Juste fait pour moi

Chapitre 20

             Le bruit de l'eau de l'autre côté de la cloison éveilla une envie pressante. Sans même réfléchir sur l'origine du son, Emilia se leva presque machinalement pour aller aux toilettes qui se trouvaient dans la salle de bain. Elle ne remarqua pas tout de suite les vêtements de Bly soigneusement plié sur la chaise. Son cerveau ne releva l'information que lorsqu'elle abaissa la poignée de la porte de la salle d'eau. Il lui envoya une multitude d'images du corps nu de Bly, tel qu'elle l'imaginait. Une chaleur s'épanouit au creux de son ventre et sur ses pommettes. Elle se retint d'ouvrir la porte juste à temps. Elle remonta la poignée et se tourna dos à l'ouverture. Elle souffla pour calmer son cœur qui faisait des embardées sauvages dans sa cage thoracique. Les battements sourds à ses oreilles l'empêchèrent de remarquer que l'eau avait cessé de couler. Elle ne perçut pas non plus les pas légers de Bly de l'autre côté qui ouvrit la porte. Appuyée sur celle-ci, Mily bascula soudainement en arrière pour atterrir contre le torse chaud et musclé de l'objet de son excitation. Il ne dit rien, grogna cependant quelque chose sans qu'elle ne saisisse le sens. Au lieu de la relâcher, il l'emprisonna fermement contre lui.

— Tout va bien ?

La voix de l'homme était plus profonde et rauque qu'à l'ordinaire. Elle se laissa aller une seconde, son dos reposant contre sa poitrine, se remettant de la peur qu'elle avait ressentie lorsqu'elle avait cru tomber. Son cœur battait toujours aussi fort. Elle n'osait pas ouvrir la bouche, elle hocha simplement la tête.

— J'ai cru que tu n'allais pas bien, je t'ai entendu...

Il ne pouvait pas lui dire qu'il avait entendu son cœur se mettre à battre soudainement fort, qu'il avait cru qu'elle était en danger. Son loup avait agi par pur instinct, c'était lui qui n'arrivait pas à la relâcher. Il la désirait tellement que c'en était presque douloureux. Ses mains agirent sans qu'il n'en soit réellement à l'initiative. Elles pressèrent le corps de la jeune femme contre lui. Il se pencha pour respirer son odeur dans son cou et ne résista pas à lui mordiller la nuque et l'épaule. Mily ne bougea pas. Son cœur battait toujours aussi fort. Elle ferma les yeux savourant la pression et les caresses de Bly. Elle posa ses doigts sur les mains de l'homme qui peuplait ses fantasmes. Elle ne remarqua pas tout de suite qu'elles étaient différentes, plus allongées, plus velues et surtout munies d'ongles acérés. Elle ne percevait que l'impérieuse envie qu'il la touche. Comme pour y répondre, il remonta ses doigts sur sa poitrine déjà tendue par l'excitation.

Le désir de l'homme appuyé contre son postérieur ne laissait aucun doute quant à son envie d'elle. Elle gémit lorsqu'il pressa davantage son sexe contre elle et qu'il enserra ses seins sous ses mains. Sa bouche parcourait son cou, elle alternait entre les baisers doux, les caresses langoureuses et les morsures délicates. Il se délectait de son parfum et de la douceur de sa peau. Il voulait la faire sienne, il se retenait pour ne pas lui arracher ses vêtements. Son corps nu était prêt pour elle, il voulait sentir sa peau contre la sienne, se fondre en elle. Elle répondait si bien à ses caresses. Les gémissements qui s'échappaient de ses lèvres achevèrent de lui faire perdre tout contrôle.

— J'ai tellement envie de toi.

Mily se raidit soudain, comme si ses mots la réveillaient. Bly perçut le frisson qui traversa son échine. Craignant d'être allé trop vite, il refoula comme il put son loup, reprenant un semblant de contrôle.

— Hey ! Tout va bien si tu ne veux pas. Je ne te forcerai jamais.

Doucement, comme s'il cherchait à rassurer un chaton effrayé, il desserra sa prise, éloigna son bassin et il la tourna pour qu'elle lui fasse face. Mily n'osa pas tout de suite le regarder, baissant les yeux sur ses mains. Il posa une main sur sa joue et lui bascula lentement le visage en arrière pour qu'elle le regarde. Emilia évita d'abord ses yeux, mais plongea finalement dans ses orbes brillantes.

— Tes yeux... laissa-t-elle échapper.

