heureuse de passer cette soirée avec lui. Elle avait oublié le plaisir des soirées à deux. Elle se surprit à considérer Bly comme son amoureux. Elle se secoua intérieurement et se rassura en se disant que l'on pouvait aussi faire ça entre amis. Elle pourrait aisément faire de Bly un très bon ami. Il était si facile de s'attacher à lui. A la fin du repas, elle souhaita prolonger la soirée et ils regardèrent ensemble un vieux film. Machinalement, elle s'installa contre lui et Bly de son côté lui ouvrit grand les bras pour qu'elle s'installe. Ainsi pelotonnée contre lui, elle se laissa emporter par la torpeur. Le confort et la fatigue fermèrent ses yeux avant la moitié du film.

Le loup de Bly jubilait. Elle dormait dans ses bras. L'homme comme l'animal se sentit apaisé. Attrapant un plaid posé sur un accoudoir, Bly couvrit Emilia. Il éteignit la télévision et se focalisa uniquement sur la jeune femme, admirant ses traits fins et délicats. Sa bouche rosée exhalait un souffle doux et régulier. Il songea qu'il aimerait l'embrasser, sentir encore ses lèvres sur sa peau. Elle bougea un peu dans son sommeil pour venir glisser son petit nez contre son cou. Cette proximité le fit frissonner de plaisir. Il bénissait la déesse de la Lune de lui avoir destiné cette femme. Il ne pouvait souhaiter mieux que cette compagne. Il aimait le parfum qu'elle dégageait, la douceur de sa peau, son assurance teintée de défiance. Comment résister à cet appel de l'amour lorsque l'on se sentait si complet et si heureux ? Il savait qu'il devrait la mener dans son lit et rentrer chez lui, mais le petit corps chaud qui s'accrochait à lui avait raison de sa volonté. Il lâcha alors prise et s'endormit à son tour. Il aurait certainement d'horribles courbatures le lendemain, le canapé n'étant pas prévu pour un corps aussi grand servant d'oreiller à celui d'Emilia.

Trop chaud. Ce fut ce qui réveilla Emilia bien avant que son réveil ne sonne. Elle émergea difficilement et mit du temps à comprendre où elle se trouvait. Elle sourit intérieurement lorsqu'elle comprit qu'elle était littéralement couchée sur Bly. Ce dernier la tenait contre lui, ses bras l'empêchant de tomber. Il ne devait pas être très à l'aise, ses jambes dépassant du sofa. Elle repoussa la couverture qu'il avait déposé sur ses épaules, mais elle avait toujours trop chaud. Elle se tortilla comme elle put pour s'extirper des bras de l'homme, mais sentant qu'elle bougeait, Bly resserra sa prise. Elle rit doucement, amusée de la réaction de son ami. Voyant qu'elle n'y arriverait pas ainsi, elle décida de le réveiller.

- Bly ! Bly !

Il grogna, fronça des sourcils, grimaça avant de grommeler qu'il était trop tôt. Elle rit de plus bel.

- J'ai chaud ! laisse-moi me lever s'il te plaît.

Il soupira et desserra sa prise. Elle put se relever et fila boire un verre d'eau pour se rafraîchir. Elle vit sur l'horloge qu'il était quatre heures du matin. Elle se voyait mal renvoyer Bly chez lui pour finir sa nuit et elle avait un peu pitié de son grand corps qui dépassait de son petit canapé. Elle le rejoignit au salon où il semblait dormir encore bien que sa respiration soit moins profonde.

- Bly ! Viens, lève-toi. Viens te coucher dans le lit tu seras plus à l'aise.

A l'entente du mot "lit", le loup ouvrit les yeux. Il vérifia que la jeune femme était sérieuse et voyant la main que lui tendait Emilia, il se déplia et la suivit. Il connaissait déjà les lieux pour y avoir ramené la jeune femme. Il ôta son pantalon et se glissa sous la couette. Emilia était allée dans la salle de bain et il s'attendait à ce qu'elle le rejoigne.

- Tu ne dors pas ? lui dit-elle alors qu'elle revenait.

- Je ne vais pas tarder à me rendormir.

C'était un mensonge. Se trouver dans le lit d'Emilia réveillait son désir pour la jeune femme.

- Bien. Installe-toi bien. A tout à l'heure.

Elle allait quitter la pièce lorsqu'il l'arrêta :

- Tu ne te couches pas ?

- Si je vais me mettre dans le canapé.

Il se frappa la tête intérieurement quand il comprit qu'elle voulait simplement dormir plus confortablement. Avait-il rêvé leur rapprochement ? Son loup la voulait près de lui et il le voulait aussi. Malgré l'inconfort du canapé, il préférait cela que de ne pas pouvoir partager le même couchage qu'elle. Il tenta alors de la convaincre.

- Je sais que je suis grand, mais il me semble qu'il reste assez de place dans ton lit. Je ne veux pas te priver d'un bon sommeil.

- Je ne ...

Elle n'avait pas vraiment d'arguments à lui répliquer. Voyant son hésitation, il annonça :

- Je vais rentrer si cela te gêne ...

- Non, non, reste.

Vaincue, elle rebroussa chemin et s'installa de l'autre côté du lit. Au départ, elle se plaça le plus loin possible de Bly. Ce dernier respecta son espace, mais sourit lorsque, emportée par le sommeil, elle vint se blottir de nouveau contre lui. Il savoura la proximité de leurs corps et veilla sur son sommeil jusqu'à ce que le réveil ne sonne. Il coupa rapidement le son pour laisser un peu plus de temps à la jeune femme. Il se leva doucement et prit une douche rapide. Il aurait aimé garder un peu plus le parfum d'Emilia sur sa peau, mais il avait vraiment besoin de se rafraichir. Il soupira d'aise lorsque l'eau dénoua les tensions de ses muscles endoloris par cette nuit trop courte. Alors qu'il se savonnait il s'imagina quelques secondes que c'était Emilia qui faisait mousser le savon sur son corps. Il n'en fallut pas plus pour réveiller son désir. Il faisait son possible pour reprendre ses esprits en faisant baisser radicalement la température de l'eau quand il entendit des petits coups à la porte de la salle de bain.

Juste fait pour moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant