Chapitre 13

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La soirée qu'elle voulait tranquille se mua en crise existentielle. Elle faisait le point sur sa vie, sur ce qu'elle avait gagné depuis le départ de Brett et ce que l'arrivée de Bly avait apporté. Elle aimait la femme qu'elle était de venue, mais elle devait rester vigilante. Bly avait l'art et la manière de l'amadouer et de détourner l'attention sur lui. Il était comme tous ces hommes, heureux d'asservir la femme à leur avantage. Elle ne voulait plus être la faible femme qui tremble d'émoi devant une belle gueule. Alors oui il était séduisant, voire même sexy, mais non elle ne se laisserait pas avoir. Elle se frappa la tête avec son coussin en grognant évacuant sa frustration de ne pas arriver à se le sortir de la tête.

Elle lorgna alors son téléphone, se rappelant qu'il lui avait envoyé un message. Pour la tâche. Si elle pouvait mettre les choses au clair avec lui. Peut-être se faisait-elle des idées. Ils avaient été si proches, il aurait clairement pu en profiter et elle devait bien l'avouer, elle se serait laissée faire. Cependant, il s'était éloigné, il l'avait fui comme si son toucher lui était insupportable. Que devait-elle comprendre ? Elle avait toujours cru que Blake parlait de Bly quand il lui faisait des remarques sur son insatisfaction. Était-ce quelqu'un d'autre ? Avait-elle mal compris ? Pourtant au restaurant, cela avait été si bien. Il l'avait soutenue. Enfin, elle avait cru cela. Il avait tout gâché en voulant s'approprier les bénéfices de ses idées. Finalement, qui était Bly ? Un autre de ces hommes qui profitent des jeunes femmes travailleuses et courageuses ?

- Raahhhhh !

Le coussin vola à travers la pièce. Il n'y avait pas cinquante moyens pour être fixée ! Elle devait apprendre à le connaître. En tout bien, tout honneur. Juste pour savoir si elle devait s'en faire un ennemi. Ce dont elle était presque persuadée. Elle avisa l'heure : vingt-et-une heures trente. Un peu tard peut-être. Tant pis ! Elle ouvrit le fil de discussion et lança les hostilités. Evidemment, elle ne savait pas trop par quoi commencer. S'excuser ? Oui mais de quoi ? Elle n'avait rien à se reprocher. Elle écrivit d'abord un simple bonsoir. Elle verrait bien s'il répondait, peut-être n'était-il pas disponible. Cela mettrait fin à sa tentative pathétique d'apprendre à le connaître. Il ne répondait pas, voilà, l'affaire était réglée !

Alors que nerveusement, elle se levait pour aller se coucher, la sonnerie de notification retentit.

Bonsoir. Vous avez besoin de quelque chose ?

Non, je voulais juste ...

Elle effaça le message qu'elle venait de taper, ne sachant pas comment formuler les choses. Elle reprit ensuite en choisissant la sincérité. Il se moquerait peut-être d'elle, mais qu'en avait-elle à faire ? Elle nierait tout en bloc s'il en parlait au bureau.

Je voulais juste que l'on reparte sur de bonnes bases. 

Je n'ai pas été très agréable avec vous.

J'apprécie votre geste, mais ne serait-il pas

mieux de se voir pour en parler ?

Mily se sentit piégée. Bien sûr qu'apprendre à le connaître de visu serait plus judicieux, mais elle n'était pas prête à l'affronter. Elle ne pouvait pas nier qu'il l'intimidait et qu'elle perdait ses moyens face à lui. Mais jamais elle ne l'avouerait ! Même sous la torture. Alors qu'elle allait répondre, il ajouta :

Je sais qu'il est un peu tard, mais je me

sens un peu seul dans cette nouvelle ville

et j'aime votre compagnie.

Qui était-elle pour rejeter une demande si polie ? Elle comprenait ce sentiment de solitude qui lui broyait le ventre certains soirs. Elle se leva rapidement et répondit sans attendre craignant de changer d'avis.

D'accord. Dans une demi-heure ?

