Les jours suivants, ils marchent ensemble sur le trottoir qui mène au collège. A chaque coin de rue, un nouveau camarade accoste Barnes, l'accapare avec des blagues auxquelles Steve ne comprend rien, dans un langage brut qu'il n'aime pas. Des exagérations à tout va, des plaisanteries scabreuses, des piques qui font rire gras. Ils marchent devant, mais Barnes se retourne souvent. Quelques filles, déjà, le suivent des yeux. Steve pense, en le voyant sourire ainsi, entouré de gars solides qui cherchent son attention, auréolé de filles qui rougissent : Barnes, c'est vraiment l'enfant chéri de l'Amérique.
Et comme s'il l'avait entendu, James Barnes se retourne et lui sourit.
Ce matin-là, il joue encore à la balle dans la cour de récréation. Il a plu ; à chaque rebond, le ballon fait jaillir une gerbe de paillettes transparentes qui éclatent au soleil. Les vêtements des garçons sont sales, leurs fronts moites malgré les températures glacées de l'hiver, ils se prennent au sérieux, se bousculent en criant des rires, ne lâchent rien, galvanisés par un je ne sais quoi de nerveux dans l'air, la fatigue ou l'orage. Énervé, Douglas entrave les bras de Barnes qui se libère sèchement : « C'est pas du jeu ! » Le coéquipier vient de marquer. « Ça ne compte pas !
- Détends-toi, Barnes !
- Tu vas voir, tocard ! »
Ils luttent avec encore plus d'acharnement et de fébrilité, et Douglas se trouve bientôt acculé par la vivacité de Barnes. Tentant le tout pour le tout, il feinte et lance le ballon de toutes ses forces. Sous les yeux horrifiés des joueurs, son projectile fuse droit vers le bâtiment et fend une fenêtre, d'un grand trait net.
Steve reste bouche bée dans le silence stupéfait. « Oh non » souffle son camarade Arnie. Douglas s'écrie : « Putain ! ». Le directeur Harrington surgit. Sa menace, encore silencieuse pourtant, fige tous les élèves dans un contre-jour un peu étrange. Sur le sol noir mouillé, le soleil, mouillé aussi, découpe leurs silhouettes graves.
« James Barnes. C'est votre ballon.
- C'est pas moi qui ai lancé !
- Qui, alors ? »
Personne ne pipe mot. Le directeur appelle à nouveau.
« James Barnes. »
Le jeune homme avance, le visage fermé. Steve sent ses pieds s'animer à leur tour.
« Eh, qu'est-ce que tu fais ? s'étonne Arnie.
- Rogers, ne vous en mêlez pas ! » avertit le directeur.
Steve continue d'avancer à la suite de Barnes, ils sont alors les seuls à se mouvoir dans le silence des élèves pétrifiés. Encore hors de portée de voix de Harrington, il balbutie à son camarade, surpris, contrarié, qui le fusille du regard avec le reste du monde :
« J'ai tout vu, tu veux que je le dise ?
- Non ! » gronde-t-il indigné.
Et il accélère le pas, laissant là un Steve pétri d'embarras.
Barnes est mis à l'isolement, à midi, on voit par la fenêtre son visage furibond, les yeux noirs, toisant ses compagnons qui jouent sans lui. Ils lui adressent des signes désolés mais il continue de bouder. Steve ne peut s'empêcher de penser qu'un visage si doux n'a rien de bien menaçant. « Qu'est-ce qui te fait rire ? s'étonne Arnie.
- Rien... Qu'est-ce que tu disais ? »
Il boude encore quand il descend, l'après-midi, et saute sur le dossier du banc qu'occupe Steve, les mains dans les poches. Arnie, John et Thomas qui discutent un peu plus loin, le regardent avec étonnement. Steve lève les yeux, mais Barnes n'épie pas ce qu'il fait. Il marmonne, au bout d'un moment :
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À Brooklyn
Фанфик// Stucky // À Brooklyn, rien ne se passe comme prévu. Voici comment Bucky et Steve sont devenus amis inséparables et comment cette amitié a surpassé le déni et le refoulement Voici aussi comment Steve a entamé sa carrière d'artiste, en meme temps q...