Bly comprit que ses pupilles lupines étaient visibles. Le loup en lui voulait protéger sa compagne et avait du mal à laisser l'homme aux commandes. Il pensa que c'était la bonne occasion pour lui dire qui il était, ce qu'il était. La peur du rejet le fit hésiter. Était-elle prête à accepter sa différence ? Si elle ne voulait pas de lui, il en mourrait. Même s'il s'était pas encore uni à elle, il lui était déjà profondément attaché. Elle était celle qui lui était destinée, il n'arrivait pas à envisager la vie sans elle.

— Je peux attendre, mais je t'en prie ne me rejette pas.

Emilia fronça les sourcils. Que voulait-il dire par le rejeter ? Qu'est-ce qu'il lui cachait ? Bien qu'elle fasse confiance à Bly jusqu'à présent, elle se mit à douter. La blessure que Brett lui avait infligée était encore trop prégnante pour qu'elle ne se protège pas. Brique par brique elle remonta le mur autour de son cœur. Elle voulut s'éloigner afin de prendre du recul sur la situation et se détacher de l'emprise hypnotique de l'homme. C'est à ce moment-là qu'elle se rendit compte qu'il était complètement nu. Au lieu de le rendre vulnérable et misérable, la nudité de Bly le rendait encore plus éblouissant. Elle se couvrit les yeux par pudeur en lâchant un petit cri pudibond. Au lieu de se rhabiller, Bly bondit vers elle et lui ôta les mains du visage.

— Je n'ai rien à te cacher. Regarde moi.

Elle leva de nouveau les yeux vers lui et constata que des prunelles fauves la fixaient avec un mélange d'avidité et d'appréhension.

— Je suis un homme-loup. Mon âme est mêlée à celle d'un loup. Nous partageons ce corps.

Emilia resta figée. Comme si le temps venait de s'arrêter. Elle ne savait que penser de ce que Bly déclarait. Un homme-loup ? Un loup-garou comme dans les romans de fantasy ? Sans attendre qu'elle ne réponde, il ajouta :

— Il est inquiet pour toi, il est difficile à contenir lorsque je suis près de toi. Ce sont ses yeux que tu vois.

Il ferma les yeux une seconde, et lorsqu'il souleva les paupières, les iris chocolat la fixèrent. Emilia ne savait comment définir ce qu'elle ressentait. Il n'avait pas chercher à la manipuler ou à lui mentir. Il avait peur qu'elle le rejette pour sa différence. Elle fut surprise de ne pas être plus choquée que ça d'apprendre qu'il n'était pas un simple humain. Cependant, elle avait besoin de temps pour se faire à l'idée. Voyant qu'il s'inquiétait qu'elle ne réponde pas, elle finit par réagir.

Elle posa sa paume sur la main de Bly qui se trouvait sur sa joue, elle appuya légèrement. L'homme en fut soudain perturbé. Que cherchait-elle à lui dire ainsi ? Elle ne quitta pas ses yeux et le rassura :

— Je ne compte pas te rejeter. Mais j'ai besoin de temps.

Il se remit à respirer en entendant ces quelques mots. Elle voulait bien qu'il reste près d'elle. Du temps, elle voulait juste du temps.

— Nous avons tout le temps que tu voudras.

"Mon amour". Il tut les mots doux qui lui brûlaient la langue. Il ne devait pas la presser. Il déposa un léger baiser sur son front. Mily souffla comme soulagée qu'il ne le prenne pas mal.

— Tu devrais t'habiller, il ne faudrait pas que tu prennes froid...

Elle n'osait pas quitter ses yeux de peur d'en voir un peu trop. Il rit doucement.

— Désolé, tu dois trouver que je manque de pudeur, mais être à la fois un homme et un loup fait que je me retrouve souvent nu entre deux transformation, cela ne me gêne pas d'être vu ainsi.

Elle rougit.

— Je ne sais pas comment tu fais, bien que tu n'aies pas à avoir honte de ton corps, tu es... très beau.

Bly sourit de toutes ses dents et lui souleva les sourcils, aguicheur.

— Ce que tu vois te plait ? ajouta-t-il en écartant les bras ?

Elle ne savait plus où se mettre. Elle attrapa le premier vêtement sur la chaise près d'eux et le lui balança au visage. Mortifiée elle se rendit compte après coup qu'il s'agissait de son caleçon. Bly s'amusa de sa gêne et rit de plus belle lorsqu'elle se faufila derrière lui pour entrer dans la salle de bain, ferma la porte et la verrouilla.