Où voulez-vous que l'on se rejoigne ?

Je passe vous prendre.

Elle fut surprise par la promptitude de sa réponse mais elle ne s'en formalisa pas. Il savait où elle habitait puisqu'il était déjà venu pour la soirée au restaurant avec les clients. Cela faisait quinze minutes que le rendez-vous était pris quand la sonnerie de l'interphone retentit. Emilia alla répondre se demanda qui cela pouvait être, c'était bien trop tôt pour être Bly.

- Bonsoir.

- Bonsoir, Emilia c'est moi Bly. Je suis désolé, je suis en avance. C'était juste pour vous dire que vous pouvez descendre quand vous voulez.

Sa voix semblait hachée comme s'il avait froid. Il était vrai que les soirées étaient fraîches et que la rue était en plein vent. Il attendrait certainement dans sa voiture. Puis, se rappelant qu'il n'y avait aucun stationnement devant l'immeuble, elle appuya sur l'ouverture de la porte.

- Montez, ne restez pas dehors, il fait vraiment froid.

Elle n'en revenait pas de ce qu'elle venait de faire. Elle fila sans attendre dans sa chambre et enfila la première robe qu'elle trouva. Elle avait des manches longues, avec un joli décolleté. Des bas feraient l'affaire. Bly toqua discrètement à la porte. Elle alla lui ouvrir pieds nus s'excusant de ne pas être encore prête.

- Non c'est moi, je suis en avance, c'est de ma faute. C'est gentil de m'avoir ouvert.

Emilia repartit ou plutôt s'enfuit dans sa chambre pour masquer ses joues rougies. Des réminiscences vivaces de son rêve érotique prenaient place dans son esprit. Comme dans son rêve, il trouvait naturellement sa place dans son intérieur. Il était beau, portant le même costume qu'au bureau mais ayant retiré la cravate et ouvert un bouton. Il n'en était que plus sexy encore. Elle revint peu après, ayant enfilé ses bas et ses chaussures. Il sembla un peu perdu quand elle revint dans la pièce. Mais il se ressaisit rapidement et attrapa son manteau pour l'aider à se vêtir.

- Merci, souffla-t-elle.

Elle tressaillit lorsqu'elle sentit son parfum. Elle aimait beaucoup cette odeur qui le caractérisait. Il la retint un instant, l'air grave et sérieux :

- Emilia, avant que l'on sorte, est-ce que vous acceptez que l'on se tutoie ? Définitivement, s'il vous plait.

Elle réfléchit un instant et il était vrai qu'il était l'un des seuls avec le chef qu'elle ne tutoyait pas. Elle hocha simplement la tête. Comme si elle venait de lui offrir la lune, il sourit illuminant la pièce de sa joie.

- Passe devant, je vais fermer la porte, lui dit-elle, prouvant ainsi qu'elle le tutoyait enfin.

Le trajet se fit dans un calme serein. Elle le guida deux rues plus loin dans un café lounge très accueillant. Elle aimait s'y rendre lorsqu'elle voulait voir du monde sans pour autant être gênée par la cohue.

- C'est sympa ici, lui fit remarquer Bly. Je ne connais pas.

- J'aime l'ambiance et les serveurs sont très agréables.

Pour corroborer ses dires, un jeune homme s'approcha pour prendre leur commande. Il sourit généreusement à la jeune femme. Bly se rembrunit et expédia rapidement le serveur. Emilia fut un peu surprise de la perte de sa jovialité. Lui si agréable avec tous en règle générale.

- Quelque chose te déplait ?

Voyant l'inquiétude de la jeune femme, il se reprit :

- Non, tu es magnifique et ce serveur semblait intéressé.

- Ah oui ?

Naïve, elle se retourna pour voir le jeune serveur qui lui jetait des coups d'œil depuis le bar où il préparait les commandes. Voulant capter de nouveau son attention, il retint à grand peine la phrase qui lui brûlait les lèvres : « Moi aussi je suis intéressé. » Il lâcha à la place :

- Au fait, comment fait-on pour repartir sur de bonnes bases ?

Juste fait pour moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant